PARIS: Emmanuel Macron a annoncé mardi vouloir "rouvrir le débat" du "temps scolaire dans l'année" et de la durée des vacances d'été, un thème récurrent qui mérite une réflexion plus approfondie selon les syndicats enseignants, pour qui c'est un "coup de com'" du président.
"Edouard Philippe avait lancé déjà le débat il y a quelques semaines, mais là ça devient complètement irresponsable, à la fin de l'année, de jeter de l'huile sur le feu sur un sujet de tension, sans concertation", a réagi Elisabeth Allain-Moreno, secrétaire générale du SE-Unsa. "S'il fallait trouver une nouvelle annonce pour se mettre à dos toute une profession, c'est celle-là".
En visite à Marseille pour la seconde phase de son plan "Marseille en grand" lancé en septembre 2021, Emmanuel Macron a esquissé mardi les contours d'"une nouvelle école" avec notamment des horaires élargis au collège, mais aussi sans doute moins de vacances, pour tenter de réduire les inégalités.
"On doit rouvrir un débat qui est celui du temps scolaire dans l'année, une des autres grandes hypocrisies françaises", a estimé le président de la République. "Vos collégiens, quand est-ce qu'ils ont commencé leurs vacances? On a des enfants qui ont deux mois et demi parfois de vacances, presque trois pour certains", a poursuivi le chef de l'Etat.
"Il faut repenser ce temps dans l'année. Quand on a des vacances de trois mois, l'inégalité revient", a insisté Emmanuel Macron, estimant qu'à la rentrée de septembre, les élèves "reviennent avec les compétences qu'ils avaient un mois à un mois et demi avant l'arrêt des cours: on détruit en quelque sorte de l'apprentissage collectif". "La conséquence de cela, c'est qu'on bourre les semaines de nos enfants, qui arrivent crevés tous les soirs", a-t-il poursuivi.
En abordant le sujet début juin, l'ancien Premier ministre Edouard Philippe avait dressé les contours de sa vision de l'école. Le président du parti Horizons avait posé la question "d'une réorganisation des rythmes sur l'année", remettant notamment en cause la coupure estivale, pour répondre à ce qu'il considère comme étant la caractéristique la plus "abominable" du système éducatif français: la reproduction des inégalités.
"intérêts économiques"
Eternel serpent de mer, le raccourcissement des vacances d'été revient régulièrement sur la table alors que chaque ministre de l'Education s'échine sur le sujet du calendrier scolaire.
Et ces nouvelles déclarations sans concertation irritent les syndicats.
"C'est une annonce qui tombe comme ça, sans avoir partagé des éléments de constat, de problématique", regrette Catherine Nave-Bekhti, du Sgen-CFDT. Pour Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, premier syndicat du secondaire, c'est "un effet de com' qui joue sur le cliché sur les vacances d'été trop longues".
Pour les syndicats, ce sujet mérite aussi d'être abordé de manière plus large, en repensant le temps scolaire sur l'ensemble de l'année - avec des périodes actuellement inégales entre les différentes vacances scolaires -, ou encore sur la semaine et même sur la journée, et en repensant également l'organisation des temps hors école pour les enfants, notamment dans les quartiers sensibles.
Pour Frédéric Marchand, secrétaire général de l'Unsa Education, "le temps scolaire est une problématique qui engage l'ensemble de la société, qui interroge l'éducation populaire et ses centres de loisirs, les collectivités territoriales qui organisent le temps périscolaire, qui questionne l'accès à des modes de garde sur tout le territoire, voire même la capacité des infrastructures touristiques et routières".
"Il ne peut être réglé de manière péremptoire", estime-t-il.
"On voit bien que ce serait bien de réorganiser les vacances sur l'année scolaire", souligne Guislaine David, secrétaire générale du Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire. "Le frein, ce n'est ni les élèves, ni les enseignants ni les parents. Le frein c'est l'économie du tourisme", juge-t-elle.
Grégoire Ensel, président de la FCPE, première fédération de parents d'élèves, partage ce constat.
"Il faut remettre la question du rythme de l'enfant au centre. Le calendrier scolaire est jusqu'ici régi par les intérêts économiques", estime-t-il. Pour lui, "il faut une véritable concertation, avec tout le monde autour de la table".