Médias: la crainte d'une « dérive à l'américaine» de type Fox news en France

Le journaliste français Geoffroy Lejeune pose lors d'une séance photo à Paris le 28 septembre 2020. (Photo, AFP)
Le journaliste français Geoffroy Lejeune pose lors d'une séance photo à Paris le 28 septembre 2020. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 27 juin 2023

Médias: la crainte d'une « dérive à l'américaine» de type Fox news en France

  • Le Journal du dimanche (JDD), monument dominical hexagonal dans lequel les puissants de tous bords se plient régulièrement au jeu de l'interview, vient de se voir signifier l'arrivée à sa tête de Geoffroy Lejeune
  • « La rédaction du JDD refuse d'être dirigée par un homme dont les idées sont en contradiction totale avec les valeurs du journal», a fait savoir l'association des journalistes de ce titre

PARIS: Après des télés, une radio, un magazine... la reprise en main d'un journal de référence par le milliardaire Vincent Bolloré, accusé d'imposer ses idées très conservatrices dans les rédactions, provoque une levée de boucliers en France face à une "dérive à l'américaine" de type Fox News.

Le Journal du dimanche (JDD), monument dominical hexagonal dans lequel les puissants de tous bords se plient régulièrement au jeu de l'interview, vient de se voir signifier l'arrivée à sa tête de Geoffroy Lejeune, tout juste débarqué de Valeurs actuelles, un hebdomadaire d'extrême-droite.

Il a fallu deux semaines à peine au nouveau propriétaire Bolloré, dont la commission européenne a validé le 9 juin la prise de contrôle du JDD, du très people magazine Paris Match, ainsi que de la radio Europe 1 pour provoquer une grève à la quasi-unanimité au Journal du dimanche.

"La rédaction du JDD refuse d'être dirigée par un homme dont les idées sont en contradiction totale avec les valeurs du journal", a fait savoir l'association des journalistes de ce titre.

Un mouvement soutenu par le monde syndical et la gauche. "Le JDD, dans sa forme actuelle, n'a plus aucun avenir" car "Vincent Bolloré veut faire une presse idéologique au service de l'extrême droite", a estimé sur la télévision publique l'ex-président socialiste François Hollande (2012-2017).

La majorité du président Emmanuel Macron, via la ministre de la Culture Rima Abdul-Malak, a également dit "comprendre les inquiétudes" des salariés du JDD. "Pour nos valeurs républicaines comment ne pas s'alarmer ?", s'est-elle interrogée sur les réseaux sociaux.

Car le milliardaire proche des milieux catholiques traditionalistes, qui s'est toujours défendu d'utiliser les médias qu'il contrôle pour promouvoir ses opinions, laisse un souvenir amer dans toutes les rédactions où il s'est imposé.

Quand le groupe Vivendi, propriété de Bolloré, rachète en 2015 Canal+, sa chaîne d'information iTélé connaît l'année suivante 31 jours de grève très médiatique face à des dirigeants inflexibles. La quasi-totalité des journalistes finit par quitter la chaîne.

iTélé devient alors CNews et prend un virage très à droite. Durant la dernière campagne présidentielle, le candidat d'extrême-droite Eric Zemmour, ancien employé de la chaîne, y est l'objet d'attentions quotidiennes.

Polarisation

Tout comme il est plébiscité par Valeurs actuelles, qui avec le nouveau patron du JDD Geoffroy Lejeune à sa tête, tient une ligne éditoriale proche de l'extrême-droite.

"CNews, ça rime avec Fox News", estime Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF), interrogé par l'AFP. "A la fin, on ne sait plus si les médias sont des rédactions ou des partis politiques."

"On est dans une dérive à l'américaine, (...), où il y a un risque de polarisation, qui fait que les médias finissent dans des guerres idéologiques plus que dans la recherche de la réalité, juge-t-il. Et ça, ce n'est pas un modèle démocratique."

La France, via Vincent Bolloré, comble un "décalage" en s'alignant sur des médias étrangers controversés, notamment le tabloïd britannique The Sun ou la chaîne Fox News, tous deux propriété du richissime Australien Rupert Mordoch, observe Arnaud Mercier, professeur en communication à l'Institut français de la presse.

Dans un paysage médiatique marqué par la prise croissante de participations ou de contrôle des principaux médias français par des milliardaires du cru, généralement marqués à droite, Vincent Bolloré se distingue en allant bien plus loin qu'eux via "la stratégie du bernard l'hermite", observe-t-il.

Et d'énumérer : "Il prend un média existant, il l'évide d'une partie de son ton décalé, libéral, pour mettre à sa place des lignes éditoriales réactionnaires, conservatrices", au nom d'une "guerre culturelle" à mener contre la "l'idéologie dominante" libérale.

Depuis des années, l'extrême-droite théorise régulièrement la quête de "l'hégémonie culturelle", selon la formule du philosophe marxiste italien Antonio Gramsci (1891-1937), qui doit précéder la conquête du pouvoir par les urnes.

"Quelle meilleure preuve du conformisme médiatique que le tollé général provoqué par la nomination d'un directeur de rédaction accusé de n'être pas de gauche? #JDD", a ainsi réagi sur Twitter Eric Zemmour.

Plus surprenant, l'ex-oligarque russe en exil, Mikhaïl Khodorkovsky, a à l'inverse fait part de sa "préoccupation sérieuse" pour le JDD.

"La principale source d'inquiétude réside dans le fait qu'un influent hebdomadaire français sera placé sous la direction d'une personne qui a exprimé son soutien à Éric Zemmour, connu pour ses déclarations controversées et ses attitudes apologétiques envers le criminel de guerre Vladimir Poutine", explique l'opposant russe.

"Le soutien à des politiciens liés au régime criminel de Poutine soulève assurément des doutes quant à l'équilibre et à l'objectivité des informations publiées par le journal", redoute-t-il.


Lutte contre l'immigration clandestine : plus de 40 pays réunis à Londres

Des sauveteurs britanniques aident une vingtaine de migrants sur un bateau semi-rigide essayant de traverser la Manche depuis la France (Photo, AFP).
Des sauveteurs britanniques aident une vingtaine de migrants sur un bateau semi-rigide essayant de traverser la Manche depuis la France (Photo, AFP).
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  • Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, accueille ce lundi à Londres les représentants d'une quarantaine de pays pour un sommet de deux jours dédié à la lutte contre l'immigration illégale.
  • Les trois premiers mois de l'année ont toutefois été marqués par un nouveau record d'arrivées, avec un total de 5 840 personnes ayant traversé la Manche à bord de ces embarcations de fortune.

LONDRES : Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, accueille ce lundi à Londres les représentants d'une quarantaine de pays pour un sommet de deux jours dédié à la lutte contre l'immigration illégale, un dossier prioritaire pour Londres.

Le dirigeant travailliste, qui a pris ses fonctions en juillet dernier, a promis, comme ses prédécesseurs conservateurs, d'endiguer le phénomène des « small boats » (petits bateaux) en luttant contre les réseaux de passeurs.

Les trois premiers mois de l'année ont toutefois été marqués par un nouveau record d'arrivées, avec un total de 5 840 personnes ayant traversé la Manche à bord de ces embarcations de fortune.

Keir Starmer donnera le coup d'envoi de ce « premier grand sommet international organisé au Royaume-Uni pour faire face à l'urgence de l'immigration clandestine », qui se tiendra sous la houlette de la ministre de l'Intérieur Yvette Cooper.

Le ministre français Bruno Retailleau et son homologue allemande Nancy Faeser sont attendus, de même que des représentants du reste de l'Europe, d'Asie, du Moyen-Orient, d'Afrique et d'Amérique du Nord, y compris des États-Unis.

Les discussions porteront sur la collaboration entre les États pour démanteler les réseaux de passeurs de migrants, notamment vers le Royaume-Uni et les pays de l'Union européenne.

« Je ne crois tout simplement pas qu'il soit impossible de s'attaquer à la criminalité organisée liée à l'immigration », a déclaré le dirigeant travailliste dans un communiqué diffusé dimanche par le ministère de l'Intérieur.

- « Consensus mondial » -

« Nous devons combiner nos ressources, partager nos renseignements et nos tactiques, et nous attaquer au problème en amont », doit-il ajouter.

Ce sommet s'inscrit dans le prolongement des discussions que Mme Cooper avait eues en décembre avec ses homologues belge, allemand, français et néerlandais.

Les cinq pays avaient alors signé un plan d'action commun destiné à renforcer la coopération pour lutter contre ces réseaux de passeurs de migrants.

Le sommet de cette semaine réunira des représentants de pays de départ de migrants, comme le Vietnam ou l'Irak, ainsi que de pays de transit, comme ceux des Balkans.

Il réunira également le directeur de la Border Force, l'agence responsable des opérations de contrôle de la frontière au Royaume-Uni, ainsi que des représentants d'Interpol, d'Europol et d'Afripol.

Selon le ministère britannique de l'Intérieur, les ministres discuteront de l'équipement, de l'infrastructure et des faux papiers que les bandes criminelles utilisent pour faire entrer des personnes illégalement.

Ils examineront également le fonctionnement des filières et chercheront à « établir un consensus mondial sur la lutte » contre le recrutement de migrants en ligne.

Les Britanniques souhaitent également voir avec la Chine comment elle peut cesser d'exporter des moteurs et d'autres pièces détachées de petits bateaux utilisés pour les traversées de la Manche.

Keir Starmer est sous pression, face à la montée du parti anti-immigration Reform UK de Nigel Farage, qui a obtenu environ quatre millions de voix lors des élections générales de juillet, un résultat sans précédent pour un parti d'extrême droite.

Le Premier ministre a comparé les passeurs d'immigrés clandestins à des « terroristes ». En réponse, son gouvernement a introduit un projet de loi conférant aux forces de l'ordre des pouvoirs comparables à ceux dont elles disposent en matière de lutte antiterroriste, afin de combattre ces réseaux.

En février, le gouvernement a durci les règles d'acquisition de la nationalité pour la rendre pratiquement impossible à une personne arrivée illégalement au Royaume-Uni.

Il a aussi annoncé des règles plus strictes en matière de droit du travail.

« Fermer les yeux sur le travail illégal fait le jeu des passeurs qui tentent de vendre des places sur des bateaux peu solides et surchargés en promettant un travail et une vie au Royaume-Uni », a déclaré dimanche Mme Cooper, citée dans un communiqué de son ministère.

Au total, plus de 157 770 migrants sont arrivés au Royaume-Uni en traversant la Manche à bord de petites embarcations depuis que le gouvernement a commencé à collecter des données en 2018. 


À un mois du vote, le nouveau Premier ministre canadien, Mark Carney, est en tête

Le Premier ministre canadien Mark Carney s'exprime lors d'une conférence de presse au port de Montréal, à Montréal, Canada, le 28 mars 2025.  (Photo ANDREJ IVANOV / AFP)
Le Premier ministre canadien Mark Carney s'exprime lors d'une conférence de presse au port de Montréal, à Montréal, Canada, le 28 mars 2025. (Photo ANDREJ IVANOV / AFP)
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  • Le président américain, ses déclarations, sa personnalité et la menace qu'il fait peser sur l'économie et la souveraineté canadienne sont en effet le point central de cette campagne.
  • Selon tous les experts, la question que les Canadiens vont se poser au moment de déposer leur bulletin le 28 avril sera simple : qui de Mark Carney ou de Pierre Poilievre pourra le mieux affronter Donald Trump ces prochaines années ?

MONTREAL : À quatre semaines des élections législatives au Canada, le Premier ministre et candidat libéral Mark Carney est en tête des sondages devant le conservateur Pierre Poilievre. Il semble réussir son pari d'incarner, aux yeux des électeurs, la personne idéale pour faire face à Donald Trump.

Le président américain, ses déclarations, sa personnalité et la menace qu'il fait peser sur l'économie et la souveraineté canadienne sont en effet le point central de cette campagne.

Selon tous les experts, la question que les Canadiens vont se poser au moment de déposer leur bulletin le 28 avril sera simple : qui de Mark Carney ou de Pierre Poilievre pourra le mieux affronter Donald Trump ces prochaines années ?

« L'économie est le principal enjeu pour moi dans cette élection, ainsi que tout ce qui touche au libre-échange avec les États-Unis », raconte à l'AFP Carol Salemi, une électrice d'Ottawa.

« Nous avons besoin d'une véritable négociation sur le commerce avec eux et d'un dirigeant fort pour le faire », ajoute-t-elle.

« Il nous faut quelqu'un de ferme face aux États-Unis. Il semble que tout le monde soit d'accord sur ce point et c'est une bonne chose », renchérit Danielle Varga, 22 ans.

Et à ce jeu-là, il semble bien que, pour l'instant, la préférence des électeurs se porte sur Mark Carney. Ce novice en politique, qui a dirigé les banques centrales du Canada et de Grande-Bretagne, a remplacé Justin Trudeau mi-mars au poste de Premier ministre.

Après une semaine de campagne, il a complètement renversé la tendance des derniers mois : le dirigeant libéral de 60 ans est maintenant en tête dans tous les sondages et pourrait même être en mesure de former un gouvernement majoritaire. 

« C'est l'élection la plus importante de notre vie », a-t-il martelé samedi. « Elle est cruciale pour redéfinir notre relation avec les États-Unis, défendre le Canada et bâtir une économie forte et unifiée », a-t-il poursuivi devant des électeurs de sa circonscription à Ottawa.

La semaine dernière, il a dû interrompre sa campagne après l'annonce par Donald Trump de son intention d'imposer des droits de douane de 25 % sur les importations de voitures. Une mesure qui viendrait s'ajouter aux tarifs douaniers déjà appliqués par Washington sur l'acier et l'aluminium.

Dans la foulée, les deux hommes ont eu un appel qualifié d'« extrêmement constructif » par le président américain. Un changement de ton de sa part, qui n'est pas passé inaperçu au nord de la frontière. 

- « Période exceptionnelle » -

De son côté, le conservateur Pierre Poilievre, 45 ans, a lancé sa campagne en mettant l'accent sur des réductions d'impôts, l'amélioration de l'accès au logement et le développement des ressources naturelles pour contrer les pressions américaines.

Cet homme politique de carrière cherche à tordre le cou à l'idée qu'il serait proche du président américain, devenue un handicap dans le contexte actuel.

« Le président Trump veut voir les libéraux rester au pouvoir. Nous savons pourquoi : avec eux, le Canada est faible et ils laisseront nos investissements s'enfuir vers les États-Unis", a-t-il estimé dimanche.

Les autres partis, notamment le Nouveau parti démocratique (NPD) de Jagmeet Singh et le Bloc Québécois de Yves-François Blanchet, peinent à faire entendre leur voix en pleine crise nationale.

« C'est vraiment une période exceptionnelle », juge Geneviève Tellier, professeure de sciences politiques à Ottawa, qui estime que « le Canada est à la recherche d'un sauveur ».

Selon elle, le « discours ferme » de Mark Carney jeudi, expliquant que « les relations avec les États-Unis ne seraient plus jamais comme avant », parle aux électeurs.

Les Canadiens se tournent vers Mark Carney, car « ils veulent de la sécurité et une figure rassurante en temps de crise », renchérit Daniel Beland, de l'université McGill de Montréal.

Dans ce pays de 41 millions d'habitants, dont le chef d'État en titre est le roi d'Angleterre, 343 sièges sont à pourvoir lors de cette élection anticipée. Le parti qui obtiendra la majorité (donc au minimum 172 députés) formera le prochain gouvernement et son chef deviendra Premier ministre.


Israël: Netanyahu choisit un ex-commandant de la marine comme nouveau chef du Shin Bet

La décision de limoger le chef du Shin Bet a provoqué d'importantes manifestations en Israël. (AFP)
La décision de limoger le chef du Shin Bet a provoqué d'importantes manifestations en Israël. (AFP)
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  • "Après avoir mené des entretiens approfondis avec sept candidats qualifiés, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a décidé de nommer l'ancien commandant de la marine, l'amiral réserviste Eli Sharvit, au poste de prochain directeur du Shin Bet"
  • Le gouvernement dirigé par M. Netanyahu a décidé de limoger le chef du Shin Bet, Ronen Bar, évoquant "une perte de confiance professionnelle et personnelle persistante entre le Premier ministre et le directeur du service"

JERUSALEM: Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a choisi l'ex-commandant de la marine Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet, indiqué lundi son bureau, malgré le gel par la Cour suprême de la demande du gouvernement de destituer le directeur en exercice du service de sécurité intérieure.

"Après avoir mené des entretiens approfondis avec sept candidats qualifiés, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a décidé de nommer l'ancien commandant de la marine, l'amiral réserviste Eli Sharvit, au poste de prochain directeur du Shin Bet", indique le bureau de M. Netanyahu dans un communiqué.

"L'amiral Sharvit a servi pendant 36 ans dans les forces de défense israéliennes, dont 5 ans en tant que commandant de la marine. A ce poste, il a dirigé le développement de la force de défense maritime (...) et géré des systèmes opérationnels complexes contre le (mouvement islamiste palestinien) Hamas, le (mouvement islamiste libanais) Hezbollah et l'Iran", ajoute le communiqué.

Le gouvernement dirigé par M. Netanyahu a décidé de limoger le chef du Shin Bet, Ronen Bar, évoquant "une perte de confiance professionnelle et personnelle persistante entre le Premier ministre et le directeur du service" qui empêche "le gouvernement et le Premier ministre d'exercer efficacement leurs pouvoirs".

Mais à la suite de requêtes déposées par l'opposition israélienne et une ONG, la Cour suprême a suspendu le 21 mars le limogeage de M. Bar par le gouvernement, jusqu'à l'examen des recours d'ici au 8 avril.

La procureure générale du pays, Gali Baharav-Miara, qui joue aussi le rôle de conseillère juridique du gouvernement, a averti M. Netanyahu que la décision de la Cour suprême lui "interdisait" temporairement de nommer un nouveau chef du Shin Bet.

Mais M. Netanyahu a insisté sur le fait qu'il appartenait à son gouvernement de décider qui dirigerait l'agence de sécurité intérieure.

La décision de limoger le chef du Shin Bet a provoqué d'importantes manifestations en Israël.

Une partie des Israéliens dénoncent ce qu'ils considèrent comme une dérive autocratique du Premier ministre, à la tête d'un des gouvernements les plus à droite de l'histoire d'Israël.