PARIS: La préfecture de police de Paris a interdit vendredi cinq rassemblements d'organisations classées à l'extrême droite prévus ce week-end, faisant valoir un risque de troubles à l'ordre public et appliquant la consigne de Gérald Darmanin après la polémique déclenchée par un défilé de militants d'ultradroite.
Parmi les cinq rassemblements interdits, figurent un colloque et une manifestation organisés par le mouvement royaliste Action française, ainsi qu'une marche de l'association de militaires "Place d'armes".
Un rassemblement déclaré par le mouvement "Les nationalistes" d'Yvan Benedetti, une figure de l'extrême droite, qui devait avoir lieu dimanche en hommage à Jeanne d'Arc en même temps que la manifestation de l'Action française, a lui aussi été interdit.
Une sixième manifestation, de "gilets jaunes", qui devait emprunter le même parcours que celle des militaires de "Place d'armes", a également été interdite par le préfet de police.
Ces arrêtés sont la première traduction de l'instruction donnée mardi aux préfets par le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin d'interdire désormais toute manifestation "de l'ultradroite ou de l'extrême droite".
L'instruction du ministre a été prise en réaction à la polémique suscitée par la manifestation samedi dernier à Paris du "Comité du 9-Mai".
Ces militants, habillés de noir et souvent masqués, ont exhibé des drapeaux noirs marqués de la croix celtique. Ils manifestaient pour commémorer le 29e anniversaire de la mort d'un militant d'extrême droite, Sébastien Deyzieu, décédé accidentellement en 1994.
«Contexte tendu»
Dans les arrêtés pris vendredi, le préfet de police Laurent Nuñez justifie l'interdiction notamment par le fait que les rassemblements s'inscrivent dans un "contexte particulièrement tendu" après "la polémique suscitée par la manifestation organisée par le Comité du 9-Mai".
Il pointe aussi le "risque de troubles à l'ordre public", alors que plusieurs de ces manifestations ont suscité des appels à des contre-rassemblements par des organisations "proches de la gauche radicale" et qu'une mobilisation de la "mouvance antifasciste" qui pourrait "tenter de s'en prendre physiquement" aux militants d'ultradroite est possible.
Le préfet fait également mention, dans certains arrêtés, des "risques de heurts" entre les militants d'extrême droite eux-mêmes, rappelant que certains s'étaient déjà battus lors de précédente édition de cet hommage à Jeanne d'Arc.
L'Action française et Yvan Benedetti ont indiqué à l'AFP qu'ils déposaient des recours au tribunal administratif contre les arrêtés.
La décision de Gérald Darmanin a entraîné, elle aussi, une polémique, beaucoup la jugeant juridiquement fragile.
Interrogé mercredi par l'AFP, le professeur de droit public Serge Slama, a ainsi estimé qu'une telle mesure ne pouvait être prise "de manière générale et absolue".
Des "éléments objectifs, pour étayer le risque de trouble à l'ordre public" doivent être produits au "cas par cas", avait-il expliqué.
Le problème est aussi de savoir "ce que c'est que l'ultradroite en France, et ce qu'est une manifestation d'ultradroite", avait-il ajouté.
"J'ai l'impression qu'il y a quand même un déni de sale gueule politique", a dénoncé Yvan Benedetti auprès de l'AFP. "L'année dernière déjà, notre défilé avait été interdit par la préfecture. On avait dû se limiter à un rassemblement statique devant la statue" de Jeanne d'Arc.