WASHINGTON: La Russie a accusé l'Ukraine d'avoir ciblé la résidence du président Vladimir Poutine au Kremlin à l'aide de deux drones, une accusation que Kiev dément.
Dans une des vidéos diffusées par des médias russes sur les réseaux sociaux, on voit un engin exploser dans une gerbe de flammes au sommet - surmonté d'un drapeau russe - de la coupole du Palais du Sénat, l'un des principaux bâtiments dans l'enceinte du Kremlin.
Des faits qui soulèvent plusieurs questions :
Qui a perpétré l'attaque ?
Moscou pointe du doigt Kiev pour ce qu'il considère être "une tentative d'acte terroriste et un attentat contre la vie du président" Vladimir Poutine.
Mais le président ukrainien Volodymyr Zelensky a démenti toute implication de son pays, ajoutant : "Nous défendons nos villages et nos villes".
L'un des conseillers du président ukrainien, Mykhaïlo Podoliak, a accusé Moscou de "mise en scène" pour justifier "une attaque terroriste d'ampleur en Ukraine".
Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a déclaré de son côté prendre "tout ce qui sort du Kremlin avec beaucoup de précaution".
Sergueï Sumlenny, expert des questions sur l'Europe de l'Est, attribue la responsabilité des événements à la Russie.
Il cite la confirmation rapide de l'incident de la part du Kremlin, et la propagation d'images de vidéosurveillance venant de caméras contrôlées par l'État russe comme autant d'indices que la Russie "veut que nous voyions" cet événement.
L'Ukraine pourrait-elle être responsable ?
Si l'auteur de l'attaque demeure inconnu, l'Ukraine a les capacités techniques et technologiques d'opérer des frappes longue distance jusqu'au coeur de la Russie, et l'a déjà fait par le passé.
"Cela pourrait être le (modèle de) drone UJ-22 de l'Ukraine, ou un Mugin-5 de fabrication chinoise, qui a manifestement déjà été utilisé par l'Ukraine", tandis que le drone ukrainien PD-1 est une autre possibilité, avance Samuel Bendett, analyste au programme d'études sur la Russie à l'institut de recherches américain Center for Naval Analyses.
L'UJ-22 "a une longue portée et peut potentiellement atteindre Moscou", mais la question demeure de savoir "d'où les drones ont été lancés pour le moment", indique ce chercheur en systèmes d'armement sans équipage.
M. Bendett insiste qu'un grand flou subsiste autour des faits.
Dominika Kunertova, chercheuse au cercle de réflexion Center for Security Studies de l'École polytechnique fédérale de Zurich, en Suisse, est également de cet avis.
"Étendre la distance (potentielle) de frappe a été l'objectif principal de l'Ukraine en ce qui concerne l'innovation des systèmes (d'armement) sans équipage", explique-t-elle.
Et selon la chercheuse, "l'un des principaux avantages stratégiques d'utiliser un drone" pour de telles attaques est la possibilité de nier en être à l'origine, puisqu'il est difficile "de retracer l'attaque jusqu'à l'Ukraine et ainsi éviter une escalade directe au conflit".
Quel impact ?
En matière de dégâts, l'impact est minime : mercredi, en fin d'après-midi, une correspondante de l'AFP a vu plusieurs personnes s'affairer sur la coupole du Palais du Sénat du Kremlin, sans que des dégâts soient visibles depuis le sol.
Des personnes se promenaient également dans la zone, sans renforcement visible de la présence policière.
Mais une frappe ennemie sur un point névralgique de l'État russe comporterait tout de même "un impact psychologique fort", selon Samuel Bendett.
Elle soulèverait également des questions sur la qualité des défenses antiaériennes russes.
"Des analystes russes ont laissé entendre déjà l'an dernier qu'elles ne pourraient pas protéger l'ensemble du pays et que certaines failles pourraient être exploitées", a expliqué Samuel Bendett, bien qu'il ne soit "pas clair pourquoi ce drone n'a pas été intercepté dans le ciel de Moscou".