PARIS: L'allocution télévisée d'Emmanuel Macron lundi soir a été accueillie partout en France par des concerts de casseroles de manifestants déterminés à montrer qu'ils ne souhaitaient pas l'écouter, parfois suivis de manifestations sauvages émaillées de dégradations, ont constaté des journalistes de l'AFP.
À Paris, plusieurs rassemblements étaient programmés et les manifestants ont commencé peu avant 20H00 à faire du bruit en tapant sur des casseroles ou des poêles à l'aide de cuillers ou d'autres ustensiles. Plusieurs centaines de personnes se sont notamment réunies devant la mairie du 10e arrondissement, a constaté un journaliste de l'AFP.
"A 20H00 Macron va oser nous parler alors qu'il ne nous écoute pas depuis trois mois, c'est pour montrer que ça ne sert à rien de l'écouter", a expliqué, peu avant l'allocution, Bénédicte Delgehier, 57 ans, projectionniste aux Lilas qui a participé à 11 journées de mobilisation sur 12 contre la réforme des retraites. "On est très décidés à ne pas s'arrêter là", assure-t-elle.
Les manifestants arboraient de nombreux drapeaux des partis LFI, NPA, PCF, EELV ou encore de l'organisation Attac ou de la CGT, et scandaient "Macron démission", ou "Paris soulève-toi".
Ce rassemblement a ensuite laissé place à trois manifestations sauvages dans Paris, comptant au total quelque 2 000 manifestants, a indiqué la préfecture, qui avait recensé en fin de soirée 16 feux de poubelles, tous éteints.
«Manif avec une gourde»
Plusieurs autres "casserolades" étaient prévues dans Paris, – où des concerts de ces ustensiles ont également eu lieu aux fenêtres –, et partout en France.
"C'est plutôt convivial", a commenté Jeanne 28 ans, agricultrice, qui manifestait à Rennes en tapant sur sa gourde avec sa clé. "J'ai fait des manifs mais c'est ma première avec une gourde! Je n'ai pas du tout eu envie de l'écouter, je le trouve condescendant", a-t-elle poursuivi à propos du président de la République. "J'écouterai demain ce qu'il a dit, sur France Inter. C'est bien la première fois que je fais une pareille manif, c'est assez parlant je trouve".
Plusieurs centaines de manifestants se sont réunies sur le Vieux-Port de Marseille avant de se diriger vers l'hôtel de ville, certains scandant "Macron démission". Des habitants ont soutenu les manifestants en tapant sur des casseroles sur leur balcon.
À Lyon selon la préfecture, plusieurs incidents se sont produits peu après 21H00 après le rassemblement devant la mairie, d'où plusieurs centaines de manifestants sont partis arpenter les rues du quartier de la Croix-Rousse.
Certains ont forcé une porte de la mairie du 1er arrondissement avant de s'introduire dans le bâtiment et d'en taguer les murs de l'entrée. D'autres ont incendié la devanture du poste de la police municipale de l'arrondissement et dans le même temps, un incendie s’est déclaré au sous-sol d'un immeuble mitoyen. Sur le parcours de cette manifestation sauvage, des jets de projectiles et des tirs de feux d'artifice ont visé les forces de l’ordre qui ont alors répliqué par des tirs de gaz lacrymogène. La préfète de région a réagi en condamnant fermement "ces atteintes aux biens publics" et assuré de son soutien les forces de l'ordre.
À Saint-Etienne, de petits groupes ont continué à déambuler dans le centre-ville après une manifestation d'environ 300 personnes, selon la préfecture, qui a fait état de tags, poubelles incendiées et bris de vitrines, notamment d'une agence bancaire. Des feux de poubelles ont aussi émaillé les déambulations de manifestants à Rennes et Caen, et à Nantes et à Angers, des manifestations non déclarées ont également eu lieu après l'allocution.
À Strasbourg, après le concert de casseroles qui a duré environ une heure dans le centre-ville, quelques centaines de personnes ont improvisé des barricades au milieu des rues à l'aide de conteneurs à poubelles ou d'objets de chantier pour barrer la route à la police, a constaté l'AFP, et les forces de l'ordre ont fait à plusieurs reprises usage de gaz lacrymogènes.
L'ONG altermondialiste Attac, qui avait lancé un appel à des "casserolades" devant les mairies, avait recensé "plus de 300 rassemblements" en France.