Pour les femmes rohingyas du Bangladesh, le ramadan rappelle des souvenirs de la vie au Myanmar

Les Rohingyas, qui sont majoritairement musulmans, sont confrontés à une aggravation de leurs conditions de vie. (Fichier/AFP)
Les Rohingyas, qui sont majoritairement musulmans, sont confrontés à une aggravation de leurs conditions de vie. (Fichier/AFP)
Short Url
Publié le Mercredi 12 avril 2023

Pour les femmes rohingyas du Bangladesh, le ramadan rappelle des souvenirs de la vie au Myanmar

  • Les Rohingyas, majoritairement musulmans, sont confrontés à une aggravation de leurs conditions de vie dans des camps au Bangladesh et traversent un ramadan difficile cette année
  • «Il n’y a aucun respect, aucune dignité pour survivre en tant qu'être humain» dans la vie des réfugiés, confie une femme rohingya à Arab News

DHAKA: Les jours précédant le ramadan, Anwara Begum était d'habitude occupée par les préparatifs du mois sacré. Cela signifiait faire le plein de pois chiches et de nouilles, et  programmer des distributions de nourriture aux orphelins et aux personnes âgées dans son village de l'État de Rakhine, au Myanmar.

Pour cette femme de 50 ans, le mois sacré était autrefois rempli de journées passées à cuisiner aux côtés de sa fille aînée. Elles passaient des heures à préparer différents types de plats pour rompre le jeûne, du riz gluant cuit à la vapeur au pain aux bananes et au dessert au vermicelle.

«J’avais à l’esprit le partage de l'iftar avec d'autres personnes, autant que je le pouvais avec ce que j'avais, et cela me remplissait de satisfaction et de plaisir», raconte Anwara Begum à Arab News. «Cela restera, bien sûr, le meilleur souvenir de ma vie. Se remémorer ces agréables moments me fait en réalité beaucoup de mal et me brise littéralement le cœur.»

Anwara Begum fait partie de ces plus de 740 000 Rohingyas qui ont fui vers le Bangladesh voisin en 2017, à la suite d'une dure répression militaire qui, selon l'ONU, équivaut à un génocide. La vie et le ramadan n'ont jamais été tout à fait les mêmes au cours des cinq années qui se sont écoulées depuis qu'elle a commencé à vivre dans le vaste campement de Cox's Bazar.

«Dès que nous sommes arrivés au camp, tout s'est transformé en problèmes», affirme-t-elle. «Les injustices que nous avons subies au Myanmar nous ont forcés à vivre ici dans la pauvreté, le chômage et l'incertitude.»

Les Rohingyas, qui sont majoritairement musulmans, sont confrontés à une aggravation de leurs conditions de vie, l'aide internationale qu’ils reçoivent ayant diminué depuis 2020. Le Programme alimentaire mondial (PAM) de l’ONU a décidé courant 2023 de réduire leurs rations alimentaires, après que ses appels en faveur des Rohingyas n'ont pas reçu les résultats attendus.

Pour de nombreux Rohingyas, la vie de réfugiés est encore plus difficile lors de ce ramadan. «Le repas que nous mangeons quotidiennement comme iftar dans le camp n'est ni hygiénique ni sain», explique-t-elle. «Ce serait presque un rêve de s'attendre à un délicieux iftar. Il ne nous est même pas possible d'acheter ce dont nous avons besoin pour le mois, car nous recevons maintenant moins d'aide comparativement aux mois précédents.»

Lorsqu'elle vivait au Myanmar, Nosima Khatun cuisinait du luri fira, un pain traditionnel rohingya à base de farine de riz, que sa famille préférait manger avec du bœuf au curry pour l'iftar. «Je voulais rendre ma famille heureuse pendant le mois sacré», confie Nosima Khatun à Arab News. «Pendant le ramadan, j'ai vécu de grands moments de joie et d'épanouissement qui sont irremplaçables.»

Depuis qu'elle est réfugiée au Bangladesh, ces beaux moments sont devenus de lointains souvenirs. «Je suis bloquée dans une situation sans précédent comme un oiseau en cage. La dépendance aux rations alimentaires m'a rendue très démunie», raconte Khatun.

Actuellement, elle ne peut servir que peu de choses pour le repas du shour et l'iftar, comme des pois chiches et des dattes. Le peu qu'elle peut trouver n'est «pas suffisant» pour les quatre membres de sa famille. «Chaque fois que je me souviens de l'ancien temps dans ma patrie, je plonge dans un océan de tristesse, car je ne connaîtrai plus à nouveau ces moments dans ma vie», se désole-t-elle. 

Tasmin Begum, âgée de 35 ans, explique pour sa part que sa vie au Myanmar avait été marquée par les difficultés, son mari ayant été contraint d'effectuer de petits travaux car l'emploi dans le secteur public n’était pas ouvert aux Rohingyas.

Le Myanmar ne reconnaît pas les Rohingyas comme un groupe ethnique autochtone. La plupart des membres de cette communauté longtemps persécutée sont devenus apatrides en vertu de la loi de ce pays de 1982 sur la citoyenneté, et ont été exclus du recensement de 2014.

Bien que les célébrations et les rassemblements dans les lieux publics n'étaient pas faciles même pendant le ramadan, Tasmin Begum essayait d'en tirer le maximum en passant de nombreuses heures dans sa cuisine, pour préparer, entre autres plats, une variété de collations cuites à la vapeur et de gâteaux de riz.

«Après avoir fui au Bangladesh, j'ai commencé à endurer les souffrances de la vie de réfugiée», assure-t-elle. «Maintenant, pendant le ramadan, je ne peux avoir ici que des pois chiches et du riz soufflé.»

Les femmes rohingyas avec lesquelles Arab News s'est entretenu pour cet article ont affirmé qu'elles avaient hâte de rentrer chez elles au Myanmar, craignant de prolonger leur vie comme  réfugiées. Mais comme tant d'autres dans leur communauté, elles veulent que leurs droits soient garantis. «Il y a d'innombrables souffrances dans la vie des réfugiés: aucun respect, aucune dignité pour survivre en tant qu'être humain», soutient Anwara Begum.

Nosima Khatun espère un retour immédiat dans sa patrie, «pour mourir dans la terre du Myanmar». Tasmin Begum a, elle aussi, un souhait similaire. «J'aimerais pouvoir retourner au Myanmar avec nos droits rétablis, car je ne veux pas devenir une réfugiée pour le restant de ma vie», affirme-t-elle. «Je ne veux pas être victime d'un génocide dans ma patrie. La seule chose que je veux, c'est passer le reste de ma vie en paix.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Israël : Netanyahu revient sur son choix pour la direction du Shin Bet

Benjamin Netanyahu, Premier ministre israélien (Photo AFP)
Benjamin Netanyahu, Premier ministre israélien (Photo AFP)
Short Url
  • La nomination de l'amiral Sharvit a été critiquée aux États-Unis par le sénateur républicain Lindsey Graham, proche du président américain Donald Trump. 
  • M. Netanyahu avait annoncé la nomination d'Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet lundi, malgré le gel par la Cour suprême du limogeage du directeur en exercice de l'agence, Ronen Bar.

JERUSALEM : Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a annoncé mardi être revenu sur son choix pour le nouveau directeur de l'Agence de la sécurité intérieure (Shin Bet) après que son candidat a été critiqué à Washington par un influent sénateur.

« Lundi, M. Netanyahu a de nouveau rencontré le vice-amiral [Eli] Sharvit à propos de sa nomination à la tête du Shin Bet », indique un communiqué du Bureau du Premier ministre.

Il l'a « remercié [...] d'avoir répondu à l'appel du devoir, mais l'a informé qu'après plus ample considération, il avait l'intention d'examiner d'autres candidatures », a indiqué un communiqué du bureau de M. Netanyahu.

Ce revirement soudain survient après que la nomination de l'amiral Sharvit a été critiquée aux États-Unis par le sénateur républicain Lindsey Graham, proche du président américain Donald Trump. 

« S'il est vrai que l'Amérique n'a pas de meilleur ami qu'Israël, la nomination d'Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet est plus que problématique », a écrit M. Graham sur X.

« Mon conseil à mes amis israéliens est de changer de cap et d'examiner plus minutieusement le passé de leur candidat », a-t-il ajouté, notant que des « déclarations » de l'amiral Sharvit « sur le président Trump et sa politique créeraient des tensions inutiles à un moment critique ».

M. Netanyahu avait annoncé la nomination d'Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet lundi, malgré le gel par la Cour suprême du limogeage du directeur en exercice de l'agence, Ronen Bar.

La décision de démettre M. Bar de ses fonctions, en qui M. Netanyahu dit ne plus avoir confiance, est fortement critiquée en Israël où les manifestations se multiplient contre le gouvernement et contre ce qui est perçu par ses opposants comme une dérive dictatoriale du Premier ministre.


Ukraine : Poutine « reste ouvert à tout contact » avec Trump, après ses critiques selon le Kremlin

Zelensky, Trump et Poutine (Photo AFP)
Zelensky, Trump et Poutine (Photo AFP)
Short Url
  • « Le président reste ouvert à tout contact avec le président Trump », a indiqué le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.
  • Ce changement de ton a tranché avec la dynamique de rapprochement impulsée par Donald Trump et Vladimir Poutine depuis le retour du premier à la Maison Blanche en janvier.

MOSCOU : Vladimir Poutine « reste ouvert à tout contact » avec son homologue américain Donald Trump, a affirmé lundi le Kremlin, après les critiques du locataire de la Maison Blanche à l'encontre du président russe malgré leur rapprochement entamé depuis plusieurs semaines.

« Le président reste ouvert à tout contact avec le président Trump », a indiqué le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, lors de son briefing quotidien, précisant qu'« aucun » nouvel appel entre les deux dirigeants n'était « prévu pour l'instant ».

Donald Trump a dit à la chaîne américaine NBC être « très énervé, furieux » envers son homologue russe, après que ce dernier eut évoqué l'idée d'une « administration transitoire » en Ukraine, sans son président actuel, Volodymyr Zelensky.

Ce changement de ton a tranché avec la dynamique de rapprochement impulsée par Donald Trump et Vladimir Poutine depuis le retour du premier à la Maison Blanche en janvier.

Ces dernières semaines, Moscou et Washington ont convenu d'une remise à plat de leurs relations bilatérales, très fortement dégradées par des années de tensions, qui ont culminé depuis 2022 avec le déclenchement de l'assaut russe contre l'Ukraine, soutenue par les États-Unis.

Donald Trump, qui souhaite mettre fin au conflit le plus rapidement possible, a également menacé la Russie de nouvelles taxes sur le pétrole russe si aucun accord n'était trouvé.

Or, la manne financière issue de la vente de son or noir est vitale pour Moscou, qui doit financer son offensive en Ukraine, particulièrement coûteuse.

Le président russe Vladimir Poutine a rejeté plus tôt ce mois-ci la proposition de cessez-le-feu inconditionnel de Donald Trump en Ukraine, que Kiev avait pourtant acceptée sous pression américaine.

Lundi, Dmitri Peskov a martelé que la Russie continuait à travailler « tout d'abord sur l'établissement de relations bilatérales et nous travaillons également sur la mise en œuvre de certaines idées liées au règlement ukrainien ».

« Le travail est en cours. Il n'y a pas encore de détails précis. Il s'agit d'un processus qui prend du temps, probablement en raison de la complexité du sujet », a-t-il poursuivi.


Lutte contre l'immigration clandestine : plus de 40 pays réunis à Londres

Des sauveteurs britanniques aident une vingtaine de migrants sur un bateau semi-rigide essayant de traverser la Manche depuis la France (Photo, AFP).
Des sauveteurs britanniques aident une vingtaine de migrants sur un bateau semi-rigide essayant de traverser la Manche depuis la France (Photo, AFP).
Short Url
  • Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, accueille ce lundi à Londres les représentants d'une quarantaine de pays pour un sommet de deux jours dédié à la lutte contre l'immigration illégale.
  • Les trois premiers mois de l'année ont toutefois été marqués par un nouveau record d'arrivées, avec un total de 5 840 personnes ayant traversé la Manche à bord de ces embarcations de fortune.

LONDRES : Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, accueille ce lundi à Londres les représentants d'une quarantaine de pays pour un sommet de deux jours dédié à la lutte contre l'immigration illégale, un dossier prioritaire pour Londres.

Le dirigeant travailliste, qui a pris ses fonctions en juillet dernier, a promis, comme ses prédécesseurs conservateurs, d'endiguer le phénomène des « small boats » (petits bateaux) en luttant contre les réseaux de passeurs.

Les trois premiers mois de l'année ont toutefois été marqués par un nouveau record d'arrivées, avec un total de 5 840 personnes ayant traversé la Manche à bord de ces embarcations de fortune.

Keir Starmer donnera le coup d'envoi de ce « premier grand sommet international organisé au Royaume-Uni pour faire face à l'urgence de l'immigration clandestine », qui se tiendra sous la houlette de la ministre de l'Intérieur Yvette Cooper.

Le ministre français Bruno Retailleau et son homologue allemande Nancy Faeser sont attendus, de même que des représentants du reste de l'Europe, d'Asie, du Moyen-Orient, d'Afrique et d'Amérique du Nord, y compris des États-Unis.

Les discussions porteront sur la collaboration entre les États pour démanteler les réseaux de passeurs de migrants, notamment vers le Royaume-Uni et les pays de l'Union européenne.

« Je ne crois tout simplement pas qu'il soit impossible de s'attaquer à la criminalité organisée liée à l'immigration », a déclaré le dirigeant travailliste dans un communiqué diffusé dimanche par le ministère de l'Intérieur.

- « Consensus mondial » -

« Nous devons combiner nos ressources, partager nos renseignements et nos tactiques, et nous attaquer au problème en amont », doit-il ajouter.

Ce sommet s'inscrit dans le prolongement des discussions que Mme Cooper avait eues en décembre avec ses homologues belge, allemand, français et néerlandais.

Les cinq pays avaient alors signé un plan d'action commun destiné à renforcer la coopération pour lutter contre ces réseaux de passeurs de migrants.

Le sommet de cette semaine réunira des représentants de pays de départ de migrants, comme le Vietnam ou l'Irak, ainsi que de pays de transit, comme ceux des Balkans.

Il réunira également le directeur de la Border Force, l'agence responsable des opérations de contrôle de la frontière au Royaume-Uni, ainsi que des représentants d'Interpol, d'Europol et d'Afripol.

Selon le ministère britannique de l'Intérieur, les ministres discuteront de l'équipement, de l'infrastructure et des faux papiers que les bandes criminelles utilisent pour faire entrer des personnes illégalement.

Ils examineront également le fonctionnement des filières et chercheront à « établir un consensus mondial sur la lutte » contre le recrutement de migrants en ligne.

Les Britanniques souhaitent également voir avec la Chine comment elle peut cesser d'exporter des moteurs et d'autres pièces détachées de petits bateaux utilisés pour les traversées de la Manche.

Keir Starmer est sous pression, face à la montée du parti anti-immigration Reform UK de Nigel Farage, qui a obtenu environ quatre millions de voix lors des élections générales de juillet, un résultat sans précédent pour un parti d'extrême droite.

Le Premier ministre a comparé les passeurs d'immigrés clandestins à des « terroristes ». En réponse, son gouvernement a introduit un projet de loi conférant aux forces de l'ordre des pouvoirs comparables à ceux dont elles disposent en matière de lutte antiterroriste, afin de combattre ces réseaux.

En février, le gouvernement a durci les règles d'acquisition de la nationalité pour la rendre pratiquement impossible à une personne arrivée illégalement au Royaume-Uni.

Il a aussi annoncé des règles plus strictes en matière de droit du travail.

« Fermer les yeux sur le travail illégal fait le jeu des passeurs qui tentent de vendre des places sur des bateaux peu solides et surchargés en promettant un travail et une vie au Royaume-Uni », a déclaré dimanche Mme Cooper, citée dans un communiqué de son ministère.

Au total, plus de 157 770 migrants sont arrivés au Royaume-Uni en traversant la Manche à bord de petites embarcations depuis que le gouvernement a commencé à collecter des données en 2018.