Les relations difficiles entre Rabat et Paris

Le roi du Maroc Mohammed VI (à droite) s'entretient avec le président français Emmanuel Macron (à gauche) après l'inauguration d'une ligne à grande vitesse à la gare de Rabat le 15 novembre 2018. (Photo, AFP)
Le roi du Maroc Mohammed VI (à droite) s'entretient avec le président français Emmanuel Macron (à gauche) après l'inauguration d'une ligne à grande vitesse à la gare de Rabat le 15 novembre 2018. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 29 mars 2023

Les relations difficiles entre Rabat et Paris

  • Dans l’histoire des relations diplomatiques entre les deux pays, on n’avait jamais assisté à un tel feuilleton de contentieux
  • Le roi Mohammed VI a effectué de nombreuses visites officielles dans plusieurs pays africains frères et l’image du royaume chérifien est plus que jamais positive chez les dirigeants du continent

CASABLANCA: La crise entre Rabat et Paris s’enfonce et les perspectives ne s’annoncent pas excellentes. Prévue le premier trimestre 2023, la visite officielle à Rabat du président français, Emmanuel Macron, censée être la première de son actuel mandat, semble annulée, ou reportée. Il est difficile pour le moment de prévoir une date étant donné la tournure que prend cette crise diplomatique. 

Les contentieux entre les deux pays sont multiples. Il y a tout d’abord l’affaire Pegasus, pendant laquelle on a accusé le Maroc d’espionner Macron; la crise des visas, avec une réduction de moitié des visas marocains; la résolution du Parlement européen sur la liberté de la presse au Maroc; le fait qu’on ait refusé l’accès à des officiels marocains au Parlement européen, l’affaire du «Marocgate», où le Maroc a été accusé de corruption; enfin, la question du Sahara et la position très frileuse de la France par rapport à une dizaine de pays européens, comme l’Espagne, qui soutiennent le Maroc, en plus des États-Unis. 

S’ajoute à cela le tropisme de Macron vis-à-vis de l’Algérie, sans oublier la non-nomination d’un ambassadeur du Maroc à Paris. Dans l’histoire des relations diplomatiques entre les deux pays, on n’avait jamais assisté à un tel feuilleton de contentieux. Ce dernier s’est en outre déroulé dans un laps de temps court – environ une année. 

«La crise devient en effet très lourde. Elle a été aggravée par le double discours de la France sur la question du Sahara et le double jeu de Macron, qui veut rester en bons termes avec l’Algérie. Toutes ces affaires et ces attaques contre le Maroc ne présagent rien de bon. Je suis pessimiste par rapport à l’issue de cette crise», commente pour Arab News en français Jawad Kerdoudi, le président de l’Institut marocain des relations internationales (Imri). Il poursuit en ces termes: «Il va falloir du temps pour que les deux pays se remettent de cela. Certains disent qu’il faudra attendre la fin du mandat de Macron, mais je ne vois pas cette crise se poursuivre pendant encore quatre longues années.» 

«La position française était dominante en Afrique subsaharienne, mais elle est aujourd’hui battue en brèche par toutes ces puissances qui investissent massivement en Afrique», souligne Jawad Kerdoudi.

Les intérêts communs sont importants et les enjeux sont stratégiques, notamment sur le continent africain, où le Maroc dispose d’une véritable présence diplomatique et économique, et où la France est en perte de vitesse. «À cause de son déficit d’image sur le continent, particulièrement en Afrique de l’Ouest, la France aura besoin du Maroc. L’Afrique est devenue la convoitise de toutes les puissances – Chine, Turquie, Inde, Russie, Brésil, États-Unis…» 

«La position française était dominante en Afrique subsaharienne, mais elle est aujourd’hui battue en brèche par toutes ces puissances qui investissent massivement en Afrique», souligne Jawad Kerdoudi. Selon lui, le président français «a multiplié les erreurs diplomatiques à l’encontre de certains dirigeants africains et il ne dispose pas de la maturité politique et diplomatique nécessaire pour redorer le blason de la France en Afrique». 

D’où l’intérêt de s’allier au Maroc, un pays qui a réussi à s’imposer, grâce à son soft power, en Afrique. Le roi Mohammed VI a effectué de nombreuses visites officielles dans plusieurs pays africains frères et l’image du royaume chérifien est plus que jamais positive chez les dirigeants du continent. 

Grâce à la main tendue du Maroc, son respect pour la souveraineté des États africains, son soutien et son accompagnement au développement durable et inclusif de plusieurs pays, le Royaume a réussi à se positionner comme l’un des principaux alliés pour pénétrer le marché africain. Les grandes puissances l’ont compris et elles se rapprochent de plus en plus du Maroc. «La France doit revoir ses cartes et apaiser les tensions pour profiter de ce type d’alliances bénéfiques pour elle», précise Kerdoudi.

 


Le ministre saoudien des Affaires étrangères reçoit son homologue iranien à Djeddah

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, s'adresse à l'AFP lors d'une interview au consulat iranien de Jeddah, le 7 mars 2025. (AFP)
Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, s'adresse à l'AFP lors d'une interview au consulat iranien de Jeddah, le 7 mars 2025. (AFP)
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  • M. Araqchi s'est rendu à Djeddah pour rencontrer de hauts responsables saoudiens
  • Cette visite précède d'éventuelles discussions indirectes entre les États-Unis et l'Iran, qui se tiendront dimanche à Oman.

RIYAD : Le ministre saoudien des Affaires étrangères Faisal ben Farhane a reçu samedi son homologue iranien Abbas Araqchi à Djeddah, a rapporté la chaîne d'information Al Arabiya.

M. Araqchi s'est rendu à Djeddah pour rencontrer de hauts responsables saoudiens et discuter des questions bilatérales et des développements régionaux et internationaux.

Il devrait ensuite se rendre au Qatar pour participer au sommet du dialogue Iran-Monde arabe à Doha, a déclaré vendredi un porte-parole du ministère iranien.

Cette visite précède également d'éventuelles discussions indirectes entre les États-Unis et l'Iran, qui auront lieu dimanche à Oman.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Derrière le soutien d'Israël aux druzes, l'objectif d'affaiblir durablement la Syrie

Des religieux druzes assistent aux funérailles de membres de la minorité syrienne qui ont été tués lors de récents affrontements sectaires, dans le village de Salkhad, dans le gouvernorat de Suwayda, au sud du pays, le 3 mai 2025. (AFP)
Des religieux druzes assistent aux funérailles de membres de la minorité syrienne qui ont été tués lors de récents affrontements sectaires, dans le village de Salkhad, dans le gouvernorat de Suwayda, au sud du pays, le 3 mai 2025. (AFP)
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  • L'attachement affiché par Israël à défendre les druzes syriens s'accorde, de l'aveu même de certains de ses dirigeants, avec un but stratégique de long terme: l'affaiblissement de la Syrie
  • Pour le Premier ministre Benjamin Netanyahu, il s'agissait d'adresser un "message clair": Israël ne permettra aucun "déploiement de forces [armées syriennes] au sud de Damas" ni aucune "menace" contre les druzes

Jérusalem, Non défini: L'attachement affiché par Israël à défendre les druzes syriens s'accorde, de l'aveu même de certains de ses dirigeants, avec un but stratégique de long terme: l'affaiblissement de la Syrie.

A la suite de heurts intercommunautaires sanglants dans ce pays, Israël, qui occupe une partie de son territoire depuis 1967, a invoqué la protection de la minorité druze pour justifier plusieurs frappes, dont une le 3 mai à proximité du palais présidentiel à Damas.

Pour le Premier ministre Benjamin Netanyahu, il s'agissait d'adresser un "message clair": Israël ne permettra aucun "déploiement de forces [armées syriennes] au sud de Damas" ni aucune "menace" contre les druzes.

Dès mars, l'Etat hébreu avait menacé d'intervenir si le nouveau pouvoir qui a fait tomber Bachar al-Assad "s'en [prenait] aux druzes".

Toutefois, selon Andreas Krieg, maître de conférences au King's College de Londres, Israël n'est pas mu par "un souci altruiste": il "se sert [des druzes] comme d'un prétexte pour justifier son occupation militaire" en Syrie.

Dans une déclaration révélatrice des intentions d'Israël, le ministre des Finances Bezalel Smotrich a affirmé que son gouvernement ne mettrait pas fin à la guerre déclenchée le 7 octobre 2023 par le mouvement islamiste palestinien Hamas à Gaza avant que "la Syrie [soit] démantelée".

"Pour contenir la situation", le président syrien par intérim, Ahmad al-Chareh, a confirmé mercredi "des discussions indirectes" avec Israël. Interrogée par l'AFP, la diplomatie israélienne n'a pas commenté.

- "Autonomie druze" -

Enferré depuis le 7-Octobre dans une guerre qui a largement débordé des frontières d'Israël, M. Netanyahu répète que son pays se bat pour sa survie et qu'il est déterminé à "changer le Moyen-Orient".

En 2015, alors membre de l'Institut d'études pour la sécurité nationale (INSS), son ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, avait défendu un morcellement de la Syrie en diverses entités ethno-religieuses, prévoyant une "autonomie druze dans le sud".

Le projet rappelle le découpage de la Syrie imposé dans l'Entre-deux-guerres par la France, alors puissance mandataire. Paris avait dû y renoncer sous la pression des nationalistes syriens, y compris druzes.

Grand voisin d'Israël au nord-est, la Syrie a participé à trois guerres israélo-arabes, en 1948-1949, 1967 et 1973.

La dernière a consacré la mainmise d'Israël sur la partie du Golan syrien conquise en 1967 (et annexée depuis 1981).

Dans la foulée de la chute de M. Assad, Israël a pris le contrôle de la zone démilitarisée sous contrôle de l'ONU au Golan et mené des centaines de frappes sur des cibles militaires en Syrie.

Objectif affiché: empêcher que les armes du pouvoir déchu ne tombent entre les mains des nouvelles autorités, issues de la mouvance islamiste, et dans lesquelles le gouvernement israélien voit un ennemi.

Les druzes, adeptes d'une religion syncrétique issue de l'islam chiite, sont présents surtout en Syrie, au Liban et en Israël.

Israël recense quelque 152.000 druzes, selon les dernières données disponibles. Ce chiffre inclut les 24.000 druzes habitant dans la partie annexée du Golan, dont moins de 5% ont la nationalité israélienne.

- Contrer la Turquie -

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), des affrontements avec les forces de sécurité du nouveau pouvoir fin avril ont fait 126 morts dans des zones majoritairement druzes et chrétiennes proches de Damas et dans le bastion druze de Soueïda (sud-ouest).

Après ces heurts, cheikh Hikmat al-Hajri, sommité religieuse druze syrienne, a réclamé l'envoi d'une force de protection internationale, et souscrit à une déclaration communautaire affirmant que les druzes constituent "une partie inaliénable" de la Syrie.

En Israël, des druzes ont participé à plusieurs manifestations réclamant que le gouvernement défende leurs coreligionnaires en Syrie.

Loyaux à Israël, les druzes sont surreprésentés dans l'armée et la police, par rapport à leur importance dans la population.

"Israël se sent redevable vis-à-vis des druzes et de leur engagement exceptionnel dans l'armée", note Efraïm Inbar, chercheur à l'INSS.

Selon lui, les défendre s'inscrit aussi dans la géopolitique recomposée de l'après-Assad où Israël "tente de protéger les minorités druze et kurde de la majorité sunnite et d'éviter que la Turquie n'étende son influence à la Syrie".

A rebours d'Israël, Ankara, aux prises avec son propre problème kurde, soutient les nouvelles autorités de Damas et ne veut surtout pas voir se consolider les positions kurdes dans le nord-est de la Syrie, le long de sa frontière.


Liban: une "série" de frappes israéliennes dans le sud, selon l'agence officielle

Cette photo prise dans la région de Marjeyoun, au sud du Liban, montre la fumée qui s'échappe du site des frappes aériennes israéliennes sur les collines du village de Nabatiyeh, au sud du Liban, le 8 mai 2025. (AFP)
Cette photo prise dans la région de Marjeyoun, au sud du Liban, montre la fumée qui s'échappe du site des frappes aériennes israéliennes sur les collines du village de Nabatiyeh, au sud du Liban, le 8 mai 2025. (AFP)
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  • L'agence de presse officielle libanaise a fait état d'une "série" de frappes israéliennes jeudi dans le sud du Liban, en dépit du cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah

BEYROUTH: L'agence de presse officielle libanaise a fait état d'une "série" de frappes israéliennes jeudi dans le sud du Liban, en dépit du cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah.

"Une série de frappes israéliennes" a visé le secteur de Nabatiyé, à une dizaine de kilomètres de la frontière, a rapporté l'agence Ani.

Des médias locaux ont indiqué que les raids avaient touché des secteurs montagneux éloignés des zones d'habitation.

L'Ani a fait état "d'énormes explosions... ayant résonné dans la plupart des zones de Nabatiyé et du sud", provoquant "terreur et panique" parmi les habitants, qui se sont précipités pour aller chercher leurs enfants à l'école, tandis que des ambulances se dirigeaient vers les zones touchées.

Un photographe de l'AFP a vu de la fumée s'élever des collines de la région.

"On a entendu une forte explosion, environ dix frappes consécutives", a déclaré à l'AFP Jamal Sabbagh, un médecin de 29 ans qui effectuait des examens de santé auprès d'écoliers près de la ville de Nabatiyé.

"Certains enfants ont eu peur et il y avait de la panique, les enseignants étaient aussi effrayés", a-t-il confié.

Mercredi, une frappe israélienne à Saïda, également dans le sud du pays, avait tué un commandant du mouvement islamiste palestinien Hamas, allié du Hezbollah libanais.

Israël est en guerre contre le Hamas depuis que le mouvement palestinien a mené une attaque sans précédent dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, déclenchant une offensive israélienne dévastatrice dans la bande de Gaza.

Le Hezbollah, groupe armé libanais soutenu par l'Iran, avait alors ouvert un front contre Israël en tirant des roquettes à partir du sud du Liban, affirmant agir en soutien aux Palestiniens.

Israël a mené entre septembre et novembre 2024 de violents bombardements sur le Liban, principalement contre les bastions du Hezbollah.

Un cessez-le-feu est entré en vigueur le 27 novembre mais l'armée israélienne mène régulièrement depuis cette date des attaques au Liban, disant viser combattants et infrastructures du Hezbollah, très affaibli par la guerre.

Le Liban presse notamment les Etats-Unis et la France, garants de l'accord de cessez-le-feu, de contraindre Israël à cesser ses attaques et se retirer des cinq positions frontalières dans lesquels il s'est maintenu.

Beyrouth assure respecter ses engagements et accuse Israël de violer le cessez-le-feu.