PARIS: Depuis quelques semaines, l’ambassadeur Patrice Paoli incarne la voix arabe de la diplomatie française dans les médias et sur les réseaux sociaux. Invité des médias arabophones français et étrangers, il s’exprime en arabe sur les sujets qui les intéressent.
Les abonnés de Twitter ont désormais l’occasion de voir Paoli s’exprimer en arabe sur des sujets divers dans de petites vidéos et d’échanger avec lui. Il s’agit d’une grande innovation pour le ministère des Affaires européennes et étrangères, plutôt connu pour son conservatisme.
M. Paoli a pour mission d’exprimer les positions de la France hors des sentiers battus des communiqués de presse et des interventions écrites. Cet ambassadeur polyglotte et fin connaisseur de la politique arabe de la France est en quelque sorte le «communicant 2.0» du Quai d’Orsay. Il a pour mission d’intervenir en arabe sur les plateaux de télévision et les radios arabophones sur des sujets précis qui concernent la politique étrangère de la France.
Ce poste se crée «au fil de l’eau», comme l’affirme Paoli à Arab News en français. «On va voir comment il va évoluer. Ma mission est de voir si ce mode de communication est utile et quelle est sa valeur ajoutée», confie-t-il.
Pourquoi lancer cette initiative en langue arabe à ce moment particulier? Est-ce parce que la France estime que sa politique dans la région n’est pas assez lisible, ou pour pallier un sentiment d’abandon lié aux impératifs de la guerre en Ukraine? Ni l’un ni l’autre, assure M. Paoli. Il existait un besoin, et l’idée «a pris forme à l’automne dernier, lorsque l’on m’a proposé ce poste à mon retour de Cuba».
Le but est d’avoir une communication plus personnalisée, et «de s’exprimer sur les différents sujets dans un langage simple en mettant des mots sur les situations d’une manière différente des communiqués de presse». Il s’agit aussi «de faire partager un peu ce qu’est la France et rompre avec l’image stéréotypée que l’on peut avoir du diplomate».
L’important pour M. Paoli est «de créer plus d’empathie, et peut-être d’humaniser et de donner un visage en complément de la communication institutionnelle». «Moi, je vais bientôt partir à la retraite, alors je m’occupe de définir le poste et de l’établir dans la durée; l’automne prochain, je passerai le relais à quelqu’un d’autre.»
«Un travail passionnant»
Sa mission consiste surtout à être présent sur les réseaux sociaux pour parler de sujets politiques, mais aussi culturels, historiques, et même littéraires et sportifs… Il s’agit «d’un travail passionnant que je mène avec la direction de la communication et de la presse. C’est un complément au travail remarquable de cette direction dans un monde de communication de plus en plus compliqué où il faut aller très vite et tenir compte de tout ce qui se passe», affirme-t-il.
En déplacement privé à Marseille il y a quelques jours, M. Paoli a publié de nombreux Tweets qui mettent en avant la pluralité de cette ville méditerranéenne, cité de brassage culturel et porte d’entrée de la France vers le Sud.
Alors qu’il était en déplacement au Caire pour participer à la réunion des ambassadeurs de France au Moyen-Orient, M. Paoli a montré à travers diverses publications sur Twitter les visites qu’il avait effectuées aux pyramides de Gizeh, ainsi qu’à la mosquée bleue, située au cœur de la capitale égyptienne et récemment rénovée. Il a également livré ses impressions sur son retour dans cette grande capitale arabe après des années d’absence.
Spécialiste du monde arabe, M. Paoli a baigné tout jeune dans la culture arabe au gré des postes occupés par son père, diplomate, puis au gré de sa propre carrière qui l’a mené en Égypte, au Yémen, en Jordanie et au Liban… Il a également été à la tête de la Direction de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient de 2008 à 2012.
Penchant indéfectible pour la langue arabe
Son penchant indéfectible pour l’arabe remonte à l’enfance. Il parle très tôt plusieurs langues étrangères. À l’âge de 4 ans, vivant à Washington, il a été plongé dans un univers exclusivement anglophone. Plus tard, en Libye, il choisit l’allemand et le russe et apprend ces langues par correspondance.
La langue arabe s’est invitée dans sa vie alors qu’il étudiait au lycée français de Tripoli, où l’enseignement de cette langue était obligatoire. Les débuts étaient difficiles, se souvient-il, mais il est parvenu à décrocher un prix en langue arabe tant son admiration pour son père, diplomate et arabisant, était grande. Il rêvait de suivre sa trace.
Promesse tenue: M. Paoli a poursuivi ses études d’arabe classique à l’Institut national des langues et civilisations orientales de Paris, puis en passant le «Concours d’Orient» afin de rejoindre le corps des diplomates. C’est donc avec un grand enthousiasme qu’il a accepté ce nouveau poste, qui consacre une fin de carrière particulièrement harmonieuse. Le premier ouvrage qu’il a lu en langue arabe est Tambo le petit lion, que M. Paroli a d’ailleurs précieusement gardé: le livre trône sur une étagère de son bureau du Quai d’Orsay.