JO-2024: nager dans la Seine, longtemps une chimère, presque une réalité

Des nageurs prennent le départ d’une course dans la Seine lors de la 6e édition du triathlon de Paris, le 6 juillet 2017 (AFP)
Des nageurs prennent le départ d’une course dans la Seine lors de la 6e édition du triathlon de Paris, le 6 juillet 2017 (AFP)
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Publié le Dimanche 12 mars 2023

JO-2024: nager dans la Seine, longtemps une chimère, presque une réalité

  • Etat, Ville de Paris et autres collectivités locales, de tous bords politiques, ont injecté environ 1,4 milliard d'euros dans un «plan baignade» afin de «réaliser ce rêve», selon l'expression de l'actuelle maire Anne Hidalgo
  • Est prévue l'ouverture d'une vingtaine de zones de baignade en Île-de-France dans les années qui suivront les JO-2024

PARIS : Se baigner dans la Seine et la Marne: le vieux «rêve», longtemps raillé par les Parisiens, est en passe de devenir réalité grâce au gros coup d'accélérateur des Jeux olympiques de 2024, même si certains observateurs restent sceptiques.

Formulée en 1990, la promesse de Jacques Chirac, alors maire de Paris, de se baigner «d'ici trois ans» dans la Seine n'a jamais été tenue.

Mais trois décennies plus tard, Etat, Ville de Paris et autres collectivités locales, de tous bords politiques, ont injecté environ 1,4 milliard d'euros dans un «plan baignade» afin de «réaliser ce rêve», selon l'expression de l'actuelle maire Anne Hidalgo.

Disputées entre les Invalides et la Tour Eiffel, les épreuves de natation en eau libre et du triathlon doivent marquer un nouveau départ des relations entre le grand public et le fleuve, interdit à la baignade depuis un siècle (1923). Est prévue l'ouverture d'une vingtaine de zones de baignade en Île-de-France dans les années qui suivront.

Dans Paris même, quatre sites sont à l'étude.

Le nombre et l'emplacement de ces «stations» sera défini «en héritage des Jeux, à l'horizon de la fin 2024», a affirmé Amélie Oudéa-Castéra, la ministre des sports et des JO, fin février en visitant la station de dépollution des eaux pluviales de Champigny-sur-Marne (Val-de-Marne).

Dans cette commune de l'est parisien qui comptait encore une plage noire de monde dans les années 1960, selon une photo d'archives, ce chantier à 45 millions d'euros doit permettre la rétention et le traitement aux ultraviolets avant le rejet dans la Marne des eaux pluviales mélangées aux eaux usées.

- Environ 30.000 mauvais branchements -

Car ces eaux de pluie sont polluées en amont par des mauvais branchements «d'à peu près 30.000 foyers diagnostiqués» dont les eaux usées «vont directement dans la Marne ou la Seine», résume François-Marie Didier, le président du syndicat interdépartemental pour l'assainissement de l'agglomération parisienne (Siaap).

Empêcher que ce cocktail ne souille le fleuve, c'est aussi l'objectif du bassin de stockage d'Austerlitz, construit près de la gare parisienne afin que «les égouts ne débordent pas», résume l'adjoint chargé des JO et de la Seine, Pierre Rabadan.

L'aménagement, pour 264 millions d'euros, du collecteur VL8, dans le sud de l'agglomération parisienne, fait aussi partie des efforts pour renforcer l'assainissement, tout comme le travail de fourmi qui consiste à accompagner les particuliers pour corriger leurs mauvais branchements.

Dans le Val-de-Marne, «on doit être à une bonne moitié» de particuliers désormais bien raccordés, estime le président du département Olivier Capitanio.

La préfecture d'Ile-de-France (Prif), qui chapeaute avec la Ville de Paris le plan baignade, porte l'objectif «d'effacer en 2024 les trois quarts de la pollution» liée aux mauvais branchements.

«Si on atteint cet objectif de 75%, il doit être possible de se baigner dans la Seine», ajoute la Prif.

Basée sur une directive européenne de 2006, la règlementation requiert l'analyse microbiologique de deux bactéries fécales, l'escherichia coli et les entérocoques intestinaux.

«L'été dernier, l'ensemble des prélèvements quotidiens étaient satisfaisants ou excellents 7 jours sur 10. Et ça, c'est avant tous les travaux en cours», souligne Pierre Rabadan, pour qui la proportion est montée à 92% sur la période olympique, entre fin juillet et début août.

L'adjoint n'exclut toutefois pas «des aléas» comme de gros orages qui entraîneraient des rejets d'eaux polluées. Dans ce cas, les organisateurs ont «deux-trois jours de marge» pour décaler les épreuves, indique-t-il.

«Il faut espérer qu'il ne pleuve pas du tout dans les trois jours avant les JO», dit Françoise Lucas, chercheuse en microbiologie à l'université Paris-Est Créteil. Or, l'été 2021 «était très humide», rappelle-t-elle.

- 34 espèces de poissons -

Michel Riottot, président d'honneur de l'association France Nature Environnement (FNE) Île-de-France, est très sceptique vis-à-vis du traitement par acide performique développé à Valenton (Val-de-Marne), l'une des deux stations d'épuration du Siaap en amont de Paris, craignant des «destructions massives dans l'écosystème» si l'acide venait à s'échapper.

Ce traitement est «bien plus efficace que les désinfectants chimiques», répond le Siaap, qui rappelle que «les rejets d'ammonium, principal paramètre de pollution, ont été divisés par 20 depuis 1997».

Résultat, «il y a 34 espèces de poissons dans la Seine et 37 dans la Marne, alors qu'il y en avait 3 dans les années 1990», se félicite son président, François-Marie Didier.

Quant à la leptospire, autre bactérie potentiellement mortelle, «les cas de transmission restent limités» et «il n'y a pas plus de risque dans la Seine qu'ailleurs», estime le Centre national de référence de la leptospirose, basé à l'Institut Pasteur.

«Cela ne devrait donc pas impacter le déroulement des Jeux», conclut le laboratoire.


La question se pose : comment le blé français a-t-il perdu le chemin de l'Algérie ?

Champ de blé (Photo iStock)
Champ de blé (Photo iStock)
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  • Longtemps premier acheteur du blé français, l'Algérie boude désormais les chargements de la céréale du pain exportée par l'ancienne puissance coloniale
  • « l'origine du changement d'approvisionnement de la part de l'Algérie n'est pas politique », estime Edward de Saint-Denis, de la maison de courtage Plantureux & Associés.

PARIS : Longtemps premier acheteur du blé français, l'Algérie boude désormais les chargements de la céréale du pain exportée par l'ancienne puissance coloniale, un désamour antérieur à la récente crise diplomatique entre Paris et Alger, expliquent des acteurs du marché.

Il fut un temps où les courtiers racontaient que « les meuniers algériens écrasaient plus de blé français que les meuniers français », relate Arthur Portier, analyste du marché céréalier chez Argus Media France.

« La France a exporté jusqu'à 5 millions de tonnes de blé tendre par campagne à destination de l'Algérie, soit la moitié de ses exportations hors Union européenne », explique-t-il.

Des échanges importants, nourris par la proximité géographique des deux pays, leurs liens historiques et l'augmentation des besoins alimentaires d'une population algérienne ayant quadruplé depuis l'indépendance.

La France, premier producteur et exportateur européen de blé tendre, y trouvait un débouché naturel. « Il y avait un vieil accord tacite : nous achetions du gaz algérien et l'Algérie du blé français. Ça a bien marché pendant 50 ans », affirme un opérateur actif sur le marché européen.

En 2018, les exportations de blé français vers l'Algérie représentaient plus de 5,4 millions de tonnes ; en 2023, ce chiffre était tombé à moins d'un million de tonnes, selon les données des douanes françaises consultées par l'AFP.

Entre juillet et décembre 2024, seul un bateau transportant 31 500 tonnes de blé tendre a pris la direction de l'Algérie, selon la même source.

Ce tarissement des échanges intervient en pleine crise diplomatique : les tensions entre Paris et Alger se sont brutalement aggravées après la décision, cet été, du président français Emmanuel Macron de reconnaître la « souveraineté marocaine » sur le Sahara occidental — alors qu'Alger soutient les indépendantistes sahraouis du Front Polisario depuis plus d'un demi-siècle.

En octobre dernier, les acteurs français du marché ont même discrètement exprimé leur étonnement de ne pas avoir reçu d'appel d'offres de l'office public algérien des céréales (OAIC), pourtant envoyé à tous les autres acteurs habituels.

Le ministère algérien de l'Agriculture avait alors démenti l'exclusion volontaire d'un de ses « partenaires européens habituels » et évoqué une « consultation restreinte (...) régie par des critères techniques spécifiques », dans un communiqué consulté par l'AFP.

- « Grains punaisés » -

Si, selon toute personne interrogée, la crise actuelle n'arrange pas les choses, « l'origine du changement d'approvisionnement de la part de l'Algérie n'est pas politique », estime Edward de Saint-Denis, de la maison de courtage Plantureux & Associés.

« À un moment donné, la France n'a pas pu servir le marché algérien, qui s'est tourné vers la mer Noire. Les meuniers ont apprécié la qualité des grains russes », explique-t-il.

C'est en effet en 2016, année pluvieuse où la production de blé a chuté de 20 % en France, que l'Algérie a importé pour la première fois de blé russe, selon un acteur européen du marché.

Cette année-là, la Russie, qui a massivement investi dans sa production céréalière, est devenue le premier exportateur mondial de blé. En mars 2024, les céréaliers français réunis à Paris s'inquiètent de voir la Russie « envahir le terrain de jeu des acheteurs de céréales dans le monde et principalement en Afrique », selon l'expression de Jean-François Loiseau, président de l'interprofession.

Les importations algériennes de grains russes, modestes à l'origine, augmentent considérablement à partir de 2022-2023, essentiellement au détriment des blés français, mais aussi allemands ou argentins.

Ce gonflement des achats à la Russie est rendu possible par un changement majeur : l'OAIC a modifié son cahier des charges en 2021, augmentant son taux acceptable de grains punaisés, jusqu'à tolérer 0,5 % de grains endommagés par des insectes contre 0,2 % auparavant, afin de correspondre aux qualités du blé de la mer Noire, explique Edward de Saint-Denis.

L'Algérie s'est donc mise à acheter régulièrement du blé russe, moins cher que le blé français et dont la caractéristique est aussi un taux de protéine plus élevé, ce qui lui confère une qualité de panification appréciée par les meuniers algériens.

Peu dommageable en 2024, car la France a peu à vendre après une récolte de blé médiocre, l'absence d'Algérie sur le marché français risque toutefois de devenir problématique, car cette absence, que les opérateurs espèrent « temporaire », n'est pas compensée par l'augmentation des importations du Maroc ni par la Chine, « actuellement aux abonnés absents », relève Arthur Portier. 


« Attentat terroriste » en France : un mort, le ministre de l'Intérieur blâme l'Algérie sur l'immigration

La police scientifique française travaille sur le site d'une attaque au couteau où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux policiers à Mulhouse, dans l'est de la France, le 22 février 2025. (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
La police scientifique française travaille sur le site d'une attaque au couteau où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux policiers à Mulhouse, dans l'est de la France, le 22 février 2025. (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
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  • dans l'est de la France, un homme de 37 ans, fiché pour risque de « terrorisme », a tué une personne et blessé au moins trois policiers à l'arme blanche.
  • Selon le président Emmanuel Macron, il s'agit d'un « acte de terrorisme », tandis que le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a mis en cause la non-coopération de l'Algérie sur l'immigration.

MULHOUSE, FRANCE : Samedi, dans l'est de la France, un homme de 37 ans, fiché pour risque de « terrorisme », a tué une personne et blessé au moins trois policiers à l'arme blanche. Selon le président Emmanuel Macron, il s'agit d'un « acte de terrorisme », tandis que le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a mis en cause la non-coopération de l'Algérie sur l'immigration.

Selon des témoignages concordants obtenus par l'AFP, l'assaillant a crié « Allah u Akbar » (« Dieu est le plus grand » en arabe) à plusieurs reprises samedi, lors de l'attaque menée dans la ville de Mulhouse, ainsi que lors de son interpellation par les forces de l'ordre.

Selon le parquet de Mulhouse, l'assaillant a agressé les victimes avec un couteau, blessant notamment un Portugais de 69 ans qui est décédé.

Deux policiers municipaux ont été grièvement blessés, l'un à la carotide et l'autre au thorax, a affirmé à l'AFP le procureur de Mulhouse Nicolas Heitz. Si le second a pu sortir de l'hôpital, le premier doit être transféré dimanche au centre hospitalier de Colmar, à environ 40 kilomètres de Mulhouse. Trois autres policiers municipaux auraient été plus légèrement atteints, a précisé le procureur.

En déplacement au Salon de l'agriculture à Paris, Emmanuel Macron a dénoncé un « acte de terrorisme islamiste » qui ne fait pas de doute.

Nicolas Heitz a déclaré que le suspect était inscrit au fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste.

Interrogé sur la chaîne TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et accusé l'Algérie de l'avoir refusé à dix reprises.

« Une fois de plus, c'est le terrorisme islamiste qui a frappé. Et, une fois de plus, j'ajoute que ce sont les désordres migratoires qui sont aussi à l'origine de cet acte terroriste », a-t-il lancé.

Devant l'hôtel de police de Mulhouse, où il a rendu hommage au sang-froid des policiers, M. Retailleau a précisé que le suspect présentait également « un profil schizophrène » et que son acte présentait « une dimension psychiatrique ».

Selon des sources syndicales, le suspect était placé sous contrôle judiciaire avec assignation à résidence.

Les faits se sont déroulés à 15 h 40 (14 h 40 GMT), près d'un marché très animé du quartier populaire.

L'homme a d'abord blessé grièvement des agents de stationnement, puis un sexagénaire portugais, mortellement atteint d'un coup de couteau.

« Nous ne savons pas s'il s'est trouvé par hasard sur son chemin ou s'il a fait un acte de bravoure en s'interposant », a indiqué le ministre.

L'assaillant a ensuite été poursuivi par des policiers municipaux qui sont parvenus à le maîtriser sans faire usage d'armes à feu.

À la nuit tombée, plusieurs membres de la police scientifique s'affairaient encore à la lueur d'un projecteur sur la dalle située à l'extérieur du marché couvert. Le périmètre était gardé par des militaires.

« Le fanatisme a encore frappé et nous sommes en deuil », a réagi le Premier ministre centriste François Bayrou, qui a adressé ses « félicitations aux forces de l'ordre pour leur intervention rapide ».

« L'horreur vient de saisir notre ville », a déploré la maire de Mulhouse, Michèle Lutz, sur Facebook.

En janvier, un homme de 32 ans avait blessé une personne au couteau dans un supermarché d'Apt, dans le sud de la France, en criant « Allah Akbar ». Il a été inculpé et écroué pour tentative d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste.

Fin janvier, le procureur antiterroriste, Olivier Christen, avait souligné que « l'absence d'actes terroristes mortels en France en 2024 ne reflète pas une diminution du risque terroriste », rappelant que neuf attentats ont été déjoués l'an dernier sur le territoire français.


Plusieurs centaines de personnes ont manifesté lors d'un rassemblement antifasciste à Paris

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  • Plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées samedi après-midi à Paris contre le fascisme, après l'agression d'un homme à l'arme blanche devant une association culturelle turque la semaine passée.
  • « Nous sommes là car nous avons été attaqués. Nous sommes là pour montrer que Paris n'est pas à eux. Nous continuerons la lutte antifasciste et révolutionnaire », a lancé au micro un leader de Young Struggle.

PARIS : Plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées samedi après-midi à Paris contre le fascisme, après l'agression d'un homme à l'arme blanche devant une association culturelle turque la semaine passée, pour laquelle six membres de l'ultradroite ont été inculpés, a constaté un journaliste de l'AFP.

« Paris, Paris, Antifa ! », « Pas de quartier pour les fachos, pas de fachos dans nos quartiers », « Nous sommes tous antifascistes », ont scandé les manifestants réunis place de la République. Un drapeau rouge « No pasaran » a été accroché sur un flanc de la statue, au centre de la place emblématique.

Ce rassemblement se tient six jours après l'agression à l'arme blanche d'un homme membre du collectif Young Struggle, qui se présente comme une « organisation de jeunesse socialiste » et adhérent au syndicat CGT. Il avait dû être hospitalisé quelques heures.

Dimanche dernier, « une vingtaine de personnes » appartenant à la mouvance d'ultradroite, « cagoulées et munies de tessons de bouteille » selon la préfecture de police, avaient pénétré dans la cour d'un immeuble où se situe une association culturelle de travailleurs immigrés de Turquie et agressé une personne avant de prendre la fuite.

Six jeunes hommes ont été inculpés pour violences volontaires aggravées. L'un d'eux, qui avait du sang sur ses vêtements et qui a reconnu sa participation, a été incarcéré.

« Nous sommes là car nous avons été attaqués. Nous sommes là pour montrer que Paris n'est pas à eux. Nous continuerons la lutte antifasciste et révolutionnaire », a lancé au micro un leader de Young Struggle, avant de faire siffler le nom de Bruno Retailleau, ministre français de l'Intérieur et connu pour ses positions très conservatrices.

« Partout, l'extrême droite se répand, encouragée par les saluts nazis de Elon Musk et Steve Bannon », a déclaré à sa suite Mathilde Panot, cheffe des députés du parti de gauche radicale LFI (La France Insoumise).

Steve Bannon, ancien conseiller de Donald Trump, a récemment été sous le feu des projecteurs pour un geste qualifié de salut nazi lors de la convention CPAC, la grand-messe des conservateurs américains près de Washington.

Il a brièvement tendu sa main en l'air après avoir déclaré devant les supporters de Donald Trump : « Nous n'allons pas reculer, nous n'allons pas capituler, nous n'allons pas abandonner. Luttez, luttez, luttez ! »

En janvier, le milliardaire Elon Musk, conseiller de Donald Trump, avait lui-même été épinglé pour un geste ambigu analogue.