PARIS: Avec plus de 70.000 bassins livrés en 2022, le marché des piscines privées reste dynamique, mais face à la sécheresse, la demande se concentre sur des produits plus petits et des experts appellent à réfléchir à son besoin avant de se décider à construire.
Le marché s'est tassé "après avoir atteint des niveaux tellement élevés" en 2021 en raison notamment du boom qu'il a connu durant la pandémie de Covid-19 , explique Stéphane Figueroa, président de la Fédération des professionnels de la piscine (FPP).
Avec 70.000 bassins livrés, l'année 2022 accuse une forte baisse par rapport à 2021 (244.000), mais reste bien supérieure à 2019 (55.000).
Au total, avec 3,3 millions d'installations recensées, la France est le premier marché européen de la piscine privée et le deuxième mondial, selon la FPP.
Le marché reste "dynamique", veulent croire les professionnels, mais la sécheresse inédite touchant la France depuis plusieurs semaines, à la suite d'une année 2022 déjà particulièrement pauvre en pluies, peut poser question.
"Il ne faudrait pas que le secteur soit touché par des mesures coercitives" empêchant la construction ou la première mise en eau des bassins, d'autant que la majorité des piscinistes sont des petites ou moyennes entreprises, s'inquiète Stéphane Figueroa.
Tensions sur l'eau
Le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu a appelé, lundi, les préfets à prendre des arrêtés de restriction d'eau "dès maintenant" pour anticiper d'éventuelles situations de crise pendant l'été.
Cinq départements sont déjà en alerte renforcée: l'Ain, l'Isère, les Bouches-du-Rhône, le Var et les Pyrénées-orientales. Un chiffre qui va inévitablement grimper, a-t-il prévenu.
Face à cette situation de plus en plus criante depuis plusieurs années, les particuliers s'adaptent en commandant des bassins "beaucoup plus petits, moins profonds et mieux équipés". Une piscine moyenne demande environ 39 mètres cubes d'eau actuellement, contre une moyenne de 73 m3 dans les années 1980, avec des bassins alors plus volumineux, selon la fédération.
La FPP estime à 15m3 par an et par piscine la consommation en eau, soit 0,01% de la consommation en France. "Et contrairement à une chasse d'eau, les piscines n'ont pas de fuite", souligne sa déléguée générale, Joëlle Pulinx.
Les couvertures à laisser sur la piscine de jour comme de nuit afin de limiter l'évaporation sont également de plus en plus demandées, note-t-elle.
Surtout, "on ne vide pas sa piscine chaque année", insiste Joëlle Pulinx. Certains clients recherchent également la pointe de la technologie avec des pompes automatisées permettant de limiter leur consommation.
Mais malgré ces précautions, et notamment lors de tensions sur l'approvisionnement en eau, le remplissage et l'usage d'une piscine privée suscitent parfois des controverses, quand les prélèvements en eau doivent être fortement limités.
Économie du partage
"Il ne faut pas céder à un phénomène de mode" en l'absence de besoin réel, estime Véronique Benony, chargée de mission au service consommation responsable à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe).
Un particulier souhaitant implanter une piscine dans son jardin doit alors "se poser la question de son besoin" et rester conscient des "conséquences que cela peut engendrer" sur les plans économiques et écologiques, met-elle en garde.
Une solution pour profiter d'une piscine déjà implantée, mais sans créer de nouvelles constructions pourrait être de développer "une économie du partage" de ce bien entre voisins, comme cela a pu se voir durant la pandémie de Covid-19, note Mme Benony.
La possession de ces bassins peut néanmoins avoir l'avantage d'éviter des déplacements pour aller par exemple à la plage ou à la piscine publique, qui contribuent au réchauffement climatique, nuance-t-elle.
Stéphane Figueroa argue lui que les piscines sont aussi des réserves d'eau à disposition des pompiers pour éteindre les incendies.
"Les secteurs les plus [affectés] par la sécheresse sont aussi souvent plus [affectés] par les incendies", relève-t-il.