La France et l’Europe face à un conflit prolongé en Ukraine

Le conflit en Ukraine et autour de l’Ukraine, envenimé depuis 2014, a été au centre des préoccupations diplomatiques de Paris. La France et l’Allemagne ont été les deux principaux partenaires – garants européens des accords de Minsk II (février 2015) – pour trouver une solution politique à la guerre du Donbass. (AFP).
Le conflit en Ukraine et autour de l’Ukraine, envenimé depuis 2014, a été au centre des préoccupations diplomatiques de Paris. La France et l’Allemagne ont été les deux principaux partenaires – garants européens des accords de Minsk II (février 2015) – pour trouver une solution politique à la guerre du Donbass. (AFP).
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Publié le Lundi 27 février 2023

La France et l’Europe face à un conflit prolongé en Ukraine

  • Avec le retour de la guerre sur le vieux continent et les bouleversements mondiaux en cours, la France et l’Europe se trouvent mêlées à une guerre dont l’issue reste incertaine
  • Le défi russe en Ukraine et le retour en force des États-Unis sur la scène européenne bouleversent l’équation stratégique européenne pour longtemps

PARIS: Le monde n’est plus ce qu’il était le 24 février 2022, date du déclenchement de la guerre en Ukraine. Avec le retour de la guerre sur le vieux continent et les bouleversements mondiaux en cours, la France et l’Europe se trouvent mêlées à une guerre dont l’issue reste incertaine. Ainsi, l’Union européenne (UE) doit faire face à un conflit prolongé et à une guerre d’usure de facto. Au fil du temps, la validité des choix stratégiques de la France et de l’UE est mise à rude épreuve.

Les contours de l’engagement français

Le conflit en Ukraine et autour de l’Ukraine, envenimé depuis 2014, a été au centre des préoccupations diplomatiques de Paris. La France et l’Allemagne ont été les deux principaux partenaires – garants européens des accords de Minsk II (février 2015) – pour trouver une solution politique à la guerre du Donbass. Mais Berlin et Paris n’ont pas réussi à démêler le nœud gordien ukrainien. Les raisons de cet échec européen sont multiples et liées à des craintes russes concernant l’élargissement de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (Otan) vers l’Ukraine, et à un soutien ferme accordé par Washington et Londres à une Ukraine émancipée, une situation intolérable pour Moscou.

L’introuvable compromis menait à l’impasse, provoquant l’escalade de 2021-2022, et sans aucun doute la faiblesse politique de l’UE n’a pas aidé Paris et Berlin à appliquer les accords de Minsk. Dans le contexte du «retour de la Russie» et de la résurgence du «problème ukrainien», la relation bilatérale franco-russe fut affectée durant le mandat de François Hollande (2012-2017). En revanche, dès son arrivée à l’Élysée, Emmanuel Macron n’a cessé de déployer des efforts pour améliorer les relations avec son homologue russe. Mais la tentative fut stoppée après «l’invasion russe de l’Ukraine» selon la perception de Paris qui condamnait l’agression d’un pays indépendant en violation du droit international.

Le 7 février 2022, M. Macron se rendait au Kremlin pour proposer un dialogue afin d’éviter la guerre. Mais la décision de Vladimir Poutine de ramener l’Ukraine dans le «giron impérial russe» et le refus par Washington de donner des garanties rassurant Moscou (notamment le non-élargissement de l’Otan aux frontières de la Russie) ont mis le feu aux poudres.

Le 24 février 2022, les dés sont jetés et la guerre éclate, la France et l’Europe sont devant le fait accompli. La fermeté de l’UE contre «la guerre agressive» met en échec le pari russe sur la faiblesse de l’Europe et ses divisions.

La fermeté de l’Union européenne contre «la guerre agressive» met en échec le pari russe sur la faiblesse de l’Europe et ses divisions.

Les contours de l’engagement français se sont dessinés au fur et à mesure de l’évolution de la situation politique et de la situation sur le terrain. Le président français qui tablait sur le maintien du contact avec son homologue russe n’a pas tergiversé dans le soutien à l’Ukraine. Mais Paris constate que la voie des négociations est bloquée et que la partie russe est déterminée dans sa tentative de conquête du territoire ukrainien.

En conduisant l’UE jusqu’à la fin du mois de juin 2022, Emmanuel Macron, aux côtés du chancelier allemand et du Premier ministre polonais, jouait les pivots de l’action européenne solidaire avec Kiev. Cependant, la France, déçue par le non-avènement d’un pôle européen stratégiquement autonome, se trouve impliquée dans l’effort de l’Otan et envoie ses forces en Roumanie pour renforcer le front Est de l’alliance. Concernant la contribution française directe dans l’effort ukrainien de guerre, Paris fournit des armements défensifs et notamment les canons Caesar pour stopper les avancées russes.

Dans le même temps, Paris plaide toujours pour laisser la porte ouverte à une possible négociation avec Moscou au moment opportun. Ce positionnement français (qui craint la rupture de tous les ponts avec la Russie) suscite des réactions mitigées dans les milieux occidentaux en fustigeant le cavalier seul diplomatique de M. Macron. Les propositions du président français en décembre dernier (après une visite à Washington) suggérant des «garanties de sécurité» pour la Russie, ont été rejetées par l’Ukraine et ses alliés occidentaux inconditionnels.

Lors de la conférence de Munich sur la sécurité, Emmanuel Macron a reconnu que «l’heure n’est pas au dialogue», mais à «l’intensification du soutien à l’Ukraine» afin d’aller vers des «négociations crédibles». Face à un conflit prolongé, le président s’aligne sur l’hypothèse d’une «défaite de la Russie» après avoir tenté de conserver des canaux de discussion avec M. Poutine, s’attirant parfois de vives critiques de pays européens. Sur le plan intérieur français, la politique ukrainienne de M. Macron ne rencontre pas un écho unanime compte tenu des répercussions sociales et économiques de la guerre.

Lors de la conférence de Munich sur la sécurité, Emmanuel Macron a reconnu que «l’heure n’est pas au dialogue», mais à «l’intensification du soutien à l’Ukraine» afin d’aller vers des «négociations crédibles».

Les possibles fissures du front européen commun

La guerre en Ukraine a fait basculer l’ordre mondial et fragmenté l’espace mondial (Occident-Sud global). En revanche, cette guerre n’a pas permis de briser l’unité des Occidentaux et de l’UE.

Lors de la conférence de Munich (17-19 février), l’UE a été présentée en force aux côtés de plusieurs dirigeants européens, en affichant un front commun cohérent contre la Russie.

Malgré les aléas et les soubresauts de ce conflit prolongé, l’UE préserve une ligne unie aux côtés de l’Otan, du Royaume-Uni et d’autres pays occidentaux sous le leadership des États-Unis.

Il y a un an, l’événement ukrainien marquait le retour de la guerre de haute intensité en Europe (avec son lot de lourdes pertes humaines et matérielles) qu’on croyait révolue. Ce tournant géopolitique entraîne des changements pour la défense de l’Europe: soutien sans précédent à l’Ukraine; remodelage de la politique de défense de l’Allemagne; demande d’adhésion à l’Otan de la part de la Suède et de la Finlande et discussion d’une défense collégiale dans le cadre de l’UE ou de l’Otan.

Malgré l’unité affichée de l’UE, tout n’est pas idyllique et on constate des différences d’approche politique et militaire entre les pays européens. Le duo franco-allemand perd de sa vigueur et de son rôle moteur au sein de la maison européenne, tandis que le groupe de neuf pays de l’Europe centrale et d’Europe de l’Est, soit la Bulgarie, l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie et la République tchèque (surnommé un jour par un ancien secrétaire américain de la Défense «la jeune et nouvelle Europe», en opposition à la vieille Europe de l’Ouest) devient l’interlocuteur privilégié de Washington et pèse dans l’orientation stratégique de l’Europe.

Ce «schisme» au sein de l’UE est accentué par la guerre en Ukraine entre les partisans d’une Europe souveraine qui n’exclut pas de renouer avec la Russie, et une Europe atlantique coupée de la Russie. Pour le moment, les fissures ne sont pas apparentes. Toutefois, si la guerre d'usure se prolonge et que les économies européennes continuent de souffrir, le front européen commun sera sérieusement mis à l'épreuve.

À moyen terme, les choix stratégiques des acteurs européens seront validés ou invalidés par leurs opinions. En fin de compte, l’UE se classe actuellement parmi les «perdants» dans l’affrontement international débuté en Ukraine (les États-Unis et la Chine en sont les gagnants). Le défi russe en Ukraine et le retour en force des États-Unis sur la scène européenne bouleversent l’équation stratégique européenne pour longtemps.


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.