KIGALI: Un automobiliste rwandais a été reconnu coupable mardi d'avoir tué accidentellement un journaliste critique du pouvoir et a été condamné à verser une amende d'un million de francs rwandais (838 euros).
John Williams Ntwali, 44 ans, rédacteur en chef du journal The Chronicles, est mort le 18 janvier lorsqu'un véhicule a percuté la moto sur laquelle il se trouvait en tant que passager près de la capitale Kigali.
Le conducteur du véhicule, Moise Emmanuel Bagirishya, a "plaidé coupable et s'est excusé pour l'accident", a indiqué le magistrat du tribunal de Kagarama à Kigali, en charge du dossier.
L'audience s'est déroulée à huis clos et n'a été ouverte à la presse que pour la lecture du jugement, en l'absence du prévenu.
Le conducteur "a admis avoir tué Ntwali alors qu'il roulait vite et en état de fatigue", a poursuivi le magistrat qui l'a reconnu coupable "d'homicide involontaire et de coups et blessures non intentionnels".
"Le tribunal le condamne à payer une amende de 500 000 francs rwandais pour chacune des deux qualifications."
Fin janvier, 90 organisations de défense des droits humains, principalement africaines, avaient appelé les autorités rwandaises à "une enquête indépendante, impartiale et efficace" qui s'appuierait sur des "experts internationaux", après la "mort suspecte" du célèbre journaliste.
"Ntwali", comme beaucoup l'appelaient, avait été placé de nombreuses fois en prison au cours de sa carrière - parfois pour quelques heures, parfois plusieurs semaines.
Il avait fondé la chaîne Pax TV sur YouTube, diffusant majoritairement des interviews, en langue kinyarwanda, de voix dissidentes.
Depuis la fin du génocide de 1994, qui a fait au moins 800 000 morts principalement tutsi, le Rwanda est dirigé d'une main de fer par Paul Kagame.
Loué pour les succès de sa politique de développement, le président est également critiqué par les groupes de défense des droits humains pour sa répression de la liberté d'expression.
Le pays est classé au 136e rang sur 180 pays pour la liberté de la presse par Reporters sans Frontières (RSF). "Depuis 1996, huit professionnels ont été tués ou sont portés disparus, et 35 ont été contraints à l'exil", écrit notamment RSF sur son site internet.
Ces dix dernières années, les médias indépendants se sont raréfiés, bloqués par le pouvoir.