Pour le pape, un «pèlerinage de paix» semé d'obstacles au Soudan du Sud

Des motocyclistes passent devant une peinture murale représentant le pape François alors que les préparatifs se poursuivent avant sa visite à Juba, au Soudan du Sud, le 1er février 2023. Le pape François se rendra au Soudan du Sud du 3 au 5 février 2023. (Photo Simon MAINA / AFP )
Des motocyclistes passent devant une peinture murale représentant le pape François alors que les préparatifs se poursuivent avant sa visite à Juba, au Soudan du Sud, le 1er février 2023. Le pape François se rendra au Soudan du Sud du 3 au 5 février 2023. (Photo Simon MAINA / AFP )
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Publié le Jeudi 02 février 2023

Pour le pape, un «pèlerinage de paix» semé d'obstacles au Soudan du Sud

  • Le pape effectue sa première visite dans ce pays d'Afrique de l'Est majoritairement chrétien, qui a obtenu son indépendance en 2011 après des décennies de lutte avec le Soudan, à majorité musulmane
  • Mais l'accession à l'indépendance du plus jeune État de la planète n'a pas apporté la paix et François arrive vendredi pour une visite de trois jours dans un pays dévasté par la violence

JUBA: Le pape François arrive vendredi au Soudan du Sud pour un "pèlerinage de paix" très attendu dans ce pays pieux déchiré par des années de conflit, où les dirigeants sont jusqu'à présent restés sourds aux appels à la réconciliation.

Le pape effectue sa première visite dans ce pays d'Afrique de l'Est majoritairement chrétien, qui a obtenu son indépendance en 2011 après des décennies de lutte avec le Soudan, à majorité musulmane.

Mais l'accession à l'indépendance du plus jeune État de la planète n'a pas apporté la paix et François arrive vendredi pour une visite de trois jours dans un pays dévasté par la violence.

Le pays a plongé en 2013 dans une sanglante guerre civile de cinq ans opposant Salva Kiir et Riek Machar, qui a fait 380.000 morts et des millions de déplacés. Les armées des deux camps sont accusées de crimes de guerre.

En 2019, un an après un accord de paix, le pape avait reçu les deux frères ennemis au Vatican.

Dans un geste qui avait marqué les esprits, il avait embrassé les pieds des deux dirigeants, aujourd'hui au pouvoir dans le cadre d'un gouvernement d'union nationale (avec M. Kiir au poste de président et M. Machar à celui de vice-président).

"Votre peuple aspire aujourd'hui à un avenir meilleur, qui ne peut se concrétiser que par la réconciliation et la paix", avait-il lancé.

Mais quatre ans plus tard, la violence perdure, alimentée par les élites politiques.

"Des gens continuent à être tués, partout dans le pays", souligne Ferenc David Marko, chercheur au groupe de réflexion International Crisis Group.

Avec la violence endémique actuelle, "les choses sont pires qu'elles ne l'étaient au plus fort du conflit", estime-t-il.

«Tournant» espéré

Au Soudan du Sud, la population et la communauté internationale espèrent que la visite du pape de 86 ans pourra redonner de l'élan au processus de paix.

François sera accompagné de Justin Welby, l'archevêque de Canterbury, chef spirituel de l'Eglise anglicane, et de Iain Greenshields, personnalité la plus importante de l'Eglise d'Ecosse.

"Je veux croire que cette visite sera un tournant", affirme le père James Oyet Latansio, secrétaire général du Conseil des églises du Soudan du Sud.

La communauté internationale, qui craint que la fragile et interminable transition du pays ne s'effondre cette année, espère que François aura plus de chance de faire passer le message.

"Il est dans une configuration unique pour, je pense, s'engager avec les dirigeants du pays" pour que celui-ci "connaisse une paix durable", déclarait en janvier lors d'une conférence de presse l'envoyé spécial de l'ONU au Soudan du Sud, Nicholas Haysom.

Selon des observateurs, cette visite permettra également de mettre en lumière le travail difficile effectué par l'Eglise dans des zones sans aucun service gouvernemental et où les humanitaires sont souvent attaqués, voire tués.

Ce déplacement attirera également l'attention sur la situation dans un pays où neuf millions de personnes, soit les trois-quarts de la population, ont besoin d'aide humanitaire.

"Cette visite montrera que tout est possible. Le changement est possible et la transformation est possible", espère le père Latansio.

Autorité morale

Les leaders religieux ont "une crédibilité et une autorité morale énormes" dans ce pays très pieux, souligne John Ashworth, missionnaire à la retraite avec plus de 40 ans d'expérience au Soudan et au Soudan du Sud.

A l'acmé des affrontements pour l'indépendance, l'Eglise a négocié la paix et nourri, protégé et guéri des civils de tous camps en l'absence totale du gouvernement ou d'aide internationale.

"La seule institution qui est restée sur le terrain avec la population a été l'Eglise", rappelle M. Ashworth.

Lorsque la guerre civile a éclaté en 2013, le clergé a de nouveau défendu les civils et dénoncé les crimes.

Des églises recueillant des civils ont été attaquées et des prêtres assassinés, dans un retournement "choquant" contre une sacro-sainte institution, souligne Christopher Tounsel,

professeur agrégé d'histoire à l'université de Washington et spécialiste du christianisme au Soudan du Sud.

Les chefs religieux ont été exclus des pourparlers de paix, réduisant à peau de chagrin leur influence politique et leur possible rôle de médiateur pour la paix.

"L'Eglise a toujours une voix qui est respectée, mais plus autant qu'avant", estime John Ashworth.

Selon des observateurs, Salva Kiir, fervent catholique qui avait été particulièrement ému par le geste du pape au Vatican, est plus susceptible d'être le plus sensible au message du Pape.

Mais le président est aussi engagé dans de grandes manœuvres politiques - cherchant à consolider son pouvoir et écarter de potentiels rivaux alors que les rangs de Riek Machar se divisent - qui interrogent sur la portée de la visite papale.

"Je me demande si la visite du pape François pourra vraiment insuffler un véritable changement", s'interroge Christopher Tounsel, "ou si ce sera juste un voyage plus symbolique".


La Corée du Nord affirme que tout nouveau comité de surveillance des sanctions est voué à l'échec

L'ambassadeur de la Corée du Nord auprès des Nations Unies, Kim Song, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale des Nations Unies après que la Chine et la Russie ont opposé leur veto à de nouvelles sanctions contre la Corée du Nord au Conseil de sécurité de l'ONU, au siège de l'ONU à New York, New York, États-Unis, le 8 juin. , 2022 (Photo, Reuters).
L'ambassadeur de la Corée du Nord auprès des Nations Unies, Kim Song, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale des Nations Unies après que la Chine et la Russie ont opposé leur veto à de nouvelles sanctions contre la Corée du Nord au Conseil de sécurité de l'ONU, au siège de l'ONU à New York, New York, États-Unis, le 8 juin. , 2022 (Photo, Reuters).
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  • La Corée du Nord est soumise depuis 2006 à des sanctions du Conseil de sécurité de l'ONU liées à son programme nucléaire
  • Séoul et Washington affirment que Pyongyang envoie des armes à la Russie, possiblement en échange d'une aide technique

SEOUL: Les efforts visant à mettre en place un nouveau comité d'experts pour surveiller l'application des sanctions internationales visant la Corée du Nord sont voués à l'échec, a déclaré son ambassadeur à l'ONU dans des propos rapportés par un média d'Etat dimanche.

"Les forces hostiles pourraient installer (un) deuxième et (un) troisième comités d'experts à l'avenir mais ils sont tous destinés à connaître l'autodestruction", a lancé l'ambassadeur Kim Song dans un communiqué en langue anglaise diffusé par l'agence de presse officielle KCNA.

En mars, la Russie a mis son veto au Conseil de sécurité de l'ONU à un projet de résolution prolongeant d'un an le mandat du comité d'experts chargé de surveiller l'application des sanctions des Nations Unies visant Pyongyang.

Cette dissolution est un "jugement historique à l'encontre d'une organisation illégale et fomenteuse de complots (...) en vue d'éliminer le droit à l'existence d'un Etat souverain", selon Kim Song.

La Corée du Nord est soumise depuis 2006 à des sanctions du Conseil de sécurité de l'ONU liées à son programme nucléaire, renforcées plusieurs fois en 2016 et 2017. Depuis 2019, la Russie et la Chine, mettant notamment en avant la situation humanitaire en Corée du Nord, réclament l'allègement de ces sanctions, qui n'ont pas de date de fin.

Armes 

N'ayant pas obtenu gain de cause, Moscou a pris pour cible le comité d'experts chargé de surveiller l'application de ces mesures, comité dont les rapports font référence.

Séoul et Washington affirment que Pyongyang envoie des armes à la Russie, possiblement en échange d'une aide technique pour son programme de satellites espions.

Lors d'une visite en Corée du Sud en avril, l'ambassadrice des Etats-Unis à l'ONU, Linda Thomas-Greenfield, a souligné l'importance de garantir l'application des sanctions en Corée du Nord.

D'après l'ambassadrice, Washington travaille avec Séoul, Tokyo et d'autres capitales à trouver "des moyens créatifs" pour reprendre la surveillance des sanctions.

En 2023, la Corée du Nord a conduit un nombre record d'essais de missiles en dépit des sanctions. L'année précédente, Pyongyang a déclaré son statut de puissance nucléaire "irréversible".


Attaque au couteau en Australie, un adolescent de 16 ans «radicalisé» abattu par la police

La police pense que l'adolescent a envoyé des messages à des membres de la communauté musulmane qui ont immédiatement prévenu la police (Photo, AFP).
La police pense que l'adolescent a envoyé des messages à des membres de la communauté musulmane qui ont immédiatement prévenu la police (Photo, AFP).
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  • L'homme «d'âge mûr» blessé par un unique coup de couteau lors de l'attaque se trouve dans un état «grave» mais stable
  • Deux jours après cette attaque dans un centre commercial, un évêque d'une église assyrienne avait également été poignardé

SYDNEY: Un adolescent de 16 ans "radicalisé" et atteint de troubles mentaux a été abattu samedi soir par la police dans la banlieue de Perth, dans l'ouest de l'Australie, après avoir blessé une personne lors d'une attaque au couteau, ont rapporté les autorités dimanche.

L'adolescent, armé d'un couteau, "s'est précipité" sur les forces de l'ordre et a été mortellement touché par le tir d'un agent, a indiqué le Premier ministre de l'Etat d'Australie-Occidentale Roger Cook lors d'une conférence de presse.

"Il y a des indications selon lesquelles il s'était radicalisé en ligne. Mais je tiens à rassurer la population, à ce stade il semble qu'il ait agi seul", a déclaré M. Cook.

La police a reçu un appel samedi soir de la part d'un homme avertissant qu'il allait commettre "des actes de violence" mais sans donner son nom ni sa localisation, a fait part aux journalistes le responsable de la police de l'Etat, Col Blanch.

Quelques minutes plus tard, a-t-il ajouté, la police a reçu un appel d'urgence pour les avertir qu'un "homme avec un couteau courait" au niveau d'un parking de Willetton, dans la banlieue sud de Perth.

L'individu était armé d'un couteau de cuisine de 30 centimètres de long et d'après des images d'une caméra-piéton de la police, l'adolescent a refusé de le poser à terre comme le demandaient les forces de l'ordre, a indiqué M. Blanch.

Les agents ont tiré au moyen de deux pistolets à impulsion électrique mais "aucun des deux n'a eu totalement l'effet escompté", a-t-il relaté.

"L'homme a continué à avancer vers (un agent) muni d'une arme à feu qui a tiré un seul coup et mortellement blessé" l'individu, a raconté le responsable de la police. L'adolescent est décédé à l'hôpital plus tard dans la nuit.

«Radicalisation en ligne»

L'homme "d'âge mûr" blessé par un unique coup de couteau lors de l'attaque se trouve dans un état "grave" mais stable, a dit le responsable policier.

La police pense que l'adolescent a envoyé des messages à des membres de la communauté musulmane qui ont immédiatement prévenu la police, a-t-il expliqué sans divulguer d'informations sur leur contenu.

L'adolescent avait "des problèmes de santé mentale mais aussi des problèmes de radicalisation en ligne", d'après la même source.

Ces dernières années, l'assaillant était suivi dans le cadre d'un programme de lutte contre la violence et l'extrémisme.

"Il ne s'agit pas d'une approche fondée sur la dimension criminelle, c'est un programme visant à aider des individus qui expriment des idéologies préoccupantes pour notre communauté", a expliqué M. Blanch.

Le Premier ministre australien Anthony Albanese a expliqué avoir été tenu au courant des faits par la police et les services de renseignement selon qui il n'y a pas de "menace en cours".

"Nous sommes une nation attachée à la paix et il n'y a pas de place pour l'extrémisme violent en Australie", a écrit M. Albanese sur les réseaux sociaux.

Les crimes violents sont rares en Australie, mais cet incident survient moins d'un mois après une autre attaque au couteau qui a fait six morts dans un centre commercial de Sydney (sud-est).

L'auteur de cette attaque, Joel Cauchi, un homme de 40 ans souffrant de troubles mentaux, avait été abattu par la police. Ses parents ont indiqué que leur fils a été diagnostiqué schizophrène à l'âge de 17 ans, puis qu'il a quitté leur domicile du Queensland (nord-est) et abandonné son traitement.

Deux jours après cette attaque dans un centre commercial, un évêque d'une église assyrienne avait également été poignardé lors d'un sermon diffusé en direct dans une église de Sydney. La victime a survécu à ses blessures. Un adolescent de 16 ans a depuis été inculpé d'"acte terroriste".


Comme un «air de révolution» en Hongrie face au système Orban

Ervin Nagy lors d'un entretien avec l'AFP à Budapest, en Hongrie (Photo, AFP).
Ervin Nagy lors d'un entretien avec l'AFP à Budapest, en Hongrie (Photo, AFP).
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  • Jamais depuis le retour au pouvoir de Viktor Orban en 2010, la Hongrie n'avait connu pareil mouvement de contestation
  • Sans se laisser abattre, Peter Magyar a entamé depuis plusieurs semaines une tournée en province afin d'y récolter des voix

DEBRECEN: Acteur en vue en Hongrie, Ervin Nagy a délaissé les planches et studios de tournage pour battre le pavé. Comme des milliers d'autres, il est saisi par la fièvre Magyar, du nom de ce dissident qui défie Viktor Orban.

Dimanche, il participera à un grand rassemblement dans la ville de Debrecen (est), bastion du parti Fidesz du Premier ministre nationaliste, à un mois des élections européennes.

Depuis l'irruption en février sur la scène politique de Peter Magyar, ex-haut fonctionnaire entré en rébellion, le comédien de 47 ans s'est lancé à ses côtés dans ce combat "pour un renouveau" du pays d'Europe centrale.

Il a même mis à disposition son camion à plateau d'où le tribun s'est adressé à la foule un soir, de manière spontanée.

"Nous n'avions pas le temps de trouver un podium", raconte Ervin Nagy à l'AFP. "Il flottait comme un air de la révolution de 1956", s'enflamme-t-il, en allusion au soulèvement de la Hongrie contre la mainmise soviétique.

«Galvanisés»

Jamais depuis le retour au pouvoir de Viktor Orban en 2010, la Hongrie n'avait connu pareil mouvement de contestation, de l'avis des experts, qui évoquent un défi sans précédent pour le dirigeant.

Après le scandale provoqué par la grâce accordée à un homme condamné dans une affaire de pédocriminalité, Peter Magyar a su capitaliser sur la colère pour drainer des dizaines de milliers de personnes dans les rues de Budapest.

"Apathiques et frustrés" par un pouvoir indéboulonnable, "ils ont été soudainement galvanisés par l'arrivée de cet homme sensé et téméraire", lance l'acteur.

S'il a adhéré par le passé à la cause des enseignants, il n'avait pas d'ambitions politiques jusqu'à ce que Peter Magyar le contacte. "Il m'a convaincu en une heure", se souvient-il.

En trois mois à peine, cette nouvelle figure de l'opposition a évincé les partis existants, avec son discours conservateur pourfendant la corruption qui ruine à ses yeux le pays.

Son mouvement Tisza (Respect et liberté), qui se veut "ni à gauche ni à droite", est désormais crédité de 25% d'intentions de vote auprès des électeurs sûrs de leur choix, selon un récent sondage réalisé par l'institut Median auprès de 1.000 personnes en vue du scrutin européen du 9 juin.

Sa force, pour ses partisans: connaître le système de l'intérieur. Longtemps diplomate à Bruxelles, le charismatique avocat de 43 ans a aussi partagé pendant des années la vie de Judit Varga, ancienne ministre de la Justice, avec laquelle il a eu trois enfants.

«Mini-dictature»

Si Viktor Orban balaie l'arrivée de ce concurrent d'un revers de la main, son parti "se démène pour tuer dans l'oeuf" cette vague de contestation, décrypte pour l'AFP l'analyste Zoltan Lakner.

Des affiches le taxant de "serviteur de Bruxelles" ont fleuri dans le pays, tandis que les journaux pro-gouvernementaux ont publié des dizaines d'articles pour salir sa réputation, d'accusations de violences conjugales - qu'il nie fermement - à des remarques sur ses "lunettes de soleil de femme".

Une nouvelle autorité de surveillance, créée pour prévenir "les interférences étrangères" dans le processus électoral, a également lancé une enquête à son encontre.

"Si Magyar parvient à unir les électeurs de l'opposition", aujourd'hui fragmentée en plusieurs partis sans envergure, il pourrait alors présenter un réel danger pour le pouvoir, estime le politologue.

Même si d'autres jugent le mouvement éphémère et incapable de déstabiliser la solide assise construite par le Premier ministre, qui a progressivement mis au pas les contre-pouvoirs en 14 ans et installé une redoutable propagande selon l'Union européenne, l'ONU et l'OSCE.

Sans se laisser abattre, Peter Magyar a entamé depuis plusieurs semaines une tournée en province afin d'y récolter des voix, son passage à Debrecen lui permettant tester sa popularité.

Sur scène, il sera entouré de plusieurs célébrités hongroises "suffisamment courageuses" pour s'afficher à ses côtés, souligne Ervin Nagy, qui affirme avoir été "placé sur une liste noire" pour avoir osé un jour critiquer un membre du Fidesz.

La Hongrie est devenue "une sorte de mini-dictature", assène-t-il. "Ils ne vous battent pas à mort, mais si vous vous élevez contre les autorités, il y aura des conséquences".