PARIS: Agir sur la 6e et renforcer le lien avec le primaire: Pap Ndiaye a annoncé mercredi de premières mesures pour le collège, "homme malade" du système selon lui, sans lever cependant les interrogations des syndicats enseignants.
Principale annonce : le ministre de l'Education nationale a décidé la création d'une heure hebdomadaire de renforcement ou d'approfondissement en français ou en mathématiques, dès la rentrée, "par petits groupes, selon le niveau des élèves", et assurée "par des professeurs des écoles, qui viennent de l'école élémentaire".
Cela va permettre "un agrafage meilleur entre le primaire et le secondaire, parce qu'on sait que la marche d'entrée en 6e, en particulier pour les élèves les plus tangents, est très difficile", a-t-il indiqué sur BFMTV.
Chaque élève bénéficiera de cette heure hebdomadaire, a souligné le ministère. Elle est notamment inspirée d'un dispositif de "6e tremplin" expérimenté depuis septembre dans plusieurs collèges de l'académie d'Amiens, où des enseignants de primaire vont aider des élèves de 6e en difficulté.
Reste à préciser comment se fera la répartition entre français et mathématiques et si cette heure s'ajoutera ou ou non aux enseignements existants.
M. Ndiaye a aussi annoncé que le dispositif "Devoirs faits", qui permet aux élèves de faire leur travail scolaire au collège, serait rendu obligatoire en 6e. Un collégien sur trois bénéficie de ce dispositif, mis en place en 2017 pour ceux qui le souhaitent, selon des chiffres publiés cet été par le ministère.
Le collège "est la priorité, parce que nous avons des évaluations à l'entrée en 6e qui sont problématiques", a dit mercredi M. Ndiaye, en s'appuyant notamment sur les dernières évaluations nationales en début de 6e.
Selon celles-ci, 27% des élèves n'ont pas le niveau attendu en français et près d'un tiers en mathématiques.
Les performances en orthographe des élèves de fin d'école élémentaire n'ont cessé de chuter, selon une étude menée depuis 1987 par le ministère: le nombre moyen d'erreurs pour la même dictée est passé en 34 ans de 10,7 erreurs à 19,4 en 2021.
Le ministre avait déjà fait part à plusieurs reprises de sa volonté de réformer le collège, "homme malade du système" scolaire avec un niveau "faible", selon ses propres mots en septembre. L'annonce de cette réforme de la 6e, inspirée de l'expérimentation d'Amiens, était attendue depuis novembre.
"Cosmétique"
Ces annonces ont cependant laissé les enseignants dubitatifs.
"Tout ça pour ça", a réagi Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, principal syndicat du secondaire, qualifiant ces mesures de "cosmétiques".
"Pour nous, l'urgence sur la classe de 6e est la diminution des effectifs en classe, qui implique évidemment un recrutement d'enseignants", au lieu de la suppression d'environ 1.500 postes prévue par le budget, dont 500 dans le second degré, ajoute-t-elle.
"Cela reste une mesure superficielle compte tenu des besoins de nos élèves, et on a de gros doutes sur le fait qu'elle soit opérationnelle et soutenable dans la durée", a renchéri Stéphane Crochet, du SE-Unsa.
"On voit mal comment on arriverait à avoir les professeurs volontaires en nombre suffisant", s'interroge aussi Catherine Nave-Bekhti, du Sgen-CFDT. "Dans certains territoires, ça impliquerait des déplacements conséquents pour les professeurs des écoles, et dans d'autres territoires, on est quand même en grand manque" d'enseignants, ajoute-t-elle.
Pour faire face aux difficultés des élèves à leur entrée au collège, Pap Ndiaye a aussi affiché sa volonté de mettre l'accent sur les classes de CM1 et CM2.
Des recommandations pédagogiques seront notamment adressées dès janvier aux enseignants de CM1 et CM2 concernant la pratique régulière de la dictée, la pratique quotidienne de la rédaction ou la régularité du calcul mental.
Des recommandations "vues moult fois depuis longtemps", estime cependant Stéphane Crochet.
Ces annonces devraient aussi être suivies d'autres réflexions pour le collège. Selon le ministère, une concertation sera engagée dans les prochaines semaines avec l'ensemble de la communauté éducative sur les classes de 5e, 4e et 3e, qui pourra "porter sur les modalités d'évaluation".