KABOUL: Une série d'attaques exécutée par Daech contre des étrangers à Kaboul au cours des quatre derniers mois montre les efforts déployés par le groupe pour cibler les intérêts internationaux en Afghanistan, ont déclaré des experts mardi, au lendemain d'une attaque meurtrière contre un hôtel de la capitale afghane.
L'hôtel et le complexe résidentiel gérés par des Chinois dans le centre de Kaboul ont été attaqués pendant plusieurs heures lundi en fin d'après-midi, lorsque trois hommes armés ont pénétré dans le bâtiment à plusieurs étages. Au moins trois assaillants ont été tués et 21 autres personnes ont été blessées, dont deux étrangers.
Mardi matin, une filiale régionale de Daech – connue sous le nom de Province de Khorasan de l'État islamique, ou ISIS-K – a revendiqué l'assaut.
Depuis septembre, le groupe a revendiqué plusieurs attaques similaires visant des diplomates et des civils russes, pakistanais et chinois dans la capitale afghane, alors que le gouvernement dirigé par les talibans tente d’obtenir une reconnaissance internationale.
L'attaque de lundi est survenue au lendemain de la rencontre de l'ambassadeur de Chine, Wang Yu, avec des responsables du ministère des Affaires étrangères. Lors de cette rencontre, Yu a demandé aux talibans la mise en place de mesures supplémentaires pour la sécurité de l'ambassade de Chine. Pékin est l'un des rares gouvernements à maintenir une présence diplomatique active à Kaboul depuis la prise du pouvoir par les talibans en août 2021.
Selon les analystes, ce n'est pas une coïncidence si la présence diplomatique et commerciale de Moscou, d'Islamabad et de Pékin a fait l'objet d'attaques de la part des rivaux des talibans, les trois pays étant considérés comme les plus favorables aux nouveaux dirigeants de l'Afghanistan.
Andreas Krieg, professeur adjoint au département des études de défense du King's College de Londres, a indiqué que la récente série d'attentats mettait en évidence la différence entre les talibans et Daech.
«Cela fait partie des efforts d'ISIS-K en Afghanistan pour rendre l'environnement inhospitalier pour les étrangers de toutes origines», a-t-il déclaré à Arab News.
Alors que les talibans tentent de se rapprocher des autres nations et cherchent à être reconnus, Daech les considère comme «des non-croyants qui vont corrompre les valeurs islamiques traditionnelles de la société afghane», a expliqué Krieg.
Le groupe ne voit aucun intérêt à bâtir des ponts avec ces pays et préfère travailler activement à les expulser d’Afghanistan dès que possible.
Les effets de ces attaques vont bien au-delà de la politique et risquent de provoquer un nouvel effondrement de l’économie afghane déjà en pleine crise.
Une source d'une institution financière de premier plan en Afghanistan a déclaré que les attaques pourraient décourager les investissements étrangers que les Talibans recherchent depuis que les États-Unis et plusieurs organismes internationaux ont imposé des sanctions et des restrictions bancaires à leur gouvernement.
La source, qui a requis l'anonymat parce qu'elle n'est pas autorisée à parler aux médias, a révélé qu'avant l'attaque de lundi, «beaucoup d'avancées avec les talibans sur l'exploitation minière étaient en cours, notamment des paiements qui étaient dus par Pékin».
Les talibans ont compté sur le potentiel des ressources minérales et des pierres précieuses de l'Afghanistan afin de contribuer au redressement de l'économie. Les Chinois, qui possèdent une part dans la plus grande mine de cuivre du pays, Mes Aynak, étaient considérés comme un espoir possible pour donner un coup de pouce financier indispensable.
Mais la source a affirmé que ce progrès pourrait maintenant être perdu, car les hommes d'affaires chinois, dont beaucoup résidaient ou faisaient des affaires dans l'hôtel visé lundi, seront de plus en plus réticents à apporter leur argent et leur personnel en Afghanistan.
Pékin pourrait également suivre la décision de Moscou et réduire sa présence physique dans le pays, ne serait-ce que temporairement, ce qui constituerait un nouveau revers pour les efforts déployés par les talibans de manière à obtenir l'acceptation régionale et la reconnaissance internationale.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com