BERLIN: Après plus de quatre années de détention au Sahel, l'humanitaire allemand Jörg Lange, âgé de 63 ans, a été libéré, a annoncé samedi l'ONG pour laquelle il travaillait, Help.
"Nous sommes très soulagés et reconnaissants que notre collègue Jörg Lange, après plus de quatre ans et demi, puisse retourner auprès de sa famille", écrit la directrice générale de Help, Bianca Kaltschmitt, dans un communiqué punlié à Berlin.
Selon l'hebdomadaire Der Spiegel, s'appuyant sur des "sources sécuritaires", M. Lange "se porte bien, compte tenu des circonstances". Il aurait été rapatrié en Allemagne à bord d'un avion de l'armée, ajoute Der Spiegel.
Interrogé par l'AFP, le gouvernement allemand n'a pas souhaité faire de commentaire.
Vendu à un groupe djihadiste
C'est grâce aux services de renseignement marocains et à leurs contacts avec des groupes djihadistes dans le Sahel, selon le Spiegel, que cette libération a pu avoir lieu.
L'ONG "remercie vivement toutes les personnes qui ont contribué à cette libération ou qui l'ont soutenue, en particulier la cellule de crise du ministère des Affaires étrangères, la police criminelle, ainsi que les autorités et des amis au Mali, au Niger et dans les pays voisins".
Jörg Lange avait été enlevé le 11 avril 2018 dans l'ouest du Niger par des hommes armés à moto près d'Ayorou, dans une région frontalière du Mali en proie à des attaques djihadistes récurrentes. Son chauffeur nigérien avait été libéré peu de temps après.
Selon la presse allemande, Jörg Lange aurait été vendu après son enlèvement au groupe djihadiste "Etat islamique dans le Grand Sahara"(EIGS).
Ses ravisseurs avaient exigé une rançon d'un montant à sept chiffres et envoyé plusieurs vidéos de l'humanitaire, dans lesquelles il appelait le gouvernement allemand à ne pas faire traîner les négociations.
Selon Der Spiegel, Berlin avait envisagé de le faire libérer par une unité d'élite de la Bundeswehr, les forces spéciales de la KSK, mais y avait renoncé en raison des risques trop grands d'une telle opération.
Quatre otages occidentaux
Au moins quatre otages occidentaux sont encore détenus au Sahel, selon un décompte ne recouvrant que les cas rendus publics par leur entourage ou leur gouvernement : le Français Olivier Dubois, enlevé le 5 mai 2021, l'Américain Jeffery Woodke (14 octobre 2016), l'Australien Arthur Kenneth Elliott (15 janvier 2016) et le Roumain Iulian Ghergut (4 avril 2015).
En marge d'une visite à Abidjan, la ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna, a assuré à l'AFP que la France faisait "tout son possible pour permettre la libération" d'Olivier Dubois.
"De bonnes nouvelles du côté du Niger ne veulent pas forcément dire qu'il y aura de bonnes nouvelles du côté du Mali", a toutefois ajouté la ministre, rappelant que le journaliste venait de franchir le cap de 20 mois de privation de liberté après son enlèvement au Mali.
Un autre Allemand, le père Hans-Joachim Lohre, dont on est sans nouvelles depuis fin novembre est largement considéré comme ayant été enlevé, bien qu’aucune revendication n’ait été rapportée.
Ce prêtre catholique devait célébrer la messe dans un quartier de Bamako mais avait disparu dans la soirée, un probable rapt à caractère exceptionnel dans la capitale malienne.
Les violences djihadistes au Sahel ont débuté en 2012 au Mali, faisant des milliers de morts et des millions de déplacés. Elles se sont étendues au Burkina Faso et au Niger voisins et menacent désormais les États du golfe de Guinée.
Cette grave crise sécuritaire entraîne des violences en tous genres, dont les kidnappings sont un des aspects, qu'il s'agisse d'étrangers ou de locaux. Les motivations, idéologiques ou crapuleuses, vont de la demande de rançon à l'acte de représailles en passant par la volonté de marchandage.
La France a achevé en août le retrait de ses troupes qui opéraient au Mali depuis près de dix ans. Mais Paris, qui déploie encore quelque 3.000 militaires au Sahel, s'est donné six mois pour finaliser sa nouvelle stratégie en Afrique.