DOHA: L'Allemagne, géant déchu du football, a quitté le Mondial-2022 jeudi par la petite porte, malgré une victoire 4-2 contre le Costa Rica insuffisante pour lui ouvrir le chemin des huitièmes de finale.
L'adage fameux de Gary Lineker, "le football se joue à 11 contre 11, et à la fin, c'est l'Allemagne qui gagne", appartient désormais définitivement au passé. Et la Mannschaft, qui n'est plus que l'ombre de ses devancières, a beaucoup de souci à se faire à deux ans de son Euro à domicile.
Car même s'ils avaient battu les "Ticos", les Allemands auraient été de toute façon éliminés par la victoire du Japon contre les Espagnols (2-1). Les hommes du sélectionneur Hansi Flick ont en fait perdu leur Mondial dès le premier match, avec leur défaite face aux "Samouraï Blue" (2-1).
Cette élimination est, pour les quadruples champions du monde, un séisme d'une magnitude gigantesque.
Depuis son retour sur la scène internationale en 1954, l'Allemagne avait été la nation la plus régulière en coupe du monde, plus encore que le Brésil: en seize tournois jusqu'en 2014, la Mannschaft a collectionné quatre titres, autant de finales perdues, et encore quatre demi-finales et quatre quarts de finale.
Puis la chute. En 2018 en Russie, avec la première élimination au premier tour d'un Mondial d'après-guerre.
Sur son banc de touche, Hansi Flick est passé jeudi soir par tous les sentiments, comme les supporteurs allemands présents au stade Al Bayt, au fil d'une soirée au scénario incroyable.
Sans surprise, le Costa Rica a d'abord garé l'autobus devant son but, avec l'espoir que les vagues offensives allemandes viendraient s'y briser.
Un but douteux du Japon qui élimine l'Allemagne
À la 51e minute, le Japonais Kaoru Mitoma s'est jeté pour centrer sur Ao Tanaka, qui a marqué. Or, les images et les ralentis de la télévision ne permettent pas d'affirmer que le ballon n'avait pas franchi entièrement les limites du terrain au moment de la dernière passe. L'arbitre sud-africain Victor Gomes a en tout cas accordé le but après visionnage de la VAR.
"De mon point de vue, je crois que le ballon était à moitié dehors, mais je ne pouvais pas bien voir en raison de la vitesse, j’étais juste concentré sur le fait de marquer", a déclaré le buteur, élu homme du match. "Il y a une possibilité que le ballon ait été dehors, mais si ça avait été le cas et qu'il n'y avait pas eu but, je n’aurais pas été déçu, mais à l’arrivée, ça a fait but, donc je suis heureux".
Le sélectionneur espagnol Luis Enrique semblait lui persuadé que le ballon était sorti. "J'ai vu une photo qui doit être truquée ou manipulée, parce que c'est impossible que cette photo soit vraie! J'ai senti qu'il se passait quelque chose de louche quand la VAR mettait autant de temps à se décider... Je n'ai rien à dire", a-t-il réagi.
Le sélectionneur japonais Hajime Moriyasu a affirmé sa confiance dans "une excellente technologie". "Si (le ballon) était vraiment sorti, ça aurait été un six mètres. Mais l’arbitre a jugé qu’elle était encore en jeu, on aurait accepté sa décision quelle qu’elle soit, mais il a décidé qu’elle était en jeu", a-t-il dit.
La loi 9 de l'IFAB précise que le ballon est considéré comme hors du jeu quand "il a entièrement franchi la ligne de but ou la ligne de touche, à terre ou en l’air".
Pas de miracle
Mais les Allemands ont mis le rythme nécessaire. Et après trois occasions franches dès l'entame, Serge Gnabry a trouvé l'ouverture à la 10e minute, de la tête sur un centre de son latéral David Raum (1-0).
Et comme l'Espagne marquait un but une minute plus tard, les Allemands se retrouvaient qualifiés, avec néanmoins encore 75 minutes à jouer.
En première période, l'Allemagne a dominé outrageusement, avec 70% de possession, une équipe des "Ticos" qui n'est quasiment jamais entré dans les 30 mètres de Manuel Neuer.
Mais face à un Costa Rica revenu après la pause avec l'intention de jouer enfin au football, les coéquipiers de Manuel Neuer ont soudain semblé perdre le fil, victimes d'un incompréhensible fébrilité derrière, alors qu'ils avaient le match bien en main.
Yeltsin Tejeda (58e), puis Juan Pablo Vargas qui a contraint Neuer a marquer contre-son-camp (70e) ont puni les Allemands pour prendre l'avantage 2-1, qualifiant ainsi "virtuellement" le Costa Rica quelques minutes.
L'entrée en jeu du buteur Niclas Füllkrug, l'homme qui avait marqué contre l'Espagne, a contribué à remettre les Allemands dans le sens de la marche. Après deux tirs de Musiala sur les montants, Kai Havertz (75e, 85e) a réussi un doublé et redonné l'avantage aux siens. Füllkrug a corsé l'addition (89e).
Scotchés à leurs portables, les supporters allemands n'avaient plus qu'à espérer un miracle, sous la forme d'une égalisation espagnole dans l'autre match. Qui n'est jamais arrivée.
Ce match rentrera aussi dans l'histoire du football pour avoir été le premier en coupe du monde dirigé par une femme: l'arbitre française Stéphanie Frappart a été à peu près invisible toute la soirée, ce qui est sans doute bon signe pour elle.