Les Américains arabes et musulmans renforcent leur présence après les élections de mardi

Le sénateur d'État démocrate Erin Murphy prend la parole au Capitole de l'État à Saint Paul, Minnesota, le 9 novembre 2022, après que les démocrates de cet État ont dépassé les attentes pour ces élections. (Report for America via AP).
Le sénateur d'État démocrate Erin Murphy prend la parole au Capitole de l'État à Saint Paul, Minnesota, le 9 novembre 2022, après que les démocrates de cet État ont dépassé les attentes pour ces élections. (Report for America via AP).
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Publié le Jeudi 10 novembre 2022

Les Américains arabes et musulmans renforcent leur présence après les élections de mardi

  • Les candidats arabes et musulmans du Minnesota, de l'Illinois, de la Louisiane, de l'Iowa, du Michigan, du New Hampshire, de la Floride et de la Californie ont marqué des points
  • Dans l’Illinois, les électeurs ont élu avec 65% des voix le Palestinien musulman Abdelnasser Rashid pour représenter le 21e district de la Chambre des représentants de cet État

CHICAGO: Si les candidats républicains sont loin d'avoir réussi le coup de balai électoral que les dirigeants du Grand Old Party (ou GOP, surnom du Parti républicain, NDLR) avaient prédit mardi, les Américains arabes et musulmans ont accru leur présence électorale dans plusieurs États américains.

Certains d’entre eux, de la Californie au New Hampshire, ont été confrontés à des défis de taille, tandis que d’autres ont perdu.

Voici un aperçu des résultats obtenus par les Arabes et les musulmans lors des élections dans plusieurs États américains clés, sur la base des résultats non officiels publiés par les autorités électorales ou compilés par les principaux médias.

Le Dr Mehmet Oz, populaire animateur de télévision américain et républicain, a échoué dans sa tentative de devenir le premier membre musulman et américain du Sénat en Pennsylvanie; il a perdu de justesse face au démocrate John Fetterman.

Toutefois, les candidats arabes et musulmans du Minnesota, de l'Illinois, de la Louisiane, de l'Iowa, du Michigan, du New Hampshire, de la Floride et de la Californie ont marqué des points.

Au Minnesota, le procureur général Keith Ellison a été réélu avec une courte avance et a pu conserver son titre de seul procureur général musulman du pays face au républicain Jim Schultz. Après le dépouillement de 95% des votes, Ellison s'accroche à une avance étroite, mais significative, de 20 000 voix dans un scrutin qui a attiré plus de 2,5 millions d’électeurs.

«Cette élection a vraiment été difficile. La peur, la division, les publicités mensongères, les millions de dollars qui ont été dépensés simplement pour semer la haine, et la peur: nous avons tout surmonté. Les votes sont encore en cours de dépouillement, mais nous allons gagner cette élection», a déclaré Ellison à ses partisans tôt dans la journée de mercredi, selon le journal Star Tribune.

La collègue d'Ellison au Congrès, la représentante américaine Ilhan Omar, une démocrate somalienne, a été facilement réélue, avec 75,2% des voix, face à la républicaine Cicely Davis, dans le 5e district du Congrès.

La représentante américaine Ilhan Omar s'adresse à la foule lors de la soirée électorale du parti démocrate ouvrier du Minnesota à Saint Paul, Minnesota, après avoir été réélue, le 9 novembre 2022. (AP)

Dans l’Illinois, les électeurs ont élu avec 65% des voix le Palestinien musulman Abdelnasser Rashid pour représenter le 21e district de la Chambre des représentants de cet État. C’est le troisième Arabe qui remporte un poste législatif dans l'Illinois. Il suit les traces de feue Miriam Dweck Balanoff, représentante de l'État et juge du comté de Cook, une Syrienne juive américaine, élue en 1978, et de son fils Clem Balanoff, élu à la Chambre de l'Illinois en 1993.

Rashid a créé la surprise en battant Michael J. Zalewski, l’homme aux sept mandats, représentant d'État sortant, lors des primaires démocrates de l'Illinois, au mois de juin 2022, par 255 voix seulement, dans ce district fortement démocrate. Le père de Zalewski était un ancien conseiller municipal influent de Chicago; ce candidat était donc considéré comme imbattable par les démocrates, puisqu'il siège à l'Assemblée générale de l'Illinois depuis 2008.

Rashid a déclaré à Arab News: «Je suis honoré et privilégié d'avoir la confiance des électeurs du 21e district, qui m'envoient à Springfield pour représenter des familles de travailleurs et de la classe moyenne. Je suis également touché que les Arabes américains de l’ensemble de l'Illinois aient une voix à Springfield, avec quelqu'un qui comprend la communauté et qui se battra pour eux.»

La démocrate et musulmane américano-indienne Nabeela Syed a également remporté un siège à l'Assemblée générale de l'Illinois. Elle a battu son adversaire républicain, Chris Bos, pour représenter le 51e district de la Chambre des représentants de l'Illinois.

 

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Nabeela Syed.

 

Le député libano-américain Darin LaHood, républicain chrétien, a été réélu dans l'Illinois dans le 16e district du Congrès, battant la démocrate Elizabeth Haderlein avec 65% des voix.

«Je m'engage à continuer à défendre ce en quoi les gens de mon district croient», a fait savoir LaHood à ses partisans le soir de l'élection, selon la chaîne de radio WCBU. «Et ce sont de bonnes valeurs conservatrices.»

En Louisiane, le député républicain Garret Graves, dont la mère, Cynthia Sliman, est une Libano-Américaine chrétienne, a été réélu mardi dans le 6e district du Congrès avec 80% des voix; il a battu son rival libertarien, Rufus Craig.

Le démocrate Sami Scheetz, dont la mère Hala est une immigrée syro-américaine, a remporté l'élection et il est devenu le premier législateur d'État arabo-américain de l'Iowa, du 78e district de la Chambre des représentants. Scheetz a battu la républicaine Anne Fairchild avec 67% des suffrages exprimés.

Dans le Michigan, c'est sans surprise que la députée musulmane palestinienne Rashida Tlaib a obtenu son troisième mandat. Sa victoire a été écrasante: elle a remporté 73,7% des suffrages pour représenter le nouveau 12e district du Congrès contre son adversaire républicain, Steven Elliot.

EN BREF

Les musulmans, parmi lesquels de nombreux Américains d'origine arabe, ont été beaucoup plus nombreux à participer aux élections de mardi.

Selon le Conseil des relations américano-islamiques et le Jetpac Resource Center, cent quarante-cinq Américains musulmans participaient à des compétitions électorales dans l'ensemble des États-Unis et vingt-neuf musulmans américains sont parlementaires dans dix-huit États.

Cinq Américains d'origine arabe ont été élus à la plus haute fonction législative du pays en tant que sénateurs américains:

James Abourezk (libanais), qui représente le Dakota du Sud.

George Mitchell (libanais), qui représente le Maine.

James Abdnor (Libanais), qui représente le Dakota du Sud.

Spencer Abraham (Libanais), qui représente le Michigan.

John E. Sununu (libanais et palestinien), qui représente le New Hampshire.

Arabes au Congrès

Vingt-huit Américains d'origine arabe ou moyen-orientale ont occupé un siège au Congrès américain depuis 1959, lorsque George A. Kasem a été élu pour la première fois, représentant la Californie pour un mandat. Six Américains d'origine arabe ou moyen-orientale continuent de siéger à la Chambre des représentants des États-Unis:

Anna Eshoo, Californie, Américaine assyrienne

Darrell Issa, Californie, Américain syro-libanais

Garrett Graves, Louisiane, Libanais

Darin LaHood, Illinois, Libanais

Ilhan Omar, Minnesota, Somalien

Rashida Tlaib, Michigan, Palestinienne

Arabes par population de l'État, 2019*

Californie: 324 000

Michigan: 223 000

New York: 152 000

Texas 124 000

Floride: 112 000

Illinois: 111 000

New Jersey: 108 000

Virginie: 79 482

Ohio: 77 096

Pennsylvanie: 75 821

Massachusetts: 70 683

*Source: données démographiques de l'Institut arabe américain, Statista.com

 

Note: le recensement américain n'inclut pas «arabe» ou «musulman» comme catégorie, mais les Américains peuvent écrire leur ethnicité, leur origine ou leur religion sur leurs formulaires de recensement.

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La représentante démocrate du Michigan, Rashida Tlaib. (Getty Images/AFP)

Des dizaines d'Arabes et de musulmans américains ont concouru pour des postes au niveau de l'État, des comtés et des municipalités dans le Michigan, mais le décompte des votes n’est pas encore terminé.

Le démocrate Sam Baydoun a été réélu à la 13e commission du comté de Wayne avec 64% des voix face à la républicaine Ann F. Clark.

Le démocrate libano-américain Alabas Farhat a remporté la course au poste de représentant de l'État dans le 3e district devant la républicaine Ginger Shearer. Le démocrate sortant, le Yéménite Abraham Aiyash, a été réélu au siège de la 9e circonscription de la State House face à la républicaine Michele Lundgren.

L'Arabo-Américain Dennis Denno, dont les parents sont originaires d'Irak, a remporté un siège vacant au conseil d'administration de l'université d'État du Michigan.

Dans le New Hampshire, le gouverneur républicain libanais et palestinien américain Chris Sununu a été réélu avec 55% des voix contre le démocrate Tom Sherman. 57% des suffrages ont été exprimés. Son père, John Sununu, a été gouverneur et sénateur du New Hampshire et chef de cabinet de l'ancien président George H. W. Bush.

 

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Le gouverneur de l'État du New Hampshire, Chris Sununu, est d'ascendance libanaise et palestinienne. (AP)

Les Arabo-Américains ont obtenu des résultats mitigés en Floride, où le démocrate Charlie Crist, d'origine grecque et libanaise, n’est pas parvenu à détrôner le gouverneur Ron DeSantis, l'un des républicains les plus puissants du pays, qui est considéré comme un candidat possible à la présidence en 2024.

Crist a perdu face à DeSantis avec 40%, soit 3,1 millions des plus de 7,75 millions de voix exprimées lors de l'élection.

En Californie, le républicain syro-libanais Darrell Issa a été facilement réélu dans le nouveau 48e district du Congrès contre le démocrate Stephen Houlahan, avec 60% de suffrages.

Quant à la députée démocrate Anna Eshoo, qui est assyrienne et arménienne, elle devançait Rishi Kumar dans le 16e district du Congrès de Californie avec 58% des voix, dont la moitié seulement avaient été dépouillées mercredi matin. Les Assyriens ont des ancêtres dans l'Empire ottoman ainsi qu’en Irak. Eshoo occupe ce siège depuis 1993.


Nucléaire: le chef de la diplomatie iranienne à Oman pour de nouvelles discussions avec Washington

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  • L'agence de presse iranienne Mehr a diffusé une courte vidéo montrant M. Araghchi descendre d'un appareil officiel iranien à l'aéroport de Mascate
  • M. Araghchi se rendra à Mascate "à la tête d'une délégation composée de diplomates et d'experts techniques" pour mener ces discussions indirectes avec les Etats-Unis, avait auparavant indiqué le porte-parole de son ministère

TEHERAN: Le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas  est arrivé vendredi à Oman pour une troisième session de discussions sur le nucléaire avec les Etats-Unis prévue samedi, Téhéran augurant de "possibles progrès" si Washington fait preuve de "bonne volonté, sérieux et réalisme".

L'agence de presse iranienne Mehr a diffusé une courte vidéo montrant M. Araghchi descendre d'un appareil officiel iranien à l'aéroport de Mascate.

M. Araghchi se rendra à Mascate "à la tête d'une délégation composée de diplomates et d'experts techniques" pour mener ces discussions indirectes avec les Etats-Unis, avait auparavant indiqué le porte-parole de son ministère, Esmaïl Baghaï.

Le département d'Etat américain a annoncé que l'émissaire du président Donald Trump, Steve Witkoff, participerait bien à ces pourparlers, dans la foulée des deux précédents rendez-vous à Mascate le 12 avril et Rome le 19, salués comme de bonnes discussions par Téhéran et Washington.

Ce troisième cycle prévoit une session de pourparlers techniques entre experts sur le programme nucléaire iranien, en complément de la négociation diplomatique principale.

Michael Anton, qui occupe le poste de responsable de la planification politique au sein du département d'Etat américain, dirigera les travaux techniques du côté américain.

L'agence de presse iranienne Tasnim a de son côté rapporté que les discussions techniques seront menées côté iranien par les vice-ministres des Affaires étrangères Kazem Gharibabadi et Majid Takht-Ravanchi.

Vendredi, M. Baghaï a déclaré que "pour que les négociations progressent, il faut une démonstration de bonne volonté, de sérieux et de réalisme de la part de l'autre partie".

Dans une interview jeudi, le ministre iranien des Affaires étrangères a déclaré que Téhéran "aborderait les négociations de samedi avec sérieux, et que si l'autre partie fait également preuve de sérieux, des progrès sont possibles".

Depuis son retour à la Maison Blanche, Donald Trump a relancé sa politique dite de "pression maximale" contre l'Iran, avec qui les Etats-Unis n'ont plus de relations diplomatiques depuis 1980. Il a initié des négociations avec Téhéran, tout en menaçant de bombarder l'Iran en cas d'échec.


Soudan: deux années de guerre et toujours pas d’issue

Les personnes qui ont fui le camp de déplacés de Zamzam après qu'il soit tombé sous le contrôle du RSF, se reposent dans un campement de fortune dans un champ près de la ville de Tawila dans la région du Darfour occidental déchirée par la guerre au Soudan, le 13 avril 2025. (AFP)
Les personnes qui ont fui le camp de déplacés de Zamzam après qu'il soit tombé sous le contrôle du RSF, se reposent dans un campement de fortune dans un champ près de la ville de Tawila dans la région du Darfour occidental déchirée par la guerre au Soudan, le 13 avril 2025. (AFP)
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  • La reprise, le mois dernier, du contrôle de la capitale Khartoum a donné lieu à une petite lueur laissant espérer une issue au conflit
  • Elle a vite été balayée par l’intransigeance des deux parties concernées

PARIS: Depuis le 15 avril 2023, le Soudan est en proie à des affrontements meurtriers entre l’armée soudanaise et les Forces de Soutien Rapide « FSR ».

Le bilan de ces affrontements est très lourd, et s’élève, selon les Nations unies, à plus de 20 mille morts et 14 millions de déplacés.

La reprise, le mois dernier, du contrôle de la capitale Khartoum a donné lieu à une petite lueur laissant espérer une issue au conflit.

Elle a vite été balayée par l’intransigeance des deux parties concernées.

L’armée soudanaise, dirigée par le général Abdel Fatah Al-Burhan, a exigé que les « FSR » déposent leurs armes comme condition préalable à toute négociation.

Malgré leur défaite, les « FSR », menées par le général Mohamed Dagalo, dit Hemedti, n’ont prêté aucune attention à cette proposition.

Elles se sont repliées dans leur province d’origine, le Darfour, située à l’ouest du Soudan, et semblent se préparer à une guerre d’usure.

Selon les informations en provenance du Soudan, elles encerclent la ville d’El-Fasher, capitale de la province.

Si cette ville leur tombe entre les mains, elles contrôleront alors toute la région, ce qui fait dire à certains observateurs que Hemedti pourra, à partir de là, annoncer la formation de son propre gouvernement.

Après avoir été amputé du Sud-Soudan, le pays serait en voie de subir une nouvelle mutilation, puisqu’en février dernier les « FSR » et 24 organisations soudanaises ont signé une charte jetant les bases d’un gouvernement « de paix et d’unité ».

Ce n’est pas l’avis du directeur du Centre d’étude du monde arabe et méditerranéen « EMAM » à Tours, Marc Lavergne, qui doute de cette hypothèse.

Selon lui, « On ne voit pas très bien quel est l’élément qui peut souder ce mouvement », car chacun des groupes qui le constituent « lutte d’abord pour ses objectifs propres ».

Pas de lumière au bout du tunnel

Cette coalition, qui s’est regroupée autour des « FSR », a réussi à agréger beaucoup d’éléments de la société civile, ceux qui ont mené la révolution pacifique depuis avril 2019.

Mais cette coalition est des plus hétéroclites, indique Lavergne, puisqu’il y a en son sein « toutes sortes de formations, de partis politiques ou de groupes qui sont eux-mêmes divisés ».

D’autre part, il souligne l’incapacité des « FSR » à gérer une région, et affirme « que le problème de ces forces, c’est qu’elles sont incapables de gérer ce qu’elles gagnent ».

« Elles l’ont montré dans le désert. Elles l’ont montré dans l’est du Soudan », ajoute-t-il, à « force de tuer, de violer et puis de vivre sur l’habitant parce qu’ils n’ont pas de casernes, ils n’ont pas où loger ».

Pour Lavergne, « elles ne peuvent pas gagner, mais elles peuvent résister », et peuvent, par conséquent, « servir d’idiots utiles aux forces démocratiques. C’est un peu ce que j’imagine ».

Paradoxalement, du côté de l’armée, « il y a quand même cette solidité et cette discipline, qui lui ont permis de gagner du terrain très progressivement », mais « c’est une armée qui possède un pays et non pas un pays qui possède une armée ».

Ce modèle, indique Lavergne, est rejeté par « les démocrates, les intellectuels, et par toutes les forces non armées, qui n’ont pas d’armes, violemment réprimées » pendant « le printemps soudanais ».

La chute de Khartoum, estime-t-il, « c’est aussi la chute de toutes ces catégories de Soudanais modernes, si l’on veut, enfin tournés vers l’Occident, vers les idées de démocratie et de liberté », qui ont fait le choix de se regrouper autour des rebelles du Darfour.

Ce qui surprend ce fin connaisseur du Soudan, « c’est l’incapacité des Soudanais à s’entendre », et c’est pour ça que l’armée prend le pouvoir à chaque fois.

Pour conclure, Lavergne concède à regret qu’il n’y a pas de lumière au bout du tunnel pour l’instant, mais que le Soudan, pays riche en ressources naturelles et minières, pouvait s’éviter de nombreux malheurs.

Il fallait ouvrir des routes, créer des institutions, former les jeunes, développer des industries locales, « des choses à faire qui n’ont pas été faites mais qui ne sont pas compliquées à faire. Mais je pense que c’est un peu tard ».


1985 – Un prince saoudien dans l’espace: une première historique

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  • La une d’Arab News a retracé le parcours du prince Sultan, célébrant ce moment historique que le monde arabe a qualifié de «jour de fierté»
  • Au cours de dix semaines d'entraînement intensif en Arabie saoudite et à la Nasa aux États-Unis, le prince Sultan est passé du statut de pilote de la Royal Saudi Air Force à celui d'astronaute

RIYAD: Le 17 juin 1985, l’Arabie saoudite a marqué l’histoire lorsque la navette spatiale Discovery de la Nasa a décollé de Cap Canaveral, en Floride, pour sa cinquième mission. À son bord se trouvait le premier astronaute arabe, musulman et membre d’une famille royale – un événement symbolisant l’aube d’une nouvelle ère pour l’exploration spatiale dans le monde arabe.

Le prince Sultan ben Salmane, pilote de l'armée de l'air royale saoudienne âgé de 28 ans, a passé sept jours à mener des expériences dans l'espace au sein d'un équipage international composé de sept personnes.

Pendant le voyage de Discovery, le prince, deuxième fils du roi Salmane d'Arabie saoudite, a également surveillé le déploiement d'Arabsat-1B, le deuxième satellite lancé par l'Organisation arabe de communication par satellite, conçu pour stimuler les communications téléphoniques et télévisuelles entre les nations arabes.

Le leadership de l'Arabie saoudite dans le secteur de l'exploration spatiale régionale a commencé à ce moment-là, préparant le terrain pour les progrès remarquables qui ont suivi et qui ont façonné sa vision.

La confiance dans la capacité du Royaume à mener le voyage du monde arabe dans l'espace a été évidente lorsque les États membres de la Ligue arabe ont désigné le prince Sultan comme spécialiste de charge utile pour voyager à bord de la navette spatiale.

Le Royaume a joué un rôle essentiel dans la création par la Ligue arabe de la société de communication par satellite Arabsat. Son premier satellite, Arabsat-1A, a été lancé dans l'espace par une fusée française en février 1985.

Comment nous l'avons écrit

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La une d’Arab News a retracé le parcours du prince Sultan, célébrant ce moment historique que le monde arabe a qualifié de «jour de fierté».

Au cours de dix semaines d'entraînement intensif en Arabie saoudite et à la Nasa aux États-Unis, le prince Sultan est passé du statut de pilote de la Royal Saudi Air Force à celui d'astronaute, prêt pour une mission au cours de laquelle il serait le plus jeune membre de l'équipage.

Il a été accueilli en héros, tant en Arabie saoudite que dans l’ensemble du monde arabe, lorsque la navette spatiale a atterri sans encombre sur la base aérienne d’Edwards, en Californie, à 6 h 11, heure locale, le 24 juin 1985. Cet événement marquant a inspiré une génération d’Arabes à tourner leur regard vers les étoiles.

Sa propre mission dans le secteur spatial était cependant loin d'être terminée. À son retour, le prince a été promu au rang de major de l'armée de l'air royale saoudienne et, lorsque l'Arabie saoudite a décidé d'accélérer ses efforts d'exploration spatiale dans le cadre de Vision 2030, il n'y avait pas de meilleur choix pour présider la Commission spatiale saoudienne lors de sa création en 2018.

Les efforts du prince Sultan pour former une nouvelle génération d'astronautes saoudiens ont rapidement commencé à porter leurs fruits. Et le 21 mai 2023, le Royaume a célébré une nouvelle étape dans son voyage dans l'espace lorsque la première femme astronaute saoudienne et arabe a pris son envol.

Rayyanah Barnawi a été rejointe par Ali Alqarni, le deuxième Saoudien dans l'espace après le prince Sultan, lors de la première mission du programme de vols spatiaux habités de la Commission spatiale saoudienne. Au cours de leur mission de 10 jours à bord de la Station spatiale internationale dans le cadre de la mission Axiom 2, les deux astronautes saoudiens ont mené 11 expériences de recherche en microgravité.

Un mois plus tard, la commission a été rebaptisée Agence spatiale saoudienne par une résolution du Cabinet. Ses objectifs sont de développer les technologies spatiales, de stimuler la diversification économique, de soutenir la recherche et le développement dans le secteur et de former les futures générations d'astronautes saoudiens.

«Ce pays a été construit pour tant de générations, et chaque génération ouvre la voie à la suivante, et crée la plateforme qui lui permettra de passer au niveau supérieur», a déclaré le prince Sultan lors d'un entretien accordé à Arab News en 2019.

En 2020, l'Arabie saoudite a annoncé l'allocation de 2,1 milliards de dollars (1 dollar = 0,88 euro) à son programme spatial dans le cadre des efforts de diversification décrits dans le cadre stratégique Vision 2030 pour le développement national. Deux ans plus tard, le secteur spatial saoudien a généré 400 millions de dollars de revenus, et ce chiffre devrait atteindre 2,2 milliards de dollars d'ici à 2030.

Au-delà de l'Arabie saoudite, le voyage pionnier du prince Sultan dans l'espace a également inspiré d'autres Arabes de la région. Deux ans plus tard, en juillet 1987, le Syrien Mohammed Faris était cosmonaute de recherche pour une mission de huit jours et de trois personnes à bord d'un vaisseau spatial soviétique à destination de la station spatiale Mir. Accompagné de deux cosmonautes soviétiques, il a mené plusieurs expériences de recherche dans les domaines de la médecine spatiale et du traitement des matériaux.

Hazza al-Mansouri, le troisième Arabe dans l'espace, qui est devenu en septembre 2019 le premier astronaute émirati et le premier Arabe à poser le pied sur la Station spatiale internationale, s'est également inspiré du prince Sultan.

«La passion de Hazza al-Mansouri pour l'espace et son désir d'ouvrir la voie aux générations futures pour l'explorer ont été inspirés par la mission du prince Sultan en 1985», a écrit Mohammed Nasser al-Ahbabi, ancien directeur général de l'Agence spatiale des Émirats arabes unis, dans un article publié en 2020 à l'occasion du 45e anniversaire d'Arab News.  

«En tant que jeune élève, le futur astronaute a découvert, dans son manuel solaire, une photo du prince Sultan, premier Arabe dans l’espace – un moment charnière qui allait transformer sa vie.»

En 1988, le président des Émirats arabes unis de l'époque, le cheikh Zayed ben Sultan al-Nahyane, a rencontré le prince Sultan et l'a interrogé sur tous les détails de son voyage dans l'espace.

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De retour dans son pays, le prince Sultan Salman al-Saoud a été accueilli en héros et nommé major de l'armée de l'air royale saoudienne. (Nasa)

«L'expérience du prince Sultan a eu un impact considérable sur les Émirats arabes unis en particulier, un pays qui a fait preuve d'un engagement fort envers l'espace depuis l'époque de son fondateur et premier président, le cheikh Zayed ben Sultan al-Nahyane», a écrit M. Al-Ahbabi.  

«La vision du cheikh Zayed et l'étape historique franchie par le prince Sultan ont servi de tremplin à l'enthousiasme des Émirats arabes unis et de la région pour l'exploration spatiale.»

L'agence spatiale des Émirats arabes unis a signé un accord avec l'Agence spatiale saoudienne en 2020 afin de renforcer la coopération dans les activités spatiales à des fins pacifiques, de renforcer les capacités techniques et scientifiques et d'échanger des connaissances et de l'expertise.

Alors que la région arabe continue de développer ses projets et ses investissements dans le secteur spatial, on se souviendra toujours du rôle joué par le prince saoudien pour rappeler aux jeunes générations qu'il faut viser les étoiles.

Lorsqu'elles verront la Terre depuis l'espace, elles constateront, comme l'a déclaré le prince Sultan à Arab News en 2019, que «votre intérêt et votre passion pour les choses deviennent plus globaux, plus universels».

Sherouk Zakaria est une journaliste d'Arab News basée aux Émirats arabes unis, avec plus d'une décennie d'expérience dans les médias et la communication stratégique.

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com