PARIS: Députés de tout bord et associations ont demandé mercredi à la France, deuxième puissance maritime mondiale, de s'engager en faveur d'un moratoire sur l'exploitation minière des fonds marins, à quelques jours d'une réunion cruciale de l'Autorité internationale des fonds marins (AIFM).
Cette demande, initiée par le député écologiste Nicolas Thierry et soutenue par différentes ONG françaises (Greenpeace, Les Amis de la Terre, Bloom ...) et internationales (Ocean Care, Blue Climate initiative...) doit être relayée dans le cadre d'une résolution, déjà signée par une coalition transpartisane qui sera soumise à un vote de l'Assemblée nationale.
Concrètement, il est demandé de "promouvoir et défendre auprès de l'AIFM un moratoire sur l'exploitation minière marine, d'une durée minimale de 10 ans, jusqu'à ce qu'il ait été démontré, grâce à des études scientifiques indépendantes, que cette activité extractive n'engendre aucune perturbation sur les écosystèmes marins ni aucune perte de biodiversité marine".
Les signataires demandent également que la France vote, lors du Conseil de l'AIFM qui se réunit du 31 octobre au 11 novembre à Kingston (Jamaïque) contre l'adoption du Code minier, cadre réglementaire qui doit donner le feu vert à l'exploitation des fonds marins pour en extraire des minerais (nickel, cobalt, le cuivre ou encore le manganèse) à partir de juillet 2023.
Un premier "permis-test" autorisant la société canadienne TMC à extraire 3 600 tonnes de métaux dans la zone Clarion Clipperton (Pacifique) a déjà été délivré par l'AIFM en septembre dernier.
La France "doit tenir son rang en se faisant leader de la protection des fonds marins", a déclaré Nicolas Thierry mercredi lors d'une conférence de presse, demandant "une pause de précaution".
"Il est temps que le président Macron transforme en actes sa promesse de Lisbonne", a renchéri François Chartier de Greenpeace.
Le 30 juin, le président avait plaidé à la conférence des Nations unies pour les océans pour l'élaboration d'"un cadre légal pour mettre un coup d'arrêt à l'exploitation minière des fonds en haute mer et ne pas autoriser de nouvelles activités qui mettraient en danger les écosystèmes océaniques".
"Ce serait suicidaire et dangereux d'aller exploiter les fonds marins. On ne parle pas d'un petit risque, on joue avec le feu en allant s'attaquer au principal puits de carbone mondial", a averti l'activiste Camille Etienne.
Selon le CNRS, l'océan séquestre près de 30% du CO2 émis par les humains.
"Saccager un endroit de l'océan peut avoir des conséquences sur des dizaines et des dizaines de kilomètres, et perturbera les écosystèmes pendant des décennies", a témoigné Christian Tamburini, océanographe au CNRS, rappelant la "fragilité" de la biodiversité des fonds marins (en dessous de 200 m de profondeur).