SOFIA : Les Bulgares votent dimanche pour la quatrième fois en un an et demi, avec le mince espoir qu'un gouvernement sorte des urnes à l'approche d'un hiver assombri par la flambée des prix et la guerre en Ukraine.
Si la corruption endémique occupait les débats des dernières élections législatives, l'insécurité économique a cette fois dominé la campagne, alors que l'inflation frôle les 20% dans ce pays des Balkans le plus pauvre de l'Union européenne.
A l'ouverture des bureaux de vote à Sofia, Krasimira Velkova, économiste de 64 ans, confiait ses peurs.
"Les gens s'inquiètent de l'inflation, du fait qu'un caddie coûte une fortune. La différence comparé à l'an dernier est vertigineuse", dit-elle. "Comment va-t-on traverser l'hiver, endurer le froid, payer nos factures", s'interroge la sexagénaire.
Dans ce climat anxiogène, l'ex-Premier ministre Boïko Borissov, malmené en 2020 par des manifestations anti-corruption, pourrait tirer son épingle du jeu.
Les instituts d'opinion placent son parti conservateur Gerb en première position, avec 25% des intentions de vote.
«Beaucoup de travail»
Fort de son expérience d'une décennie au pouvoir, le responsable de 63 ans a promis dimanche, en votant dans une école de la banlieue de Sofia, de vaincre "le chaos".
"Il faut des gens qui ont de la bouteille en ces temps troublés. Père Boïko, on peut lui reprocher des choses mais c'est un moindre mal", estime Bogomil Grouev, garagiste de 62 ans.
Une autre électrice, Rada Mintcheva, dit apprécier le fait qu'il sait ménager à la fois les intérêts russes et occidentaux. "La guerre est tout près de chez nous, il vaut mieux ne provoquer personne", explique cette infirmière de 47 ans.
Malgré un retard de neuf points dans les sondages, le rival centriste Kiril Petkov veut croire à la victoire et "continuer le changement", nom de sa formation.
Cet ancien entrepreneur de 42 ans formé à Harvard, qui a débarqué en 2021 sur la scène politique bulgare, a été renversé en juin dernier par une motion de censure, gouvernant sept mois au total.
Dans un entretien à l'AFP, il se félicite de s'être attaqué aux "pratiques de corruption", son cheval de bataille, pour redistribuer l'argent aux plus jeunes et aux retraités mais "il reste beaucoup de travail".
"Le défi consiste à choisir entre une Bulgarie européenne, progressiste et transparente, et un retour aux années de corruption politique", résume-t-il.
"Que ceux partis à l'étranger rentrent au pays!", a-t-il lancé plein d'optimisme après avoir glissé son bulletin dans l'urne, aux côtés de son épouse canadienne.
Les prorusses faiseurs de roi?
Si Kiril Petkov exclut une alliance avec M. Borissov, ce dernier a appelé les autres politiciens "à la raison", se disant ouvert à tous ceux qui défendent "la place de la Bulgarie dans l'UE et l'Otan".
"Je ne crois pas" que le Gerb parvienne à former une coalition, "ils sont trop isolés", commente l'expert Antony Todorov, de la Nouvelle université bulgare.
Pour le politologue Gueorgui Kiriakov, Boïko Borissov pourrait toutefois s'allier avec le parti de la minorité turque MDL.
Législatives en Bulgarie: l'ex-Premier ministre Borissov en tête
Le parti conservateur de l'ex-Premier ministre bulgare Boïko Borissov arrive en tête des législatives dimanche, selon des sondages publiés à la sortie des urnes, mais il pourrait avoir du mal à trouver des partenaires pour gouverner.
Il est crédité d'environ 25% des voix, suivi de la formation de son rival centriste Kiril Petkov qui aurait recueilli quelque 19% des suffrages.
Le comportement de la formation Vazrajdane (Renaissance), ultra-nationaliste et proche du Kremlin, "sera décisif", ajoute-t-il.
Crédité de 11% à 14% des voix, ce mouvement est monté en puissance depuis le lancement de l'offensive russe en Ukraine, dans un pays aux liens historiques, économiques et culturels forts avec Moscou.
Le scrutin se termine à 20H00 (17H00 GMT), heure à laquelle les sondages de sortie des urnes sont attendus.
Dans la capitale, nombreux disaient craindre la poursuite de l'instabilité politique, sans précédent depuis la fin du communisme en 1989.
Ces crises en série bloquent les réformes, freinent la croissance et accélèrent l'exode des jeunes de ce pays qui a déjà perdu un dixième de sa population en une décennie.