PARIS : Le gouvernement français a présenté lundi son projet de budget 2023, première grande épreuve du feu en vue pour le camp du président Emmanuel Macron, désormais réduit à une majorité relative à l'Assemblée nationale.
Les débats pourraient s'annoncer d'autant plus explosifs après la rentrée parlementaire le 3 octobre que l'exécutif envisage d'introduire dans le projet de budget de la Sécurité sociale une réforme des retraites censée entrer en vigueur en 2023.
Pour trancher sur cette option qui divise dans ses rangs, le chef de l'État réunira cette semaine, avec sa Première ministre Elisabeth Borne, les chefs de la majorité et les ministres concernés.
"Avec le président de la République, on décidera d'ici la fin de la semaine" de la manière d'assurer le lancement "à l'été 2023" de cette réforme "prioritaire", a indiqué lundi Mme Borne, confirmant le choix d'un "décalage progressif de l'âge effectif de départ à la retraite".
Elle s'exprimait juste avant un Conseil des ministres portant à la fois sur les projets de budget de l'État et de financement de la Sécurité sociale pour 2023, ainsi qu'un projet de loi sur les énergies renouvelables, qu'Emmanuel Macron entend développer "deux fois plus vite".
Ce dernier texte, censé démontrer la volonté réformatrice de ce début de second quinquennat, ainsi que son ambition écologique, prévoit une accélération des procédures d'enquêtes publiques et de recours, en particulier pour les éoliennes en mer et les panneaux solaires.
Crise énergétique
S'agissant du budget pour 2023, le gouvernement veut relever le défi de protéger les Français d'une inflation au plus haut depuis des décennies tout en contenant les déficits publics.
"La France est à l'euro près", a déclaré le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, prévenant que le gouvernement s'opposerait dans le débat parlementaire à toute nouvelle dépense qui ne soit pas "financée à l'euro près".
"Ce n'est pas un budget de rigueur, ce n'est pas un budget de facilité, c'est un budget responsable et protecteur dans des temps de grandes incertitudes", a commenté Bruno Le Maire.
En raison de la mise en place d'un boulier tarifaire limitant à 15% en début d'année prochaine les hausses des prix réglementés du gaz et de l'électricité, le projet de budget "penche encore un peu trop du côté des énergies fossiles" parce que le gouvernement a choisi de "protéger" les Français de la crise énergétique, a-t-il reconnu.
Dans ce contexte de tensions sur le pouvoir d'achat, de crise énergétique et réforme des retraites, certains syndicats organisent jeudi une journée de grève et de manifestation.
«Volontariste»
Le ministre de l'Economie a défendu sa prévision de croissance pour la France en 2023, fixée à 1% comme "crédible et volontariste", malgré les estimations de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui la situent plutôt à 0,6%, ou le Haut Conseil de finances publiques (HCFP) qui la juge "un peu élevée".
Dans un avis rendu dimanche, cet organisme indépendant placé auprès de la Cour des comptes, juge en outre "peu ambitieuse" et "particulièrement fragile" la trajectoire envisagée pour ramener le déficit de 5% à 2,9% d'ici à 2027.
Au sein du groupe Les Républicains (LR, droite) à l'Assemblée nationale, on critique un gouvernement "très optimiste sur les recettes" alors que "l'augmentation des dépenses se poursuit".
A contrario, pour le président de gauche de la commission des Finances, Eric Coquerel, "les dépenses qui sont prévues par l'Etat cette année sont largement insuffisantes face à la situation écologique et sociale".
La coalition de gauche et l'extrême droite en particulier font pression pour la création d'une taxe sur les "superprofits". Divisé sur la question, le gouvernement espère trouver une issue à l'échelle européenne.
Faute de parvenir à trouver parmi les députés d'opposition, notamment de droite, la quarantaine de voix qui lui manque pour faire approuver son budget, le gouvernement s'attend à devoir recourir à l'article 49.3 de la Constitution qui permet une adoption sans vote.
"Ma méthode c'est le dialogue, la recherche de compromis. En même temps, les Français ne comprendraient pas qu'on soit bloqués", a affirmé la Première ministre. L'article 49.3 est "un des outils qui est à la disposition du gouvernement si on constate une situation de blocage", a-t-elle prévenu.