NATIONS UNIES : "Ne nous résignons pas à la fracture du monde", a lancé mardi Emmanuel Macron à l'ONU en exhortant les dirigeants du monde entier à rejeter "le nouvel ordre" de division que cherche à imposer la Russie "impérialiste" avec la guerre en Ukraine.
Dans un plaidoyer parfois enflammé, tranchant avec le ton posé des discours à l'Assemblée générale des Nations unies, le président français a appelé à inventer de "nouvelles coopérations" pour relever les défis qui se posent au monde, des conflits au dérèglement climatique en passant par les pandémies.
"La situation de notre planète accroît nos exigences", a-t-il déclaré, en souhaitant "un sursaut collectif" pour "bâtir un nouveau contrat entre le nord et le sud".
Cet impératif est rendu d'autant plus urgent par la guerre en Ukraine initiée par la Russie et son président Vladimir Poutine. "Nous avons tous un rôle pour y mettre un terme, car nous en payons tous le prix", a-t-il affirmé.
«Âge des impérialismes»
"Ce à quoi nous assistons depuis le 24 février est un retour à l'âge des impérialismes et des colonies", a martelé Emmanuel Macron. Or "qui est hégémonique aujourd'hui si ce n'est la Russie?".
Le chef de l'État cherche ainsi à démonter l'idée que la guerre en Ukraine est un conflit régional résultant de l'opposition entre les Occidentaux et la Russie et, au-delà, le reste du monde. De ce fait, de nombreuses capitales, en Afrique, en Asie ou au Moyen-Orient, refusent de condamner Moscou.
"L'impérialisme contemporain n'est pas européen ou occidental et prend la forme d'une invasion territoriale adossée à une guerre hybride mondialisée qui utilise le prix de l'énergie, la sécurité alimentaire, la sûreté nucléaire, l'accès à l'information et les mouvements de population comme des armes de division et de destruction", a dénoncé Emmanuel Macron.
«Cynisme»
Face à cela, les pays "qui se taisent aujourd'hui servent malgré eux, ou secrètement, avec une certaine complicité, la cause d'un nouvel impérialisme, d'un cynisme contemporain qui désagrège notre ordre international sans lequel la paix n'est possible", selon lui.
A plus long terme, Emmanuel Macron prévient que cette "tentative de partition du monde (...) renforce la tension entre les États-Unis et la Chine", notamment dans la zone indo-pacifique, l'une des priorités stratégiques de la France.
Ces derniers mois, le président français a régulièrement tancé les pays restés neutres, notamment lors d'une visite en juillet au Cameroun où il avait dénoncé le silence face à la "présence hybride" de la Russie en Afrique, notamment au Mali.
Il devait de nouveau porter ce message au cours d'un dîner auquel étaient conviés mardi à New York les présidents ivoirien, colombien, argentin et des ministres indien, indonésien ou égyptien.
Intervenant à l'ONU, le président sénégalais Macky Sall a affirmé que l'Afrique avait "assez subi le fardeau de l'Histoire" et ne voulait pas être "le foyer d'une nouvelle Guerre froide" entre la Russie et les pays occidentaux.
Absent à New York, Vladimir Poutine a par ailleurs de nouveau accusé mardi l'UE de bloquer, avec ses sanctions, le don de 300.000 tonnes d'engrais russes aux pays qui en ont le plus besoin. "Le comble du cynisme", a-t-il dénoncé en recevant des diplomates à Moscou.
L'UE a affirmé à plusieurs reprises que ses sanctions ne concernaient ni les engrais ni les céréales russes.
De son côté, Emmanuel Macron a de nouveau défendu le programme Farm, "qui permet d'approvisionner les pays vulnérables à bas prix", et annoncé que la France allait financer "l'évacuation du blé ukrainien à destination de la Somalie", dont une partie de la population souffre de famine, en soutien au Programme alimentaire mondial (PAM).