EREVAN : Le bilan des violents affrontements à la frontière entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan est monté jeudi à plus de 170 morts, cette escalade inédite depuis 2020 menaçant de torpiller un processus de paix fragile entre ces deux pays rivaux du Caucase.
Un cessez-le-feu était toutefois "respecté" jeudi selon l'UE, après que les combats, qui avaient éclaté mardi, ont pris fin dans la nuit de mercredi à jeudi "grâce à l'implication de la communauté internationale", a indiqué le Conseil de sécurité nationale arménien.
La Russie, médiateur traditionnel dans cette région, avait annoncé une trêve dès mardi matin, mais celle-ci avait été violée pendant deux jours, les deux camps s'accusant mutuellement de bombardements.
Mercredi, l'Arménie a indiqué avoir perdu 105 militaires et accusé l'Azerbaïdjan d'avoir occupé une portion de 10 kilomètres carrés supplémentaires de son territoire.
Bakou, de son côté, a annoncé jeudi la mort de 21 soldats supplémentaires lors des affrontements, portant son bilan à 71 militaires tués.
"L'Union européenne reste fortement impliquée dans le processus de normalisation" entre les deux pays, a souligné jeudi Peter Stano, porte-parole du chef de la diplomatie de l'UE Josep Borrell.
Selon la même source, le représentant spécial de l'UE, Toivo Klaar, a tenu des consultations "à haut niveau" à Bakou mercredi, avant de faire de même à Erevan, jeudi.
Les deux pays se rejettent la responsabilité de ces affrontements de grande ampleur, qui ont poussé des centaines de civils arméniens vivant dans la zone frontalière à fuir.
Relations compliquées
Une délégation de l'Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), une alliance militaire menée par Moscou, devait arriver jeudi à Erevan pour examiner la situation, selon la diplomatie arménienne.
Mais difficile pour le Kremlin de s'engager pleinement dans la résolution de ce conflit: ces événements interviennent alors que Moscou, qui a déployé une force de maintien de la paix dans la région après la guerre de 2020, a les mains occupées avec les difficultés de son offensive militaire en Ukraine.
Ces affrontements sont les plus intenses depuis une guerre entre les deux pays en 2020 pour le contrôle de l'enclave du Nagorny Karabakh, qui a fait plus de 6.500 morts et a conduit Erevan à céder des territoires à Bakou.
Mercredi soir, des manifestants se sont rassemblés devant le Parlement à Erevan pour demander la démission du Premier ministre Nikol Pachinian, après que des rumeurs lui prêtant l'intention de faire des concessions à l'Azerbaïdjan ont circulé sur les réseaux sociaux.
Les relations entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, deux ex-républiques soviétiques rivales, sont historiquement compliquées.
Avant 2020, les deux pays s'étaient déjà affrontés dans les années 1990 pour le Nagorny Karabakh, un conflit qui a fait plus de 30 000 morts.
Cette région montagneuse est majoritairement peuplée d'Arméniens mais est considérée par Bakou et la communauté internationale comme partie intégrante du territoire de l'Azerbaïdjan. Elle avait fait sécession à la chute de l'URSS avec le soutien de l'Arménie.
Les nouveaux affrontements menacent de faire dérailler un processus de paix parrainé par l'Union européenne. M. Pachinian et le président azerbaïdjanais Ilham Aliev s'étaient d'ailleurs réunis à Bruxelles le 31 août, deux semaines avant le début des combats.
Selon plusieurs observateurs interrogés par l'AFP, cette dernière escalade a de facto réduit à néant les efforts de Bruxelles de faire converger les positions entre Bakou et Erevan.