La Suède dans l'attente d'un vainqueur après des élections rocambolesques

Le chef des démocrates suédois Jimmie Akesson arrive à la soirée électorale du parti à Nacka, près de Stockholm, tard dimanche soir, le 11 septembre 2022. (Jonathan NACKSTRAND / AFP)
Le chef des démocrates suédois Jimmie Akesson arrive à la soirée électorale du parti à Nacka, près de Stockholm, tard dimanche soir, le 11 septembre 2022. (Jonathan NACKSTRAND / AFP)
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Publié le Lundi 12 septembre 2022

La Suède dans l'attente d'un vainqueur après des élections rocambolesques

  • Au terme d'une soirée de résultats rocambolesque, l'autorité électorale du pays scandinave a prévenu que le verdict final du scrutin devrait attendre mercredi, tant les scores sont serrés
  • Si ces scores se confirmaient, la gauche quitterait le pouvoir après huit ans aux manettes

STOCKHOLM: La Suède entame lundi une attente de trois jours pour désigner le camp vainqueur de ses élections législatives archiserrées, avec la droite et l'extrême droite en position de conquérir ensemble le pouvoir.

Abonné à des crises politiques à répétition ces dernières années, le pays nordique se retrouve à nouveau dans une phase d'incertitudes pour former un gouvernement, avec une majorité qui s'annonce encore très étriquée.

Au terme d'une soirée de résultats rocambolesque, l'autorité électorale du pays scandinave a prévenu que le verdict final du scrutin devrait attendre mercredi, tant les scores sont serrés.

Selon les résultats partiels portant sur près de 95% des bureaux de vote, le bloc mené par le leader du parti conservateur des Modérés Ulf Kristersson emporterait une majorité absolue de 175 à 176 sièges, contre 173 à 174 sièges pour le bloc de gauche de la Première ministre sortante sociale-démocrate Magdalena Andersson.

Si ces scores se confirmaient, la gauche quitterait le pouvoir après huit ans aux manettes.

Le grand vainqueur de la soirée est le parti nationaliste anti-immigration des Démocrates de Suède (SD) dirigé par Jimmie Akesson. Avec un score provisoire de 20,7%, il signe un nouveau record et devient le premier parti des droites mais aussi le deuxième parti de Suède.

"Ca sent bigrement bon", a lancé le chef de parti de 43 ans devant ses troupes en fusion à son QG de campagne, célébrés par des chants de "Jimmie, lalalalala".

Alors que les sondages sortie des urnes et les premiers résultats préliminaires suggéraient une victoire de justesse de la gauche en début de soirée, les droites sont passées devant au fur et à mesure des dépouillements et semblent désormais en passe de l'emporter.

Sur la base des voix dépouillées jusqu'au milieu de la nuit, le bloc de droite (SD, Modérés, chrétiens-démocrates et libéraux) obtiendrait 49,8% des suffrages. Le bloc de gauche (sociaux-démocrates, parti de Gauche, Verts et parti du Centre) réunirait 48,8%. Soit environ 60.000 voix seulement de retard, pour un corps électoral de 7,8 millions de personnes.

Les voix des Suédois de l'étranger et certains votes faits par avance doivent encore être comptabilisés, mais les politologues jugent improbable une inversion du résultat.

"Nous n'aurons pas un résultat final ce soir", a déclaré la Première ministre Magdalena Andersson, qui n'a pas jeté l'éponge avec un joli score pour son parti, au-delà des 30%.

Tournant majeur

"La démocratie suédoise doit suivre son cours, tous les votes doivent être comptés et nous attendrons le résultat", a affirmé la dirigeante sortante de 55 ans, qui espérait assurer un troisième mandat à la gauche dimanche soir.

Ces élections marquent un tournant majeur: jamais jusqu'à ces législatives la droite traditionnelle suédoise n'avait envisagé de gouverner avec l'appui direct ou indirect des SD.

Longtemps paria, le parti nationaliste et anti-immigration se retrouve aujourd'hui en position de force.

"Cela en dit long sur le chemin parcouru, sur le petit parti dont tout le monde se moquait (...) aujourd'hui nous sommes le deuxième parti de Suède", a lancé M. Akesson devant ses partisans surchauffés.

"Notre ambition est d'être au gouvernement", a-t-il réaffirmé, même s'il est plus probable que le parti se contente d'un rôle d'appui de la nouvelle majorité au Parlement.

Ulf Kristersson, le conservateur suédois qui a tendu la main à l'extrême droite

Il pourrait devenir le premier chef de gouvernement suédois à s'appuyer sur l'extrême droite après les élections de dimanche. Le dirigeant du parti conservateur Ulf Kristersson est un ancien gymnaste qui a réussi l'acrobatie d'unir les droites, au risque d'y perdre l'équilibre.

Petites lunettes rondes et physique de poids plume, sourire éclatant, "Uffe" pose sur ses affiches avec un compagnon omniprésent: son chien de chasse Winston, un welsh springer spaniel reçu en cadeau de consolation après la défaite aux élections de 2018.

A l'époque, le leader des Modérés - le nom de son parti - jure de ne pas entamer de pourparlers avec le parti nationaliste et anti-immigration des Démocrates de Suède (SD). Il échoue alors d'un souffle à reprendre le pouvoir à la gauche social-démocrate.

Quatre ans plus tard, il tient sans doute sa revanche, au prix d'un rapprochement inédit entamé fin 2019 avec les SD.

La seule voie pour faire perdre la gauche selon ses soutiens, pacte faustien pour ses détracteurs.

"Mon côté de la politique", dit-il désormais pour qualifier l'attelage entre trois partis de la droite traditionnelle et les nationalistes, destiné à succéder à la gauche au pouvoir.

Ensemble, ils contrôleraient 175 ou 176 sièges au Parlement, selon des résultats non définitifs. Soit pile la majorité absolue ou un fauteuil de marge.

Diplômé d'économie et féru de Tintin, ce grand partisan de la baisse des allocations sociales est marié et père de trois filles adoptées de Chine.

Considéré comme un fin orateur, Kristersson a mené une campagne de droite dure, s'attaquant aux graves problèmes de bandes criminelles en Suède, quitte à ce que les critiques le qualifient de "SD light".

"Une Suède qui ne fonctionne pas est devenue la nouvelle normalité", a-t-il déploré durant sa campagne, promettant de "remettre de l'ordre" dans le pays.

Election de l'électricité

Le dirigeant de la droite s'est également engagé à baisser les prix galopants de l'énergie après ce que des analystes ont baptisé "l'élection de l'électricité".

Mais il a dû faire face aux doutes sur sa stratégie, d'autant que les SD ont ravi dimanche aux Modérés la place de deuxième parti de Suède que ces derniers occupaient depuis 40 ans.

En les amenant aux portes du pouvoir, "Kristersson pourrait ne rester dans l'histoire que comme le serrurier des SD", a ironisé le quotidien de référence Dagens Nyheter avant l'élection.

Né à Lund dans le sud de la Suède en 1963, le jeune Ulf fait ses premiers pas en politique dès le lycée pour arriver quelques années plus tard à la tête de la section nationale des jeunes Modérés.

Il gravit rapidement les échelons et intègre le Parlement comme suppléant en 1991 puis est élu en 1994.

Quand il ne siège pas au Riksdag, le Parlement, il embrasse une carrière de communicant ou de cadre d'une structure proche du patronat ou d'une organisation dévolue à l'adoption.

Sa femme Birgitta Ed, qui a abandonné sa carrière dans les relations publiques à l'arrivée de son mari à la tête du parti en 2017, s'est récemment formée au métier de pasteure pour bientôt intégrer l'Eglise de Suède.

Sa possible victoire électorale de dimanche - qui reste à confirmer par des résultats définitifs attendus mercredi - a éloigné le couperet de la disparition politique qu'aurait signifié un nouvel échec.

"La vision que les Modérés ont d'un chef de parti est quelque peu semblable à celle d'un PDG d'une entreprise privée, tant que ça se passe bien, il peut rester mais si ça tourne mal, il s'en va le jour même", explique à l'AFP Torbjörn Nilsson, professeur d'histoire à l'université de Södertörn et spécialiste de l'histoire politique suédoise.

Entrés à la chambre pour la première fois en 2010, avec 5,7% des voix, les SD n'ont cessé de progresser depuis et dépassent désormais les 40% dans certaines communes, notamment dans le sud du pays.

Immigration importante et règlements de compte meurtriers entre bandes criminelles dans les banlieues suédoises ont nourri le parti d'extrême droite ces dernières années. Ces thèmes, ainsi que la flambée des prix des carburants et de l'électricité, ont dominé la campagne.

Parmi ses grands dossiers internationaux, le prochain gouvernement suédois doit notamment finaliser la candidature historique du pays à l'Otan, menacée d'un veto turc. Et prendre la présidence tournante de l'Union européenne le 1er janvier.

Un casse-tête de plus? S'ils ont renoncé à demander la sortie de la Suède de l'UE, les SD n'en restent pas moins farouchement eurosceptiques.


Armes à Israël: les républicains tentent de forcer la main à Biden

Des Palestiniens déplacés marchent autour d'une flaque d'eau devant des bâtiments et des tentes détruits à Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 mai 2024, au milieu du conflit en cours entre Israël et le groupe militant Hamas. (Photo par AFP)
Des Palestiniens déplacés marchent autour d'une flaque d'eau devant des bâtiments et des tentes détruits à Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 mai 2024, au milieu du conflit en cours entre Israël et le groupe militant Hamas. (Photo par AFP)
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  • Pour les républicains, Joe Biden n'a pas le droit d'interférer dans la manière dont Israël mène sa campagne militaire, qui a provoqué un désastre humanitaire à Gaza
  • Mais 16 démocrates se sont joints aux républicains pour adopter la proposition de loi, défiant le chef de l'Etat

WASHINGTON: La Chambre américaine des représentants, dominée par les républicains, a voté jeudi une mesure largement symbolique visant à forcer le président démocrate Joe Biden à mettre fin à sa suspension d'une livraison de bombes à Israël.

Cette suspension de la livraison d'une cargaison d'armes, composée de bombes de 2 000 livres (907 kg) et de 500 livres (226 kg), a été décidée au moment où Washington, premier soutien militaire d'Israël, s'oppose à une offensive d'ampleur des troupes israéliennes à Rafah.

La mesure votée jeudi n'a aucune chance de devenir loi. En théorie, elle empêcherait M. Biden de geler toute aide militaire à Israël approuvée par le Congrès.

"Le président et son administration doivent immédiatement faire marche arrière et se tenir aux côtés d'Israël", a déclaré Mike Johnson, chef républicain de la Chambre des représentants, dans un communiqué.


Biden s'efforce de remobiliser l'électorat afro-américain

Le président américain Joe Biden s'exprime lors du service commémoratif des agents de la paix nationaux devant le Capitole américain à Washington, DC, le 15 mai 2024. (Photo, AFP)
Le président américain Joe Biden s'exprime lors du service commémoratif des agents de la paix nationaux devant le Capitole américain à Washington, DC, le 15 mai 2024. (Photo, AFP)
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  • Vendredi, Joe Biden ira prononcer un discours au Musée national de l'histoire et de la culture afro-américaine à Washington
  • La mobilisation des Afro-Américains avait été décisive dans la victoire de Joe Biden face à Donald Trump en 2020

WASHINGTON: A coup d'événements symboliques et d'interviews, Joe Biden, qui selon certains sondages serait en perte de vitesse auprès des Afro-Américains, s'efforce cette semaine de remobiliser cet électorat décisif.

Le président américain multiplie ainsi les hommages aux grandes luttes menées pour les droits civiques aux Etats-Unis.

Jeudi, le démocrate de 81 ans, qui va affronter son prédécesseur républicain Donald Trump pour un second mandat en novembre, a reçu les familles des plaignants d'un combat judiciaire emblématique contre la ségrégation scolaire, ayant débouché sur la décision "Brown vs Board of Education" de la Cour suprême.

Dans cet arrêt de 1954, la Cour a jugé que la séparation des élèves blancs et des élèves noirs dans les écoles violait la Constitution.

Vendredi, Joe Biden ira prononcer un discours au Musée national de l'histoire et de la culture afro-américaine à Washington.

Puis il rencontrera les représentants des "Divine Nine", des "fraternités" et "sororités" (associations typiques des universités américaines) fondées par des étudiants et des étudiantes noires.

Dimanche enfin, il doit s'exprimer lors de la remise des diplômes de l'université historiquement noire de Morehouse à Atlanta (sud-est), celle où étudia Martin Luther King, le grand meneur de la lutte pour les droits civiques dans les années 1960.

La Maison Blanche a d'ailleurs annoncé jeudi avoir investi au total 16 milliards de dollars dans la centaine d'universités historiquement noires du pays depuis l'élection de Joe Biden.

"Le président et moi-même restons déterminés à utiliser tous les moyens disponibles pour soutenir les universités historiquement noires", a commenté dans un communiqué la vice-présidente Kamala Harris, elle-même ancienne étudiante de l'un de ces établissements, la Howard University.

Gaza 

Reste à voir comment le démocrate, ferme soutien d'Israël, sera reçu à Morehouse, alors que certaines cérémonies de ce genre ont été perturbées récemment par des manifestants propalestiniens.

Concernant la guerre à Gaza, "il y a une inquiétude légitime", a dit le président américain, interrogé par une radio de la communauté afro-américaine à Atlanta (Géorgie, sud-est) à propos de ces mobilisations, en ajoutant: "Les gens ont le droit de manifester, de le faire pacifiquement."

Selon plusieurs sondages récents, Joe Biden, tout en restant nettement majoritaire auprès de cet électorat, perdrait du terrain auprès des électeurs noirs, en particulier les plus jeunes, dans certains Etats décisifs.

Parmi eux la Géorgie, ou encore le Wisconsin.

Ce n'est donc pas un hasard si Joe Biden a aussi accordé un entretien, également diffusé jeudi, à une radio afro-américaine de Milwaukee, dans cet Etat de la région des Grands Lacs.

Il y vante ses actions sociales et économiques en faveur des Afro-Américains et critique son opposant républicain.

"Il n'a littéralement rien fait (pour la communauté afro-américaine" et il veut empêcher son accès au vote", a dit Joe Biden.

Sur les ondes de la radio de Géorgie, il a déclaré: "Rappelez-vous qui est Trump. Il a accusé à tort les +Cinq de Central Park+", de jeunes Afro-Américains victimes d'une erreur judiciaire retentissante, "il a donné naissance aux théories du complot" autour de la nationalité de l'ancien président Barack Obama.

La mobilisation des Afro-Américains avait été décisive dans la victoire de Joe Biden face à Donald Trump en 2020. Il avait alors remporté 92% de leurs voix, contre 8% à son adversaire républicain, selon l'institut Pew Research.


Le micro d’une étudiante coupé alors qu’elle demande à Columbia de se mobiliser pour Gaza

Saham David Ahmed Ali s’exprime lors de la cérémonie de remise des diplômes de la Mailman School of Public Health de l’université Columbia. Son micro s’est coupé à deux reprises pendant son discours. (Capture d’écran)
Saham David Ahmed Ali s’exprime lors de la cérémonie de remise des diplômes de la Mailman School of Public Health de l’université Columbia. Son micro s’est coupé à deux reprises pendant son discours. (Capture d’écran)
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  • Le microphone s’est coupé à deux reprises pendant son discours, ce qui a incité les étudiants à huer et à scander «laissez-la parler» pendant que Mme Ali marquait une courte pause
  • On ne sait pas si le problème est dû à un défaut technique ou si le microphone a été délibérément coupé

LONDRES: Un microphone a brièvement été coupé cette semaine lors d’un discours prononcé au cours de la cérémonie de remise des diplômes de l’université Columbia aux États-Unis. L’oratrice avait critiqué la position de l’université à l’égard de Gaza.

Mardi, l’étudiante Saham David Ahmed Ali a prononcé un discours devant les diplômés de la Mailman School of Public Health. Elle a appelé à une action contre Israël, critiquant le «silence sur le campus de l’université Columbia».

Le microphone s’est coupé à deux reprises pendant son discours, ce qui a incité les étudiants à huer et à scander «laissez-la parler» pendant que Mme Ali marquait une courte pause. Elle a ensuite pu continuer. On ne sait pas si le problème est dû à un défaut technique ou si le microphone a été délibérément coupé.

Saham David Ahmed Ali a déclaré que l’université devait révéler ses relations avec des entreprises «tirant profit du génocide palestinien» et qu’elle devait immédiatement s’en désengager.

Elle a également demandé à Columbia d’appeler à un cessez-le-feu immédiat à Gaza, où les civils palestiniens sont actuellement confrontés à la famine, selon l’ONU, alors qu’Israël poursuit sa campagne militaire qui a fait plus de trente-cinq mille morts, des milliers d’autres blessés et des centaines de milliers de déplacés à la suite de l’attaque menée par le Hamas contre Israël le 7 octobre.

L’université Columbia a été témoin d’importantes manifestations sur son campus depuis le 17 avril après que la présidente de l’université, Minouche Chafik, a témoigné devant le Congrès américain au sujet d’incidents présumés d’antisémitisme contre des étudiants juifs sur son campus.

Les manifestants ont ensuite occupé certaines parties du campus, notamment le Hamilton Hall de l’université. La police de New York a arrêté des centaines de personnes à la suite de ces manifestations, qui ont également déclenché des mouvements similaires dans d’autres grandes universités américaines, ainsi que des contre-manifestations d’étudiants brandissant des drapeaux israéliens et américains.

Columbia a également pris la mesure inhabituelle d’annuler sa cérémonie d’ouverture cette année à la suite des manifestations, organisant uniquement des cérémonies de remise des diplômes propres à l’université.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com