CASABLANCA : Niché en plein cœur de la kasbah de Tanger, lieu emblématique de la ville du détroit, le Musée de l’âne compte chaque jour de nombreux visiteurs.
Il y a quatre mois, Abderrahim Benattabou a donné une seconde jeunesse à son musée fondé il y a cinq ans et lui offrant de nouveaux locaux. Pour cet amoureux des animaux, il était important de rendre justice à cet équidé qu’il estime trop souvent méprisé par la société.
«Je cherchais une façon de rendre hommage à cet animal maltraité et méprisé, alors qu’il a rendu tant de services à l’humanité», nous confie-t-il avec émotion.
Baptisé à l’origine «Musée de l’âne, de la tortue et de la cigogne», cet espace de culture et de découverte avait pour objectif de mettre en lumière les espèces en voie d’extinction. Finalement, sans passer du coq à l’âne, Abderrahim choisira de le dédier à un seul animal: «Je me suis dit: “On ne va pas embrouiller les gens, on va prendre l’âne comme symbole et il sera le porte-parole des autres animaux en voie d’extinction.”»
Une collection impressionnante
Aujourd’hui, près de cinq cents objets particulièrement variés composent la galerie tangéroise. Entre tableaux, photos, livres, sculptures et affiches de films, le musée regorge de trésors anciens et nouveaux, parfois créés pour l’occasion.
«Au début, je demandais à des artistes s’ils connaissaient des livres et œuvres sur l’âne. J’ai aussi sollicité des peintres et des photographes. Ensuite, on a commencé à me contacter pour offrir au musée différents objets, en plus de ceux que j’ai acquis par mes propres moyens», souligne l’initiateur du projet.
Depuis toujours, l’âne a une place prépondérante dans la littérature orientale et occidentale, des Fables de La Fontaine au livre Kalila wa Dimna, en passant par les célèbres histoires de Joha ou par certaines œuvres de Hugo, Perrault et Shakespeare. Autant de textes que l’on retrouve dans la bibliothèque de ce musée de Tanger. Et la collection ne cesse de s’agrandir.
Un musée sans âneries
Pour Abderrahim Benattabou, il n’est pas acceptable de continuer à dénigrer cet animal majestueux à qui il a consacré une grande partie de sa vie. Son but est justement de lui redonner ses lettres de noblesse.
«Le musée est dédié au respect de l’âne. Je lis toutes les œuvres que je reçois et je retire celles dans lesquelles l’âne est traité de manière péjorative», explique-t-il à Arab News en français.
Loin d‘être un simple espace d’exposition, ce lieu a pour ambition de sensibiliser les visiteurs à plusieurs causes. Outre la protection des animaux, Abderrahim prône notamment le respect de l’écologie et celui des êtres humains en général: «Il faut comprendre que l'âne est l'animal qui a aidé à bâtir le Maroc. Quand on l’insulte, on manque de respect à tous les travailleurs. En réalité, lorsqu’on se rend dans ce musée, on commence par une visite artistique, culturelle et littéraire et on accède, petit à petit, à un message plus profond.»
Abderrahim Benattabou sillonne régulièrement le Maroc afin de partager sa collection avec le public. Il devrait ainsi bientôt faire escale au CHU Ibn Rochd de Casablanca.
Parallèlement, il prépare un recueil d’histoires racontées par certains visiteurs du musée. Des anecdotes en rapport avec cette espèce qui se fait désormais de plus en plus rare dans les rues de Tanger, à l’exception de ce lieu atypique où elle est devenue une véritable célébrité.