Emmanuel Macron retrouve l'Afrique, priorité diplomatique

Trois mois après sa réélection, Emmanuel Macron retourne en Afrique, l'une de ses priorités diplomatiques (Photo, AFP).
Trois mois après sa réélection, Emmanuel Macron retourne en Afrique, l'une de ses priorités diplomatiques (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 23 juillet 2022

Emmanuel Macron retrouve l'Afrique, priorité diplomatique

  • Les discussions porteront aussi sur la crise alimentaire provoquée par la guerre en Ukraine et l'initiative Farm lancée en mars avec l’Union européenne et de l’Union africaine pour accroître la production agricole
  • La France compte soutenir des projets au Cameroun, qui dispose de nombreux atouts dans ce secteur

PARIS: Trois mois après sa réélection, Emmanuel Macron retourne en Afrique, l'une de ses priorités diplomatiques, en visitant pour la première fois le Cameroun, poids lourd de l'Afrique centrale, le Bénin, confronté aux défis sécuritaires du Sahel, et la Guinée-Bissau.

Ce déplacement de quatre jours permettra au président français de réaffirmer son "engagement dans la démarche de renouvellement de la relation de la France avec le continent africain", explique l'Elysée.

Au cours de son premier mandat, Emmanuel Macron a privilégié les visites dans les pays du Sahel - lutte antijihadiste oblige - et les pays non-francophones d'Afrique comme le Nigéria, l'Ethiopie ou l'Afrique du Sud. Il a ainsi délaissé ceux de l'ancien pré-carré français en Afrique centrale dont le Gabon, la RDC ou le Cameroun qui, parallèlement, ont développé leurs relations politiques et économiques avec d'autres puissances comme la Chine, la Russie ou l'Allemagne.

Mais, avec cette visite, la première hors d'Europe depuis sa réélection en avril, le président entend "adresser un signal de priorité politique accordée au continent africain", affirme l'Elysée.

Elle intervient alors qu'Emmanuel Macron a annoncé la semaine dernière sa volonté de "repenser d'ici l'automne l'ensemble" des dispositifs militaires de la France "sur le continent africain", alors que la force antijihadiste Barkhane boucle son départ du Mali.

Disant vouloir des "dispositifs moins posés et moins exposés", le président a jugé qu'il s'agissait d'une "nécessité stratégique".

Pas «donneur de leçons»

Cette question sera notamment discutée au Bénin qui, frontalier du Burkina-Faso, a subi des attaques jihadistes, et à qui la France est prête à apporter "un soutien concret", notamment dans le renseignement ou le soutien aérien.

Le dossier sahélien sera aussi abordé en Guinée Bissau, dont le président Umaro Sissoco Embalo s'apprête à prendre la tête de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), en première ligne face à la junte malienne.

Au Cameroun, les entretiens avec le président Paul Biya, 89 ans, qui dirige le pays d'une main de fer depuis près de 40 ans devraient aussi porter sur la menace de Boko Haram dans le nord du pays et le conflit qui oppose dans le Nord-ouest et le Sud-ouest depuis plus de cinq ans des groupes armés séparatistes aux forces de l'ordre.

Emmanuel Macron avait provoqué l'indignation du pouvoir en déclarant en 2020, après avoir été interpellé par un opposant, qu'il avait "mis la pression sur Paul Biya" sur les violences "intolérables" dans ces régions.

Au cours de la visite, "les enjeux de gouvernance et l'Etat de droit seront traités à chaque étape, sans injonction médiatique mais sous forme d'échanges directs avec ses homologues", souligne l'Elysée. Pour qui "la ligne du président français n'est en aucun cas de s'ériger en donneur de leçons".

A Yaoundé, Emmanuel Macron débattra avec des jeunes ayant participé au sommet Afrique-France à Montpellier (sud), préparé par le professeur Achille Mbembe, qui sera présent avec notamment l'artiste Greg-Belobo, l'ancien entraîneur de la sélection du Cameroun Claude Le Roy et l'ex-rugbyman français Serge Betsen.

Les discussions porteront aussi sur la crise alimentaire provoquée par la guerre en Ukraine et l'initiative Farm lancée en mars avec l’Union européenne et de l’Union africaine pour accroître la production agricole. La France compte soutenir des projets au Cameroun, qui dispose de nombreux atouts dans ce secteur.

Mercredi au Bénin, Emmanuel Macron devrait être salué pour avoir permis la restitution l'an dernier de 26 œuvres des trésors royaux d'Abomey (sud), pillées en 1892 par les troupes coloniales françaises.

Le chef de l'Etat sera accompagné des ministres des Affaires étrangères et des Armées, Catherine Colonna et Sébastien Lecornu, du ministre délégué au Commerce extérieur Olivier Becht ainsi que de la secrétaire d'Etat chargée du Développement, Chrysoula Zacharopoulou.

«Rénover» les partenariats militaires en Afrique, un impératif stratégique pour Paris

La tournée africaine d'Emmanuel Macron à partir de lundi intervient à l'heure où la France a entrepris de "rénover" ses partenariats militaires sur le continent pour se maintenir dans la compétition stratégique exacerbée qui s'y joue entre puissances, Russie en tête.

"Nous ne sommes plus qu'un parmi d'autres" en matière d'offre militaire, résume un officier français stationné en Afrique de l'Ouest. Parmi ces "autres" figurent la Turquie, Israël, les Etats-Unis mais aussi et surtout la Russie, qui cherche à damer le pion aux Français dans ses zones d'influence héritées des temps coloniaux, et dans le cadre d'une stratégie d'ampleur mondiale.

Le président français l'aura bien en tête en se rendant, du 25 au 28 juillet, au Cameroun, au Bénin et en Guinée-Bissau. Son ministre des Armées Sébastien Lecornu s'était rendu mi-juillet au Niger et en Côte d'Ivoire, juste après l'annonce par le chef de l'Etat de sa volonté de "repenser d'ici l'automne l'ensemble (des dispositifs militaires de la France) sur le continent africain".

Poussée hors du Mali par la junte au pouvoir depuis 2020, qui travaille désormais - même si elle s'en défend - avec le sulfureux groupe paramilitaire russe Wagner, l'armée française sera partie du pays à la fin de l'été, après neuf ans de lutte antijihadiste. Sa présence au Sahel sera divisée par deux, à moins de 2 500 militaires.

Malgré cette décrue, la France assure qu'elle ne renoncera pas à la lutte contre les jihadistes affiliés à Al-Qaïda et au groupe Etat Islamique. Longtemps contenus au Sahel, ils gagnent aujourd'hui du terrain vers le Golfe de Guinée.

Mais les interventions militaires de l'ancienne puissance coloniale vont muter vers des "dispositifs moins posés et moins exposés", selon les termes d'Emmanuel Macron, afin notamment d'éviter de prêter le flanc à un sentiment anti-français très inflammable.

«La galaxie Prigojine»

L'enjeu est fondamental: Paris entend éviter le déclassement stratégique face à ses adversaires ou compétiteurs sur ce continent qui comptera 2,5 milliards d'habitants en 2050.

"Les Russes ont une vraie priorité opérationnelle de s'opposer aux Français dans le champ informationnel en Afrique. Ils exercent une forte pression pour essayer de nous chasser (via) les réseaux sociaux, par le biais de Wagner", résume un général français.

Les mercenaires de Wagner sont déjà implantés en Centrafrique et au Mali, avec une offre de service claire: sécurité anti-coup d'Etat et assistance juridique pour maintenir le régime au pouvoir, en échange de l'exploitation des ressources minières, soulignent à l'AFP des sources concordantes.

La "galaxie Prigojine", du nom du fondateur russe de Wagner réputé proche du Kremlin, est également très active sur les réseaux sociaux. Fin avril au Mali, un drone français a surpris des mercenaires mettant en scène un faux charnier à proximité d'une base française, pour faire accuser Paris de crimes de guerre via de faux comptes Twitter.

Le camp pro-russe pousse même jusqu'à l'ingérence dans la vie politique française, selon deux sources proches du dossier. "Le camp russe nous a embêtés pendant les campagnes électorales (présidentielle et législatives), via des faux comptes pro ou anti-gouvernement au Mali, au Sénégal, au Bénin et en RCA. Mais ça n'a pas pris", décrit un haut responsable.

Discrétion

Dans le même temps, Paris veut continuer à participer à la lutte contre l'insécurité, qui menace ses partenaires africains et nourrit les migrations vers l'Europe. Tout en restant discrète. "S'afficher avec les Français joue négativement", admet un haut gradé français.

"Nous allons vers davantage d'opérations de coopération, conditionnées de façon plus stricte aux demandes des pays africains, qui viendront +en soutien de+ et non pas +à la place de+", expliquait récemment à l'AFP le commandant de l'opération Barkhane, le général Laurent Michon.

Les discussions vont bon train pour évaluer les demandes des partenaires, à qui la France veut offrir plus de places d'officiers dans ses écoles militaires.

Au Sahel, le Niger a accepté le maintien d'une base aérienne française à Niamey et l'appui de 250 soldats pour ses opérations militaires à la frontière malienne. Le Tchad continuera à héberger une emprise française à N'Djamena et les Français espèrent conserver un contingent de forces spéciales à Ouagadougou, au Burkina Faso.

Dans le Golfe de Guinée, les Forces françaises en Côte d'Ivoire, qui coopèrent déjà avec l'armée locale, pourraient offrir des moyens de surveillance dans le nord du pays à la demande d'Abidjan.

Quant au Bénin et au Togo, "il y a une demande d'appui français en matière de soutien aérien, de renseignement et d'équipement", selon l'Elysée. La Guinée, elle, étudie encore ses besoins pour sécuriser sa frontière avec le Mali.


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.