L'Assemblée adopte au bout de la nuit le projet de loi pouvoir d'achat

Le texte faisait office de test pour le camp présidentiel (vue de l'Assemblée nationale, photo AFP)
Le texte faisait office de test pour le camp présidentiel (vue de l'Assemblée nationale, photo AFP)
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Publié le Vendredi 22 juillet 2022

L'Assemblée adopte au bout de la nuit le projet de loi pouvoir d'achat

  • Au bout d'une nuit émaillée d'invectives, le premier grand texte de la législature a été validé peu avant 6H du matin par 341 voix pour, 116 contre et 21 abstentions
  • Le texte prévoit notamment le triplement à 6.000 euros du plafonnement de la prime Macron, le plafonnement de la hausse des loyers à 3,5% dans l'Hexagone et la facilitation de la résiliation en ligne des abonnements

PARIS : Après quatre jours de discussions et au bout d'une nuit entière de débats houleux, les députés ont adopté en première lecture le projet de loi «d'urgence» pour le pouvoir d'achat, un texte protéiforme censé atténuer les effets de l'inflation et de la crise énergétique.

Le texte faisait office de test pour le camp présidentiel. Désormais privé de majorité absolue, il a dû compter sur le soutien des élus LR et du RN qui ont timidement salué certaines «avancées» tandis que la gauche s'indignait d'un projet en forme de «déclaration de guerre aux salaires».

Au bout d'une nuit émaillée d'invectives, le premier grand texte de la législature a été validé peu avant 6H du matin par 341 voix pour, 116 contre et 21 abstentions.

«Ayatollahs verts», «fachos», «nullités énergétiques»: les attaques ont fusé pendant de longues heures, donnant parfois à l'Assemblée des airs d'enceinte incontrôlable.

Les hostilités pourraient reprendre rapidement puisque les députés commencent vendredi 15H00 à examiner le projet de loi de finances rectificatives qui complète ces mesures et comporte quelques propositions explosives telle que la suppression de la redevance audiovisuelle.

- «Lâcher du lest» -

Difficile de résumer le texte adopté par l'Assemblée. Il prévoit notamment le triplement à 6.000 euros du plafonnement de la prime Macron, le plafonnement de la hausse des loyers à 3,5% dans l'Hexagone et la facilitation de la résiliation en ligne des abonnements.

Au cours d'un très rare moment de concorde, les députés ont voté à l'unanimité mercredi la déconjugalisation de l'allocation adultes handicapés, une mesure réclamée de toutes parts mais que l'exécutif avait refusée lors de la précédente législature.

«La colère du peuple vous a obligé à lâcher du lest», a savouré Hadrien Clouet, au nom d'un groupe LFI très offensif.

Plus mesuré, Gérard Leseul, pour le groupe PS, a déploré que la méthode de l’exécutif n'ait «pas changé» malgré le souhait affiché d'une recherche de compromis.

Dans les faits, les quelques amendements des oppositions qui ont reçu le soutien du gouvernement venaient en grande majorité des bancs de LR. Résumant la position de son groupe sur le projet de loi, Thibault Bazin a d'ailleurs évoqué certaines mesures allant «dans le bon sens» tout en restant «très insuffisantes».

En quête de respectabilité, le RN qui avait affiché sa volonté de voter le texte a évoqué de «maigres mais réels gains de pouvoir d’achat» malgré de nombreuses carences.

C'est notamment sur le volet énergétique que le texte gouvernemental a essuyé de très sévères critiques. Afin de parer à une possible fermeture du robinet à gaz russe, le projet de loi introduit des mesures qui ont fait des remous de part et d'autre de l'hémicycle.

- «Pure folie» -

Les députés de gauche se sont notamment élevés contre l'instauration de dérogations au droit de l'environnement afin d'accélérer la mise en service d'un terminal méthanier au Havre à même d'acheminer du gaz en provenance d'autres pays que la Russie, et par lequel pourrait transiter du gaz de schiste américain.

Une telle décision est «suicidaire», a tonné l'écologiste Delphine Batho. «Si la décision c'est de remplacer le gaz de Poutine par du gaz de schiste américain, c’est une pure folie».

L'exécutif a tenté de se défendre.

«On parle de remplacer une énergie fossile par une autre énergie fossile. Pas d’émettre plus de CO2», a lancé la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher mais sans convaincre la gauche.

Un autre article du texte, offrant un cadre légal au redémarrage prochain de la centrale à charbon de Saint-Avold, n'a pas fait hurler que les Verts. Elle a également fait tiquer les LR et le RN, qui y vont vu la conséquence «désastreuse» de la politique énergétique du gouvernement.

«Ce retour au charbon n'est pas une bonne nouvelle», a convenu la rapporteure LREM Maud Bregeon, qui a toutefois défendu un recours «temporaire» pour répondre à une «situation exceptionnelle».

Au milieu des tensions, l'examen du texte a réservé une petite surprise: l'autorisation, avec l'aval du gouvernement, de l'utilisation des huiles usagées comme carburant. «En France, on n'a a pas de pétrole mais on a de l'huile de friture», a plaisanté Julien Bayou (EELV) à l'origine de cet amendement.

Encouragées à agir, les banques s'engagent à bon compte

Pressées par le gouvernement de faire un geste en faveur du pouvoir d'achat des Français, les banques traînent des pieds et concentrent pour l'heure leur attention sur les plus fragiles, à un coût limité.

Crédit Mutuel Alliance Fédérale, qui regroupe 14 des 18 fédérations du groupe mutualiste, a tiré le premier mercredi dernier en annonçant «un compte à 1 euro net par mois sans aucuns frais d'incident», pour les clients «en difficulté financière».

Société Générale, de son côté, a suivi le mouvement en annonçant également abaisser son offre clientèle fragile de 3 euros, le maximum légal, à un euro.

La banque au logo rouge et noir a également annoncé la mise en place de prêts étudiants à prix coûtant, c'est-à-dire sans marge pour la banque, à la rentrée, ainsi qu'une «stabilité globale des prix» pour l'année prochaine, prenant à sa charge l'inflation, qui a atteint 5,8% sur un an en juin.

Cette offre peut être vue comme une réponse à la demande formulée fin mai par le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire.

«On a intégré cette demande de Bercy de faire attention au pouvoir d'achat dans nos réflexions», reconnaît Marie-Christine Ducholet, directrice de la banque de détail en France du groupe. Cependant, a-t-elle ajouté, il n'y a pas de position commune des banques en la matière, comme cela avait été le cas après la crise des gilets jaunes, lorsque les établissements s'étaient engagés auprès du gouvernement à geler leurs tarifs pour 2019 et à plafonner les frais d'incidents pour les clients les plus fragiles.

Contacté par l'AFP, le ministère de l'Economie a jugé que ces dernières annonces allaient «dans le bon sens», tout en se réservant le droit de faire «un point à la rentrée».

Les autres groupes bancaires ont de leur côté rappelé des initiatives déjà lancées ces derniers mois: gratuité des rejets de prélèvement dans le cas où c'est le deuxième en provenance d'un même opérateur à quelques jours d'intervalle pour La Banque Postale ou offre de location de voiture avec option d'achat sur 10 ans pour les ménages modestes chez BNP Paribas.

- Quelques millions par an -

Dans le détail, si la fourniture d'un chéquier et la possibilité d'un découvert (après étude du dossier) proposé par Crédit Mutuel est plutôt mieux-disante que le reste du marché, où l'offre réservée à la clientèle fragile demeure restreinte, le tarif à un euro est loin d'être inédit.

«On avait déjà relevé des établissements qui allaient au-delà de ce que la loi prévoit», confirme auprès de l'AFP Sandrine Perrois, juriste de CLCV, association de défense des consommateurs.

Certaines caisses du Crédit Agricole, par exemple, appliquaient déjà la gratuité des frais d'incidents, tandis que d'autres caisses régionales proposent des comptes courants à un euro... mais pour l'ensemble des clients.

L'offre de Crédit Mutuel Alliance Fédérale s'appliquera à 50.000 clients fragiles, et celle de Société Générale à 55.000 clients, sur un total de respectivement 13 millions et 7,3 millions de clients.

Coût annoncé de l'opération: «3 à 4 millions d'euros par an», en prenant en compte le manque à gagner de la gratuité des frais d'incident, selon Daniel Baal, directeur général de Crédit Mutuel Alliance Fédérale.

Pour Société Générale, la facture devrait avoisiner 1,3 million d'euros par an.

«Ce n'est finalement pas très cher», commente Eric Dor, directeur des études économiques à l'école de commerce IESEG, qui relève que les banques européennes vont encore gagner plusieurs milliards d'euros d'ici à fin 2024 sur les prêts octroyés par la Banque centrale européenne (BCE).

- Investir en faisant un geste -

Et la frontière entre le geste commercial et l'investissement est parfois étroite.

Concernant les prêts à prix coûtant pour les étudiants, «on le fait avec des prêts qui sont très intéressants, mais effectivement, un jour, on espère qu'une partie d'entre eux va rester chez nous, et on leur souhaite de réussir leurs études et de gagner de l'argent», concède Marie-Christine Ducholet.

Reste la «modération tarifaire» en place depuis la crise des gilets jaunes, et qui devrait se poursuivre, selon le Crédit Mutuel.

Un manque à gagner en période d'inflation qui ne peut pas se rattraper les années suivantes, souligne la banque.


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.