WASHINGTON: De la réunion qui s'est tenue en décembre 2020 dans le Bureau ovale en pleine nuit, un avocat de la Maison Blanche a dit qu'elle était "dingue", une collaboratrice de l'exécutif qu'elle était "folle".
Le président de l'époque, Donald Trump, était en conciliabule ce soir-là avec trois conseillers extérieurs lui proposant des plans invraisemblables pour renverser le résultat de la présidentielle de 2020, remportée par Joe Biden.
La commission parlementaire enquêtant sur l'assaut du 6 janvier 2021 contre le Capitole, mené par des partisans de M. Trump, a dévoilé de nouveaux éléments sur ce que l'élu Jamie Raskin a qualifié de "réunion la plus folle de la présidence Trump".
En plus du président, les participants à cette séance du 18 décembre 2020 étaient Sidney Powell, une avocate de l'équipe de campagne défendant ardemment des théories du complot, Michael Flynn, ex-conseiller à la sécurité nationale, et Patrick Byrne, ancien patron du site de vente en ligne Overstock.com.
Selon la commission, ils sont arrivés avec un projet de décret présidentiel à faire signer à M. Trump, pour autoriser le ministre de la Défense à saisir les machines de vote et pour que Mme Powell soit nommée procureure spéciale afin d'enquêter sur l'élection.
Une fois que les trois responsables ont été autorisés à entrer dans la Maison Blanche par un employé, des juristes de la Maison Blanche ont été alertés de leur présence.
Selon Mme Powell, ils ont pu passer 10 à 15 minutes seuls avec le président avant que Pat Cipollone, le conseiller juridique de la Maison Blanche, ne se rue vers le Bureau ovale, établissant un nouveau "record de vitesse terrestre".
"Je n'ai pas compris comment ils avaient pu entrer", a dit M. Cipollone à la commission. "Je n'étais pas content de voir les personnes qui étaient dans le Bureau ovale".
"Je ne pense pas que ces personnes aient été en train de donner des bons conseils au président", a-t-il ajouté.
M. Cipollone a dit avoir été "catégoriquement opposé" à la nomination de Mme Powell comme procureure spéciale et que la saisie des machines de vote était une "idée épouvantable".
Selon M. Raskin, un "affrontement houleux et ponctué d'injures" entre M. Cipollone, d'autres membres du personnel de la Maison Blanche et les conseillers extérieurs s'est poursuivi pendant plus de six heures.
L'ancien maire de New York et avocat personnel de Donald Trump, Rudy Giuliani, a rejoint le groupe à un moment. Il assurait depuis des semaines, à tort, que l'élection avait été entachée de fraudes.
«Lâcheur»
"Ce n'était pas une réunion ordinaire", a dit l'un des responsables de la Maison Blanche d'alors, Derek Lyons. "Des gens se hurlaient dessus et s'insultaient".
Cassidy Hutchinson, une collaboratrice du chef de cabinet du président, Mark Meadows, a raconté avoir entendu le vacarme et envoyé un SMS à un collègue dans lequel elle qualifiait la situation de "folle".
M. Cipollone a affirmé que les conseillers extérieurs l'"attaquaient verbalement" et l'accusaient de ne pas avoir fait preuve de loyauté envers M. Trump en enquêtant sur des allégations de fraude électorale.
"Nous posions une question simple: +où sont les preuves?+", a-t-il expliqué.
Eric Herschmann, un autre conseiller juridique de la Maison Blanche qui était présent, a déclaré que M. Flynn avait à un moment cherché à démontrer des irrégularités électorales présumées avec des graphiques montrant "des thermostats Nest connectés à Internet".
"On en est arrivés au point où on entendait des cris dans tous les sens", a dit M. Herschmann. "Il était tard dans la nuit. La journée avait été longue et ce qu'ils proposaient m'a semblé dingue".
M. Herschmann a aussi affirmé avoir souligné que tous les recours judiciaires de M. Trump concernant les résultats des élections avaient été rejetés par les tribunaux. Ce à quoi Mme Powell a répondu: "Eh bien, les juges sont corrompus".
"Et j'ai dit +tous les juges?+", a raconté M. Herschmann. "Le moindre d'entre eux est corrompu? Même ceux que nous avons nommés?".
D'après lui, M. Flynn, un général à la retraite, lui a crié qu'il était un "lâcheur".
M. Lyons a dit que la réunion s'était terminée après minuit, avec un retour à la case départ.
Ce qui signifiait que Sidney Powell "se démenait, Mike Flynn se démenait – ils cherchaient des voies qui (...) feraient en sorte que le président Trump reste le président Trump pour un second mandat".