PARIS: «Les attentats du 13 novembre 2015 constituent un crime de masse le plus important que la France ait connu depuis la Deuxième Guerre mondiale, avec cent trente morts et deux autres personnes qui se sont suicidées après les attentats», confie maître Méhana Mouhou. Il représente de nombreuses victimes des attentats dont des blessés du Stade de France comme Bilal Mokono, désormais handicapé, et des familles de victimes décédées sur les terrasses de La Bonne Bière, de la Belle Équipe et au Bataclan.
Un procès historique
«Ce procès est historique, car la justice a pris le temps de se pencher sur la mécanique du crime, sur la qualification des attentats ainsi que sur la part de responsabilité de chacun des accusés. Il est historique parce que les victimes ont pu s’exprimer comme elles le voulaient, comme elles l’entendaient, avec le temps nécessaire pour leurs témoignages. Et enfin, il est historique parce qu’il fallait entrer dans les entrailles du terrorisme afin d’essayer de comprendre comment des jeunes, nés en Europe, qui ont grandi avec ceux qu’ils ont assassinés, ont pu en arriver là, à tuer leurs compatriotes de sang-froid, des innocents qui n’ont strictement rien fait», souligne-t-il.
«Durant les dix mois de procès, la cour est entrée dans la mécanique infernale du crime, elle est allée dans le détail pour rapporter toutes les preuves contre les accusés. Ce sont, en même temps, dix mois de souffrance pour les victimes, car il fallait qu’elles soient présentes tous les jours», indique maître Mouhou, soulignant un point avéré et établi par la cour: ces accusés ont été élevés et éduqués de façon normale par leurs familles; ce ne sont pas des enfants martyrisés ou abîmés par la vie. Mais il y avait cette haine de la France alors qu’ils sont Belges. Selon maître Mouhou, les documents, correspondances et testaments étudiés dans le cadre du procès indiquent que «les accusés étaient complètement radicalisés. Ils projetaient de frapper les mécréants. Ils vivaient une jeunesse tranquille en Belgique, mais la plupart sont devenus des délinquants, des repris de justice ou des trafiquants de drogues», ajoute-t-il.
Des sanctions à la hauteur des crimes commis
Pour lui, les sanctions sont à la hauteur des crimes commis. D’abord pour Salah Abdeslam qui n’est pas jugé pour complicité, mais comme coauteur des faits. «La cour a estimé qu’il y avait trois scènes de crime; le Stade de France, les terrasses et le Bataclan, qui représentent une unité de scènes de crimes», explique-t-il. «M. Abdeslam a du sang sur les mains, car c’est le seul survivant du commando. La peine prononcée, la réclusion criminelle à perpétuité avec période de sûreté incompressible, qui signifie prison à vie, est une peine qui n’est quasiment jamais appliquée en France; c’est une première en matière de terrorisme», affirme-t-il, précisant que la même peine a été prononcée contre ceux qu’on appelle «les six absents», des combattants du djihad morts en Syrie, tels que Fabien Klein.
«Pour les victimes que je représente, c’est une condamnation juste et équitable. Pour eux, c’est un soulagement, parce qu’ils vont enfin pouvoir tourner la page de ce procès et continuer à vivre avec le traumatisme et la souffrance, mais avec une justice rendue», conclut-il.