Législatives: coup de chaud sur les projections en sièges

Seul le second tour tranchera le débat mais un retour sur les cinq derniers scrutins législatifs met en lumière l'existence parfois de décalages, plus ou moins significatifs, entre projections et composition finale de l'Assemblée. (AFP)
Seul le second tour tranchera le débat mais un retour sur les cinq derniers scrutins législatifs met en lumière l'existence parfois de décalages, plus ou moins significatifs, entre projections et composition finale de l'Assemblée. (AFP)
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Publié le Mardi 14 juin 2022

Législatives: coup de chaud sur les projections en sièges

  • Bien moins réglementées que les sondages, les projections en sièges électrisent le débat de l'entre-deux tours des législatives et suscitent des interrogations
  • Elabe dit avoir recours à une «matrice de report» qui combine l'historique de chaque circonscription et des résultats d'enquêtes menées auprès d'électeurs pour anticiper les reports de voix

PARIS: Simple "illusion" ou photographie "utile" des forces en présence ? Bien moins réglementées que les sondages, les projections en sièges électrisent le débat de l'entre-deux tours des législatives et suscitent des interrogations sur leur méthodologie et leur fiabilité passée.

Alors que la Nupes et Ensemble! se disputaient encore la pole position à l'issue du premier tour, les instituts de sondage, anticipant les logiques de reports de voix, ont tous crédité la coalition présidentielle d'une majorité - possiblement relative - dans la prochaine Assemblée, avec une fourchette allant de 255 à 310 sièges, la majorité absolue se situant à 289.

Le ministre Clément Beaune y a vu le signe que Jean-Luc Mélenchon avait perdu son pari d'accéder à Matignon. "Arrêtons avec cette fable", a-t-il déclaré.

Le chef informel de la Nupes en a une tout autre lecture. "Les projections en sièges à cette heure n'ont à peu près aucun sens sinon celui de maintenir une illusion, puisse-t-elle finir d'étourdir nos adversaires", a cinglé M. Mélenchon au soir du premier tour, quand certains de ses lieutenants rappelaient les écarts, en 2017, entre projections et résultats.

Méthodologie en question 

Seul le second tour tranchera le débat mais un retour sur les cinq derniers scrutins législatifs met en lumière l'existence parfois de décalages, plus ou moins significatifs, entre projections et composition finale de l'Assemblée.

En 1997, la gauche plurielle emmenée par le PS obtient 319 sièges sur 577, au-dessus de la fourchette moyenne qui lui en donnait entre 263 et 302.

En 2002, l'UMP installe 309 députés dans l'hémicycle, bien en-dessous des projections qui tablaient sur 380 à 446.

Cinq ans plus tard, les socialistes font mieux que prévu: 186 sièges, contre un maximum de 140 selon les projections.

En 2012, en revanche, malgré un score serré entre PS et UMP au premier tour, les résultats seront conformes aux attentes.

Et en 2017, le deuxième tour confiera 308 sièges à LREM, alors que les projections tablaient sur 400 à 455 députés.

Si les grands rapports de force dessinés par les projections n'ont pas été désavoués dans les urnes, leur méthodologie pose question.

"S'agissant des projections en sièges, il y a des exercices très intéressants et d'autres qui le sont beaucoup moins", commente Jean-Pierre Pillon, secrétaire permanent de la Commission des sondages, l'autorité indépendante chargée de veiller sur la méthodologie des enquêtes d'opinion.

Un certain flou demeure. Contrairement à ce qui prévaut pour les sondages, les instituts ne sont pas tenus, s'agissant des projections, de publier une notice explicitant leur méthodologie.

"On sait comment faire un sondage, on a des références, une tradition. Mais en ce qui concerne les projections, il y a des techniques qui, sont, disons plus +artistiques+. Il y a plusieurs méthodologies et pas une seule façon de faire", poursuit M. Pillon.

Joints par l'AFP, des instituts de sondage défendent "l'utilité" et la fiabilité de ces projections mais rechignent à en livrer, en détail, les secrets de fabrication.

Les résultats du premier tour constituent, sans surprise, le matériau de base que chaque institut enrichit avec ses propres recettes.

Elabe dit avoir recours à une "matrice de report" qui combine l'historique de chaque circonscription et des résultats d'enquêtes menées auprès d'électeurs pour anticiper les reports de voix. "On applique les grandes tendances de cette matrice aux différentes circonscriptions", explique Bernard Sananès, président-fondateur de cet institut, qui ajoute que des " considérations locales et historiques" sont également prises en compte.

Directeur du département opinion chez Ipsos, Stéphane Zumsteeg refuse lui de dévoiler des "secrets d'usine" mais assure que ces projections tiennent  "compte des spécificités et de l’historique de chaque circonscription".

Surtout, comme pour les sondages, les instituts exhortent à ne pas ériger ces projections dont ils reconnaissent la "fragilité" en prédictions.

"Ce ne sont que des projections de premier tour et il faut donc les prendre avec prudence parce que les dynamiques électorales peuvent bouger", convient M. Sananès.

Selon lui, la plus grande difficulté n'est d'ailleurs pas d'anticiper les possibles reports de voix mais là encore de mesurer le score que fera le "premier parti de France": l'abstention.


Lycéenne tuée à Nantes: des élèves «stressés» reviennent en cours

Les collégiens et lycéens du Groupe scolaire de Notre-Dame-de-Toutes-Aides, à Nantes, ont repris lundi les cours, quatre jours après le meurtre d'une jeune fille de 15 ans au cours d'une attaque au couteau commise par un élève de seconde. (AFP)
Les collégiens et lycéens du Groupe scolaire de Notre-Dame-de-Toutes-Aides, à Nantes, ont repris lundi les cours, quatre jours après le meurtre d'une jeune fille de 15 ans au cours d'une attaque au couteau commise par un élève de seconde. (AFP)
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  • De l'extérieur, peu de signes trahissent le drame qui s'est déroulé jeudi au sein de l'établissement, si ce n'est que de nombreux élèves sont vêtus de blanc
  • Les élèves se sont pressés à l'intérieur du collège-lycée par petites grappes, le visage souvent fermé, les mines graves

NANTES: Les collégiens et lycéens du Groupe scolaire de Notre-Dame-de-Toutes-Aides, à Nantes, ont repris lundi les cours, quatre jours après le meurtre d'une jeune fille de 15 ans au cours d'une attaque au couteau commise par un élève de seconde.

De l'extérieur, peu de signes trahissent le drame qui s'est déroulé jeudi au sein de l'établissement, si ce n'est que de nombreux élèves sont vêtus de blanc, suivant l'appel relayé la semaine dernière sur les réseaux sociaux à saluer ainsi la mémoire de la lycéenne tuée et des trois autres élèves blessés, a constaté un journaliste de l'AFP sur place.

Les élèves se sont pressés à l'intérieur du collège-lycée par petites grappes, le visage souvent fermé, les mines graves.

V. et S., deux lycéens, se disent toutefois "un peu stressés" d'être "déjà de retour".

"Ça fait chelou" lance V., qui triture nerveusement sa cigarette "puff" au milieu de son groupe d'amis.

"On a beaucoup parlé entre nous ce week-end, mais ça fait bizarre de revenir aujourd'hui, on a un peu l'impression de revivre la journée de la semaine dernière", explique-t-il à l'AFP.

"Pour ceux qui étaient en classe avec (la victime), je pense que ce n'est pas facile", compatit S.

Près de l'établissement scolaire, Véronique, mère de deux élèves, raconte qu'au cours du week-end, sa famille et elle ont "essayé de former un cocon autour (de ses filles) et d'en parler même si elles ont du mal à réaliser ce qui s'est passé".

"C'est bien qu'ils aient rouvert l'école tout de suite, les élèves ont besoin d'être ensemble et avec leurs professeurs", juge Véronique, qui se dit quand même "rassurée" par la présence de policiers aux abords de l'école.

Une cellule d'aide psychologique a été activée dès jeudi, après l'attaque.

"On a été bien accompagnés, la cellule psychologique est là, ils ont tout fait pour qu'on se sente bien" estime S., qui a "hâte de retrouver les cours" et "une vie normale".

"On en a besoin", mais "personne n'oubliera jamais ce qui s'est passé ici", ajoute-t-il.

Dans une voiture, une jeune fille pleure à chaudes larmes. Sa mère, qui s'entretenait avec un responsable scolaire devant la porte, revient en courant vers elle.

"Non, ça ne va pas", glisse-t-elle en passant. "C'est trop tôt, voilà. Je leur ai dit. On rentre à la maison."

L'auteur présumé de l'attaque, âgé de 16 ans, et dont "aucun mobile" n'a pu être déterminé dans l'immédiat selon le procureur de Nantes Antoine Leroy, a été interpellé peu après les faits au sein de l'établissement et hospitalisé dans une unité psychiatrique.


Attaques de prisons: 22 interpellations dans une vaste opération de police

Le 13 avril à Agen était apparu pour la première fois le tag "DDPF" (Défense des prisonniers français) près de sept voitures incendiées sur le parking de l'Ecole nationale de l'administration pénitentiaire (Enap). (AFP)
Le 13 avril à Agen était apparu pour la première fois le tag "DDPF" (Défense des prisonniers français) près de sept voitures incendiées sur le parking de l'Ecole nationale de l'administration pénitentiaire (Enap). (AFP)
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  • L'opération lancée à 6H00 lundi s'est déroulée en région parisienne, à Marseille, Lyon et Bordeaux, selon une source proche du dossier confirmant des informations de Paris-Match
  • Dans un communiqué, le Parquet national antiterroriste (Pnat), qui s'est saisi du dossier, en raison notamment du caractère coordonné des actions, a ajouté que des perquisitions étaient en cours

PARIS: Quinze jours après les premières attaques mystérieuses de prisons au nom d'un groupe inconnu "DDPF", vingt-deux interpellations ont eu lieu lundi partout en France dans le cadre d'une vaste opération de police.

L'opération lancée à 6H00 lundi s'est déroulée en région parisienne, à Marseille, Lyon et Bordeaux, selon une source proche du dossier confirmant des informations de Paris-Match.

Dans un communiqué, le Parquet national antiterroriste (Pnat), qui s'est saisi du dossier, en raison notamment du caractère coordonné des actions, a ajouté que des perquisitions étaient en cours.

Le Pnat recense une quinzaine de faits entre le 13 et le 21 avril, mais d'autres faits ont visé d'autres établissements pénitentiaires, sans que des "liens" puissent "nécessairement" être établis "à ce stade" avec cette enquête, a précisé le Pnat, qui a été néanmoins avisé par les parquets locaux.

Le coup de filet intervient alors que le Sénat puis l'Assemblée nationale s'apprêtent à voter cette semaine une proposition de loi destinée à renforcer la lutte contre les narcotrafiquants pour une adoption définitive.

Alors que les ministres de l'Intérieur, Bruno Retailleau, et de la Justice, Gérald Darmanin, ont dès le début de ces attaques mystérieuses vu la main des narcotrafiquants, le Pnat et la Junalco (Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée) ont relevé dans leur communiqué commun que les faits étaient "susceptibles de s'inscrire" dans la "très grande criminalité organisée".

Dans un message sur le réseau social X, Bruno Retailleau a salué l'action des "magistrats et des enquêteurs" qui ont "fait preuve d'un grand professionnalisme".

"Merci aux magistrats et aux forces de l'ordre d'avoir procédé tôt ce (lundi) matin à l'interpellation des auteurs présumés des attaques contre les agents pénitentiaires et les prisons de notre pays. Force reste à la loi et à la République dans notre lutte implacable contre le narcotrafic", a écrit sur X Gérald Darmanin.

Groupe inconnu 

Le 13 avril à Agen était apparu pour la première fois le tag "DDPF" (Défense des prisonniers français) près de sept voitures incendiées sur le parking de l'Ecole nationale de l'administration pénitentiaire (Enap).

S'en était suivie une série d'incendies de voitures de personnels pénitentiaires un peu partout en France, des tirs de mortiers d'artifices sur des prisons, voire des tirs de kalachnikov comme à Toulon.

Le Pnat s'est saisi de ces faits, ainsi que des tirs par arme à feu et des jets de deux cocktails Molotov ayant visé le 21 avril un lotissement à Villefontaine (Isère) où résident des agents pénitentiaires, non loin de la prison de Saint-Quentin-Fallavier. Des tags "DDPF" avaient également été retrouvés.

Le Premier ministre, François Bayrou, s'était rendu le surlendemain dans ce centre pénitentiaire, en soutien aux personnels pénitentiaires, accompagné de M. Darmanin et de M. Retailleau.

Il avait également pointé du doigt la criminalité organisée. "Ces attaques montrent que l'action du gouvernement et de l'État touche juste", avait déclaré M. Bayrou devant la presse, en évoquant des "réseaux" qui se "croyaient en situation d'impunité" et "tout d'un coup, voient la perspective de sanctions plus sévères, plus rigoureuses, sans les moyens de continuer à exercer leurs activités néfastes depuis la prison".

Le groupe "DDPF" totalement inconnu avait publié vidéo et menaces sur la messagerie cryptée Telegram, qui les a ensuite supprimés et fermé le canal.

Si le mode opératoire de certains faits porte les marques de la criminalité organisée, d'autres actions faisaient davantage penser à l'ultragauche, avait relevé une source policière, pour qui certains militants ont pu se greffer sur la campagne initiale.

Au cours des deux semaines d'enquête, qui ont mobilisé près de 200 enquêteurs sur l'ensemble du territoire, a précisé le Pnat, 260 scellés ont été analysés par la police scientifique, 10 millions d'identifiants téléphoniques ont été "criblés" et 90 techniques spéciales d'enquête réalisées.


Le meurtrier de la mosquée de La Grand-Combe s'est rendu en Italie

A La Grand-Combe, une marche blanche en souvenir de la victime, Aboubakar Cissé, un Malien d'une vingtaine d'années, avait rassemblé plus d'un millier de personnes dimanche. (AFP)
A La Grand-Combe, une marche blanche en souvenir de la victime, Aboubakar Cissé, un Malien d'une vingtaine d'années, avait rassemblé plus d'un millier de personnes dimanche. (AFP)
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  • Traqué depuis trois jours, le meurtrier d'un jeune Malien dans la mosquée de la petite commune gardoise de La Grand-Combe s'est rendu dans un commissariat du centre de l'Italie
  • Le suspect, "Olivier A.", né à Lyon en 2004 et de nationalité française, "s'est rendu de lui-même dans un commissariat de Pistoia", non loin de Florence

NIMES: Traqué depuis trois jours, le meurtrier d'un jeune Malien dans la mosquée de la petite commune gardoise de La Grand-Combe s'est rendu dans un commissariat du centre de l'Italie, a annoncé lundi à l'AFP le procureur en charge de cette affaire.

Le suspect, "Olivier A.", né à Lyon en 2004 et de nationalité française, "s'est rendu de lui-même dans un commissariat de Pistoia", non loin de Florence, "dimanche vers 23h00", a indiqué lundi à l'AFP le procureur de la République d'Alès, Abdelkrim Grini.

"Complicités" 

Un juge d'instruction "va être saisi" et un mandat d'arrêt européen émis en vue de son transfèrement en France, une procédure qui pourrait prendre "quelques jours ou quelques semaines", a précisé le procureur d'Alès.

"C'est une très grande satisfaction pour le procureur que je suis. Face à l'efficacité et à la détermination des moyens mis en place, l'auteur n'a eu pour seule issue que de se rendre et c'est la meilleure chose qu'il pouvait faire", a-t-il ajouté.

Sur le réseau X, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a félicité "chaleureusement" les "magistrats et les enquêteurs (qui) ont fait preuve d'une grande détermination et d'un grand professionnalisme qui a permis d'obtenir des résultats dans des temps très courts".

Plus de 70 policiers et gendarmes étaient mobilisés depuis vendredi pour "localiser et interpeller" cet homme considéré comme "potentiellement extrêmement dangereux", selon le procureur.

"Après s'être glorifié de son acte, après l'avoir quasiment revendiqué, il avait tenu des propos qui laisseraient penser qu'il entendait commettre encore des faits de même nature", avait-il souligné dimanche.

Dans la vidéo qu'il avait lui-même réalisée vendredi juste après son meurtre, face à sa victime agonisante, le meurtrier se félicitait de son acte et insultait la religion de sa victime: "Je l'ai fait, (...) ton Allah de merde", avait-il répété à deux reprises.

"Je l'ai dit et je le confirme, la piste de l'acte antimusulman et islamophobe est la piste privilégiée", mais le meurtrier avait "peut-être également des motivations de fascination de la mort, d'envie de donner la mort, d'envie aussi d'être considéré comme un tueur en série", a souligné lundi sur BFMTV M. Grini.

Au passage, il a révélé que les enquêteurs savaient "déjà depuis ce week-end" que le meurtrier avait quitté la France et s'était rendu en Italie, et que, pour ce faire, il a "manifestement bénéficié de complicités".

"Il a été certainement pris en charge par certaines personnes. Est-ce que ce sont des membres de sa famille ? Est-ce que ce sont des amis, pour le moment nous ne savons pas", a-t-il ajouté, en expliquant qu'une des tâches du magistrat instructeur sera plus largement de "déterminer s'il a bénéficié de complicités ou pas".

"Sous les radars de la justice" 

Les éléments officiellement communiqués jusque là sur le suspect étaient restés peu nombreux: "Olivier A." est issu d'une famille bosnienne, sans emploi, avec des attaches dans le Gard.

"C'est quelqu'un qui était resté sous les radars de la justice et des services de police et qui, à aucun moment, n'avait fait parler de lui jusqu'à ces tragiques événements", avait expliqué dimanche M. Grini.

A La Grand-Combe, une marche blanche en souvenir de la victime, Aboubakar Cissé, un Malien d'une vingtaine d'années, avait rassemblé plus d'un millier de personnes dimanche.

Parmi eux, Abdallah Zekri, recteur de la mosquée de la Paix à Nîmes, n'avait pas caché son "sentiment de colère et de haine à l'égard de ceux qui ont commis ce crime", dénonçant un climat islamophobe.

Plusieurs centaines de personnes s'étaient également rassemblées en début de soirée à Paris, dont le leader de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon, qui avait accusé le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau de cultiver un "climat islamophobe".

"Le racisme et la haine en raison de la religion n'auront jamais leur place en France", avait assuré dimanche après-midi le président Emmanuel Macron, en adressant "le soutien de la Nation" à la famille de la victime et "à nos compatriotes de confession musulmane".