UVALDE: Des dizaines de personnes ont afflué mercredi dans une petite église à Uvalde au Texas pour rendre hommage aux 19 enfants et deux enseignants abattus la veille par un adolescent déséquilibré dans une école primaire.
Aida Hernandez pleure à la sortie du lieu de culte, baptisé Sacred Heart Church, un simple bâtiment de briques grises, près de l'artère principale d'Uvalde.
"J'ai ressenti de l'horreur et de la douleur. Je connaissais les victimes. Je suis encore sous le choc", dit cette professeure âgée d'une soixantaine d'années, qui a enseigné dans l'établissement visé jusqu'à son départ à la retraite, il y a deux ans.
La ville de 15 000 habitants, située à 80km de la frontière mexicaine, était il y a encore vingt-quatre heures une petite localité sans histoire, comme il en existe tant aux Etats-Unis, avec ses rues perpendiculaires et parallèles parsemées de centres commerciaux, stations-services et chaîne de restauration rapide.
Mais mardi, à la mi-journée cette tranquillité a volé en éclats lorsque Salvador Ramos, 18 ans, a fait irruption dans l'école primaire Robb avec un fusil d'assaut, s'est barricadé dans une salle de classe et a commencé à tirer sur des élèves, âgés de 9 à 10 ans, et deux enseignants présents, avant d'être abattu par la police.
Ce massacre, l'un des pires de ces dernières années dans le pays, a provoqué l'incompréhension et la colère des habitants.
"Quand vous enseignez dans une classe, c'est votre travail de protéger les élèves, et ils ont fait bien plus que ce qu'on attendait d'eux", lance Mme Hernandez au sujet des deux professeurs décédés.
Une arme extrêmement létale utilisée
Salvador Ramos, était équipé d'une variante civile d'un fusil d'assaut militaire conçu pour faire le plus de victimes possible en un temps record.
Connu aux Etats-Unis sous le nom d'"AR-15", il s'agit d'un fusil semi-automatique décliné dans de multiples versions. Sa désignation militaire est "M16", qui peut lui être déchargé en mode automatique.
Mardi à Uvalde, Salvador Ramos est parvenu à tuer 19 écoliers et deux enseignants, alors même que la police était sur place.
Mais, avant lui, les AR-15, en vente libre, avaient déjà tristement prouvé leur efficacité dans la litanie des fusillades qui endeuillent l'Amérique.
"Il n'existe pas de différence importante entre (ces fusils) et des armes militaires", souligne le Violence Policy Center, un centre d'études spécialisé.
Que ce soit à l'occasion de la tuerie perpétrée en juillet 2012 dans un cinéma du Colorado (82 victimes, dont 12 morts), le carnage cinq mois plus tard dans une école primaire du Connecticut (26 morts, dont 20 enfants) ou l'attentat jihadiste en décembre 2015 à San Bernardino en Californie (36 personnes fauchées dont 14 décédées), on retrouve ces fusils légers, dotés de chargeurs à grande capacité (jusqu'à 30 balles, voire davantage).
«Trop de fois»
A quelques mètres de là, Rosie Buantel, en a assez des fusillades à répétition aux Etats-Unis. "Je suis triste et en colère contre notre gouvernement qui n'en fait pas assez pour limiter l'accès aux armes", explique cette cinquantenaire à la sortie de la messe.
"Nous avons vécu cela trop de fois, et rien n'est fait. Ils sont toujours en train de débattre", assène-t-elle.
Eddie, un résident d'Uvalde qui refuse de donner son nom de famille, est aussi indigné.
"Je suis venu rendre hommage (aux victimes) et aussi mettre la pression pour un changement de législation, afin que les armes ne tombent pas dans les mains d'enfants", dit-il tout en déposant une gerbe de fleurs près de l'école Robb, encore cernée par la police.
Les habitants traumatisés se sont aussi réunis dans un centre municipal où ils peuvent recevoir une aide psychologique.
Mardi, les familles et amis des victimes de l'attaque avaient dû attendre des heures pour avoir des nouvelles de leurs proches.
Iveth Pacheco, psychologue bénévole, a fait 120 km depuis San Antonio pour apporter son soutien aux résidents d'Uvalde.
"C'est l'une de ces situations où vous devez simplement être présent", explique-t-elle. "Vous devez être préparé pour n'importe quelle question que peut avoir un enfant et c'est la même chose pour les adultes."