MARIGNANE: Marine Le Pen, tentée de quitter la tête du Rassemblement national et discrète jusqu'à présent dans la campagne, a assuré mardi "être bien là" pour la bataille des législatives, notamment dans le Sud où Eric Zemmour lui fait concurrence.
"Je suis là, je suis bien là. Je mène la bataille des législatives", a assuré sur le marché de Marignane (Bouches-du-Rhône) l'ancienne prétendante d'extrême droite à l'Elysée, qui a réuni 41,5% des voix au second tour de la présidentielle, un record.
Venue lundi et mardi soutenir les 16 candidats RN des Bouches-du-Rhône, département qui abrite la plus grosse fédération du parti, la cheffe de file du RN a confié au quotidien La Provence vouloir prendre "du recul".
Elle songe ainsi à quitter la tête du parti pour "mettre (son) énergie" dans la présidence du groupe des députés RN, a-t-elle expliqué lors d'un point presse. Il faut 15 élus pour constituer un groupe.
Dans la 12e circonscription de Vitrolles où elle a fait 60% à la présidentielle, elle espère tout particulièrement conjurer la malédiction et faire élire son conseiller Franck Allisio.
Ni Jean-Pierre Stirbois, l'ancien bras droit de son père Jean-Marie Le Pen, ni Bruno Mégret, le "félon", ni l'eurodéputé RN Jean-Lin Lacapelle n'ont réussi à s'y faire élire député.
«Déloger»
A Marignane, c'est le député sortant de droite Eric Diard, croisé sur le marché, qu'elle cible: "Je viens te déloger", lance-t-elle, l'accusant d'être un "demi-macroniste" puisque LREM ne présente aucun candidat face à lui.
Pas de déplacement en revanche pour soutenir le candidat RN de la 4e circonscription du Var où se présente son grand rival Eric Zemmour, fort d'un de ses meilleurs scores à la présidentielle (14,7%, contre 7% au niveau national).
Marine Le Pen a délégué cette tâche à son fidèle lieutenant, Jordan Bardella, chef par intérim du RN et membre de cette "nouvelle élite" du parti qu'elle veut faire émerger à l'occasion du 50e anniversaire du parti à l'automne.
Elle a déjà suggéré que son poulain pourrait être un jour candidat à l'Elysée.
S'abstenant de monter en première ligne, elle considère surtout qu'Emmanuel Macron gagnera les législatives des 12 et 19 juin et cherche à préserver son rôle de première opposante au chef de l'Etat.
"Je ne pars pas perdante, je pars en disant la vérité aux Français", se défend-t-elle, considérant que son rival de gauche Jean-Luc Mélenchon "ment" quand il prétend pouvoir obtenir une majorité et devenir Premier ministre.
Une attitude qui a l'inconvénient d'être "peu mobilisatrice", analyse Brice Teinturier, directeur général délégué d'Ipsos, dans le Monde.
«Plus dur»
Si "certains (au RN) sont pessimistes", "ils ne sabotent pas pour autant" la campagne. Simplement "ils ne proposent rien pour gagner" car "ils trouvent que c'est trop dur", rapporte un cadre.
"Il faut être plus dur" et "ne plus laisser cette droite molle comme du beurre" se faire élire, suggère sur le marché Jean-François, un ancien parachutiste de 74 ans, qui craint d'être "dirigé par l'extrême gauche et des musulmans".
A la présidentielle de 2017, Marine Le Pen avait obtenu 34% des voix au second tour mais seulement 8 sièges aux législatives.
Cette fois, le RN est crédité de 21% d'intentions de vote, selon Ipsos, mais il pourrait remporter 20 à 45 sièges.
Pour Brice Teinturier, Marine Le Pen est "très absente" alors que son électorat a besoin d'une "incarnation forte", pendant que M. Macron bénéficie de son statut de président et que M. Mélenchon suscite une dynamique avec son union des gauche (Nupes).
A l'inverse de la gauche, Marine Le Pen ne s'est pas alliée avec Reconquête!, le parti d'Eric Zemmour, un refus désapprouvé par 42% de ses électeurs.
De quoi aussi provoquer des turbulences localement. Dans les Alpes-Maritimes, le RN a refusé d'investir l'ex-identitaire Philippe Vardon, qui s'est finalement maintenu, en s'alliant avec Reconquête!.