BANGKOK: Bangkok élit ce dimanche son gouverneur, premier grand scrutin depuis les manifestations pro-démocratie qui ont secoué la Thaïlande en 2020 pour réclamer des réformes de la monarchie et de la société.
La dernière élection de ce type dans la métropole remonte à 2013.
Un an plus tard, le chef des armées, Prayut Chan-O-Cha, prenait le pouvoir dans le royaume à la faveur d'un coup d’État, évinçait le gouverneur et nommait un de ses hommes à sa place.
Le scrutin, à un tour, est un test pour le général putschiste, légitimé par des législatives controversées en 2019 et impopulaire auprès d'une jeunesse avide de liberté. Il achève son mandat en mars prochain, des élections générales doivent donc se tenir d'ici là.
Durant la campagne, les principaux prétendants se sont concentrés sur les préoccupations quotidiennes des Bangkokiens, promettant de rendre plus agréable à vivre la mégalopole ultra-polluée et embouteillée de quelque 10 millions d'habitants.
Beaucoup restent sceptiques. "Je ne suis pas enthousiasmé par les élections. Elles ne changeront guère la ville", relève à l'AFP Nat, 28 ans, après avoir déposé son bulletin dans l'urne.
4,4 millions de Bangkokiens sont appelées à voter, dont quelque 700.000 primo-votants qui pourraient se porter en nombre sur des candidats opposés au gouvernement.
Depuis les coups d'État de 2006 et 2014, la politique thaïlandaise est polarisée entre les partis pro et anti-armée.
La trentaine de prétendants pour diriger la capitale, un record, reflètent ce schisme.
Aswin Kwanmuang, installé par Prayut Chan-O-Cha dans le fauteuil de gouverneur en 2016, est candidat.
Face à lui, Chadchart Sittipunt, fait figure de favori.
Il se présente sans étiquette, mais a longtemps été une figure majeure du Pheu Thai, le parti d'opposition de l'ex-Premier ministre Thaksin Shinawatra. Et comme le Pheu Thai ne présente aucun candidat, certains observateurs doutent de sa réelle indépendance.
La mégalopole est très différente de la majeure partie du royaume, plus pauvre, plus agricole et moins éduqué.
Mais pour Thitinan Pongsudhirak, professeur de sciences politiques à l'Université Chulalongkorn de Bangkok, "le choix du gouverneur sera un baromètre intéressant pour les futures élections générales" vu le contexte des dernières années.
En 2020, d'importantes manifestations pro-démocratie ont secoué le royaume, les contestataires demandant la démission du Premier ministre, la réécriture de la Constitution jugée trop favorable à l'armée et une réforme en profondeur de la toute puissante monarchie, un sujet tabou jusque-là.
Les résultats de l'élection du gouverneur pourraient tomber dimanche soir et devront être ratifiés par la commission électorale.