Au plus grand marché aux oiseaux d'Afghanistan, on craint que le chant du cygne ne soit proche

Un homme assis à côté d'une cage de perdrix dans une échoppe du marché aux oiseaux de Ka Faroshi à Kaboul, en Afghanistan, le 18 janvier 2018 (Photo, Reuters).
Un homme assis à côté d'une cage de perdrix dans une échoppe du marché aux oiseaux de Ka Faroshi à Kaboul, en Afghanistan, le 18 janvier 2018 (Photo, Reuters).
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Publié le Samedi 21 mai 2022

Au plus grand marché aux oiseaux d'Afghanistan, on craint que le chant du cygne ne soit proche

  • Kah Faroshi, qui est également le plus ancien marché de ce type à Kaboul, vend des milliers d'espèces d’oiseaux du monde entier
  • Peu d'Afghans peuvent désormais s'offrir le passe-temps traditionnel de combats d’oiseaux

KABOUL: Mohammad Zahir était assis seul dans sa boutique du marché Kah Faroshi au cœur de la vieille ville de Kaboul, entouré de perroquets, de perdrix, de cailles et d’autres oiseaux qui autrefois attiraient les foules.

Il n'y a pas si longtemps, les visiteurs se pressaient dans le plus ancien marché aux oiseaux de la capitale afghane, où s’enfoncer dans les ruelles étroites et encombrées ressemblait à un voyage de deux siècles en arrière, dans les recoins de la ville épargnés par la guerre.

Mais aujourd’hui, ces visiteurs sont partis, car rares sont ceux qui peuvent désormais s'offrir le passe-temps traditionnel de combats d’oiseaux ou se permettre de posséder des oiseaux chanteurs comme animaux de compagnie.

Pour Zahir, qui dans les temps heureux gagnait jusqu'à 70 dollars par jour, les affaires se sont quasiment taries.

«Il m’arrive de ne réaliser aucune vente pendant plusieurs jours», a-t-il confié à Arab News.

Une Afghane se tenant devant une échoppe du marché aux oiseaux de Kah Faroshi à Kaboul, en Afghanistan, le 18 janvier 2018 (Photo, Reuters).

«Je suis gêné quand des mendiants viennent à ma porte et demandent de l'aide. Je ne peux rien leur donner parce que je ne gagne pas d'argent.»

L’homme âgé de 53 ans — ancien membre de l'équipe nationale de football — a commencé à travailler au marché sous le premier régime taliban, au pouvoir de 1996 à 2001. Il raconte qu'il avait même été brièvement emprisonné quand ils gouvernaient le pays pour avoir contrevenu à l'interdiction des combats d'oiseaux, un ancien sport afghan.

Étant donné que les talibans ont repris le contrôle de l'Afghanistan l'année dernière, ce n'est pas la perspective d’une réimposition de l'interdiction qui nuit à ses ventes, a précisé Zahir, mais la crise financière, conséquence des sanctions internationales imposées au pays depuis leur retour.

«Les talibans ne mangent personne», a-t-il affirmé.

«Ce sont les difficultés économiques qui empêchent les gens de continuer à pratiquer leur passe-temps habituel.»

Kah Faroshi, qui est également le plus grand marché aux oiseaux du pays, vend des milliers d'espèces d'oiseaux du monde entier, dont le prix peut varier entre un et 1 000 dollars.

Avant la prise de contrôle par les talibans à la mi-août, il voyait venir des visiteurs de tout le pays, ainsi que des étrangers pour qui c'était une attraction touristique haute en couleurs et un arrière-plan parfait pour les publications sur les réseaux sociaux.

«Nous réalisions de bonnes ventes tous les jours avant que la situation économique ne s'aggrave», a indiqué Mohammad Shafi, un autre vendeur.

«Maintenant, il nous arrive certains jours de ne faire aucune vente.»

L'avenir du marché, qui a survécu à tous les gouvernements afghans, est désormais incertain.

Pour Mohammed Marouf, qui vend des oiseaux depuis près de six décennies, sa disparition mettrait fin à l'espoir de voir revenir les beaux jours.

«J'avais sept ans quand j'ai commencé à travailler dans cette boutique avec mon père», a-t-il confié.

«J'avais la vie la plus aisée du vieux Kaboul.»

Ses ventes ont déjà été touchées par la crise économique, mais ses principaux clients — des hommes qui achètent des cailles, des perdrix, des coqs et des canaris pour les combats — lui permettent encore de se maintenir à flot.

Si une interdiction de ce sport entre en vigueur, il sait que son commerce, dans lequel il fait déjà travailler ses trois fils, pourrait pratiquement disparaître.

«Nous continuerons jusqu'à ce que ce soit interdit», a-t-il affirmé en inspectant de près le bec d'une caille. «Le jour où ce sera interdit, ce sera interdit.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Confisquer les avoirs gelés russes pourrait dissuader les investisseurs en Europe, prévient le ministre français Haddad

Sur cette photo prise et diffusée par le service de presse présidentiel ukrainien le 24 février 2025, le ministre délégué français pour l'Europe Benjamin Haddad participe à une réunion avec les dirigeants européens et le premier ministre canadien Justin Trudeau à Kiev, à l'occasion du troisième anniversaire de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. (Photo by Handout / UKRAINIAN PRESIDENTIAL PRESS SERVICE / AFP)
Sur cette photo prise et diffusée par le service de presse présidentiel ukrainien le 24 février 2025, le ministre délégué français pour l'Europe Benjamin Haddad participe à une réunion avec les dirigeants européens et le premier ministre canadien Justin Trudeau à Kiev, à l'occasion du troisième anniversaire de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. (Photo by Handout / UKRAINIAN PRESIDENTIAL PRESS SERVICE / AFP)
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  • « On a toujours dit que ça faisait partie des leviers dont on disposait dans le rapport de force avec la Russie », a-t-il déclaré. « Ça pose tout de même des questions juridiques et des questions de précédent économique, de messages envoyés aux investisse
  • En revanche, l'option d'une saisie des avoirs russes eux-mêmes a jusqu'ici été écartée, essentiellement pour des raisons d'ordre juridique.

PARIS : Saisir les avoirs gelés de la Russie en Europe pourrait créer « un précédent économique » et rendre méfiants les investisseurs, a souligné mardi le ministre délégué aux affaires européennes, Benjamin Haddad, sur la chaîne de télévision France 2, au moment où des parlementaires demandent leur confiscation pour aider l'Ukraine.

Les pays de l'Union européenne utilisent déjà les profits dégagés par les avoirs russes gelés afin d'aider à armer l'Ukraine et à financer sa reconstruction après-guerre, ce qui représente une manne de 2,5 à 3 milliards d'euros par an.

En revanche, l'option d'une saisie des avoirs russes eux-mêmes a jusqu'ici été écartée, essentiellement pour des raisons d'ordre juridique.

Lors d'un débat à l'Assemblée nationale française lundi, des parlementaires, dont l'ancien Premier ministre Gabriel Attal, ont exprimé leur soutien à une confiscation. Le chef de la diplomatie Jean-Noël Barrot a rejeté cette proposition, évoquant « un risque financier trop important ».

Mardi, Benjamin Haddad est revenu sur ce risque financier lors d'un entretien sur France 2.

« On a toujours dit que ça faisait partie des leviers dont on disposait dans le rapport de force avec la Russie », a-t-il déclaré. « Ça pose tout de même des questions juridiques et des questions de précédent économique, de messages envoyés aux investisseurs », a-t-il ajouté.

« Mais ça fait partie des leviers qu'on peut effectivement regarder », a-t-il estimé.

« Nous avons assis, sur le fondement des revenus tirés des actifs russes gelés, ce prêt de 45 milliards d'euros qui d'ores et déjà parvient jusqu'à l'Ukraine, alors que la confiscation pure et simple de ces actifs représenterait pour la zone euro, pour la Banque centrale européenne, un risque financier trop important qui fragiliserait les États membres au moment où ils doivent être le plus fort possible pour soutenir l'Ukraine », avait pour sa part déclaré le ministre des Affaires étrangères lundi soir dans une réponse aux parlementaires.

En décembre dernier, la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, avait elle-même plaidé pour utiliser directement les avoirs russes gelés et non plus seulement les intérêts qu'ils génèrent, afin d'aider l'Ukraine, dans une interview à plusieurs journaux, dont The Guardian. 


Ukraine : Zelensky juge qu'une trêve « sans garanties » serait un « échec »

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky se prépare à une réunion plénière lors d'un sommet organisé à Lancaster House, dans le centre de Londres, le 2 mars 2025. (Photo JUSTIN TALLIS / AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky se prépare à une réunion plénière lors d'un sommet organisé à Lancaster House, dans le centre de Londres, le 2 mars 2025. (Photo JUSTIN TALLIS / AFP)
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  • « Ce sera un échec pour tout le monde si l'Ukraine est forcée à un cessez-le-feu sans de sérieuses garanties de sécurité », a-t-il déclaré devant la presse à Londres.
  • Le chef d’État, qui recherche des garanties de sécurité pour son pays dans le cas d'un cessez-le-feu, a rappelé avoir déjà offert sa démission en échange d'une adhésion de l'Ukraine à l'Otan.

LONDRES : Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé dimanche que tout cessez-le-feu en Ukraine serait voué à l'échec si des « garanties de sécurité » n'étaient pas en place pour éviter une reprise des hostilités.

« Ce sera un échec pour tout le monde si l'Ukraine est forcée à un cessez-le-feu sans de sérieuses garanties de sécurité », a-t-il déclaré devant la presse à Londres.

« Imaginons qu'après une potentielle trêve, les Russes recommencent à nous tuer et que nous ripostions, ce qui serait totalement compréhensible. Qu'est-ce qui se passera ? » a-t-il poursuivi.

Il a évoqué le cessez-le-feu en vigueur dans l'est de l'Ukraine entre 2015 et l'invasion russe de février 2022 comme exemple.

« Les Russes diront la même chose qu'il y a 10 ans, que ce sont les Ukrainiens qui ont violé le cessez-le-feu. Nous fournirons la preuve que c'était eux. Et qui bénéficiera de cela ? Les Russes, et absolument pas nous, pas les États-Unis, pas le président américain, ni nos collègues européens. »

Par ailleurs, il a estimé qu'il ne serait « pas si facile » de le remplacer à la tête de l’État ukrainien.

Pour se débarrasser de lui comme le souhaite le Kremlin, « il ne s'agirait pas juste d'organiser des élections. Il faudrait aussi m'empêcher de me présenter, ce qui serait un peu plus compliqué ».

Le chef d’État, qui recherche des garanties de sécurité pour son pays dans le cas d'un cessez-le-feu, a rappelé avoir déjà offert sa démission en échange d'une adhésion de l'Ukraine à l'Otan.

« S'il y a l'Otan et la fin de la guerre, cela signifiera que j'ai accompli ma mission », a-t-il rappelé dimanche soir.

M. Zelensky a participé dimanche à Londres à une réunion avec les alliés de l'Ukraine, deux jours après une altercation en direct avec Donald Trump à la Maison Blanche.

Washington, qui a entamé des négociations avec la Russie sans y associer ni l'Ukraine ni l'Europe, reproche au dirigeant ukrainien de ne pas accepter un cessez-le-feu inconditionnel.

Dimanche encore, le conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, Mike Waltz, a martelé que les États-Unis avaient « besoin d'un dirigeant qui peut traiter avec nous, traiter avec les Russes à un moment et mettre fin à cette guerre ».


Iran : le Parlement révoque le ministre de l'Économie

Le ministre iranien des finances, Abdolnaser Hemmati, prononce un discours devant les membres du parlement à Téhéran, le 2 mars 2025, au cours de la procédure de destitution dont il fait l'objet. (Photo ATTA KENARE / AFP)
Le ministre iranien des finances, Abdolnaser Hemmati, prononce un discours devant les membres du parlement à Téhéran, le 2 mars 2025, au cours de la procédure de destitution dont il fait l'objet. (Photo ATTA KENARE / AFP)
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  • À l'issue d'un vote, « 182 députés sur 273 » se sont prononcés « pour la révocation » du ministre, a indiqué le président du Parlement iranien, Mohammad-Bagher Ghalibaf, lors d'une retransmission à la télévision d'État.
  • Il s'agit de la seconde fois depuis 2018 qu'un ministre de l'Économie est démis de ses fonctions par le Parlement.

TEHERAN : Le Parlement iranien a révoqué dimanche le ministre de l'Économie lors d'une motion de censure, dans un contexte de forte dépréciation de la monnaie nationale face au dollar et d'une inflation galopante qui étrangle les ménages.

Le ministre de l'Économie et des Finances, Abdolnasser Hemmati, en poste depuis août et tenu responsable de la rapide dégradation de la conjoncture, était visé depuis mercredi par une procédure destinée à le démettre de ses fonctions.

À l'issue d'un vote, « 182 députés sur 273 » se sont prononcés « pour la révocation » du ministre, a indiqué le président du Parlement iranien, Mohammad-Bagher Ghalibaf, lors d'une retransmission à la télévision d'État.

Il s'agit de la seconde fois depuis 2018 qu'un ministre de l'Économie est démis de ses fonctions par le Parlement.

Les députés opposés au limogeage de M. Hemmati ont notamment fait valoir que la décision, qui intervient à la veille du Nouvel An persan (20 mars), déstabiliserait encore plus le marché.

Les congés de Norouz, équivalent aux fêtes de Noël et du Nouvel An en Occident, mettent chaque année le pays à l'arrêt.

Dans une ambiance quelque peu houleuse, des députés ont multiplié à tour de rôle, dimanche, leurs reproches à l'encontre du ministre de l'Économie.

- « Plus les moyens » -

« La population ne peut supporter une nouvelle vague d'inflation et la hausse du prix des devises étrangères », qui renchérit le coût des importations, a fustigé l'un d'eux, Rouhollah Motefakker-Azad.

De son côté, une députée, Fatemeh Mohammadbeigi, s'est emportée : « Les gens n'ont même plus les moyens d'acheter des médicaments. »

« Le plus gros problème pour l'économie est l'inflation. Elle est chronique et touche l'économie depuis des années », s'est défendu le ministre Abdolnasser Hemmati, qui a été un temps gouverneur de la Banque centrale.

Depuis 2019, l'inflation en Iran est supérieure à 30 % par an, selon les chiffres de la Banque mondiale.

Elle a atteint 44,5 % en 2023, d'après cette institution qui a son siège à Washington. Le chiffre pour l'année dernière n'est pas connu.

La dépréciation de la monnaie iranienne, le rial, s'est quant à elle intensifiée depuis la chute en décembre du président syrien Bachar al-Assad, dont l'Iran était le principal allié.

Elle s'est encore accélérée depuis le retour, en janvier, à la Maison Blanche du président américain Donald Trump, dont le premier mandat avait été marqué en 2018 par le retrait unilatéral d'un accord international avec Téhéran sur son programme nucléaire et la réimposition de sanctions.

Dimanche à Téhéran, un dollar s'échangeait au marché noir contre plus de 920 000 rials, proche d'un record absolu, selon l'un des sites de référence pour le suivi des changes, AlanChand.

Le taux était d'environ 600 000 rials pour un dollar en juillet, lorsque Massoud Pezeshkian a pris ses fonctions, avec pour ambition de raviver l'économie et de négocier avec les pays occidentaux la levée d'une partie des sanctions.

- « En guerre » -

Massoud Pezeshkian a tenté de défendre son ministre de l'Économie devant les députés.

« Nous sommes en pleine guerre (économique) avec l'ennemi », a affirmé M. Pezeshkian, qui la veille a attribué les difficultés aux « sanctions » réimposées par les États-Unis.

« On ne peut pas rejeter la responsabilité des problèmes sur une seule personne », a-t-il argué.

Le président a par ailleurs écarté dimanche tout contact avec Washington pour relancer l'économie.

« Je crois personnellement au dialogue et je continue à y croire », a-t-il souligné, « mais nous suivrons jusqu'au bout la position du guide suprême à l'égard de l'Amérique ».

L'ayatollah Ali Khamenei, plus haut personnage de l'État, a exhorté début février le gouvernement à « ne pas négocier » avec le président américain.

Selon la Constitution iranienne, toute sanction prend effet immédiatement et une personne chargée de l'intérim doit être désignée pour remplacer le ministre déchu.

Le gouvernement aura ensuite trois mois pour présenter un remplaçant, dont la nomination devra être entérinée par un autre vote au Parlement.

En avril 2023, les députés s'étaient prononcés pour la destitution du ministre de l'Industrie de l'époque, Reza Fatemi Amin, en raison d'une flambée des prix liée aux sanctions internationales.