L'Europe et Berlin, premier acte à l'international de Macron II

Le président français Emmanuel Macron se rendra lundi à Berlin pour y rencontrer le chancelier Olaf Scholz (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron se rendra lundi à Berlin pour y rencontrer le chancelier Olaf Scholz (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 05 mai 2022

L'Europe et Berlin, premier acte à l'international de Macron II

  • Avec le chancelier Olaf Scholz, Emmanuel Macron abordera «les questions liées à la guerre en Ukraine» et à la «souveraineté européenne»
  • Emmanuel Macron arrivera à Berlin après avoir participé à la Journée de l'Europe, au Parlement européen à Strasbourg

PARIS : Emmanuel Macron effectuera lundi à Berlin son premier déplacement international depuis sa réélection afin de marquer la "force du couple franco-allemand" en Europe, confrontée avec le conflit en Ukraine à la plus grande secousse géopolitique de l'après-Guerre froide.

Ce voyage hautement symbolique interviendra dans la foulée de la cérémonie d'investiture samedi et d'un discours lundi à Strasbourg en clôture de la Conférence sur l'Avenir de l'Europe.

La séquence, qui coïncide avec la Journée de l'Europe, au moment où la France assure la présidence tournante de l'UE, sera aussi la réponse européenne au grand défilé militaire organisé le même jour à Moscou pour célébrer la victoire sur l'Allemagne nazie en 1945 et revendiquer de premiers succès en Ukraine.

Avec le chancelier Olaf Scholz, Emmanuel Macron abordera "les questions liées à la guerre en Ukraine" et à la "souveraineté européenne", de la défense à l'énergie, a précisé jeudi l'Elysée.

Autant de sujets sur lesquels le Français, fervent partisan de la cause européenne, est aux avant-postes. 

"La symbolique de ce voyage, c'est la continuité des relations particulières avec l'Allemagne. Elle montre que Berlin reste le premier partenaire de la France", relève le directeur de l'Institut franco-allemand de Ludwigsburg, Frank Baasner.

Depuis Nicolas Sarkozy en 2007, les présidents français effectuent traditionnellement leur premier déplacement à Berlin, et réciproquement à Paris pour les chanceliers allemands. La situation est plus inédite pour un président réélu, un première depuis Jacques Chirac en 2002.

«Pas une feuille de papier à cigarette»

Mais les défis à relever sont nombreux depuis le début de l'offensive russe en Ukraine qui percute de plein fouet des économies européennes.   

Dans un tel contexte, "il devenait encore plus urgent de montrer qu'il n'y a pas une feuille de papier à cigarettes entre les deux pays, qu'ils sont toujours disposés, volontaires pour travailler ensemble", considère Hélène Miard-Delacroix, spécialiste des relations franco-allemandes à l'université de la Sorbonne à Paris.

"Ce n'est pas la même chose de se passer un coup de fil et de se réunir autour d'une table. Ca donne plus de poids, d'épaisseur aux choses qu'on se dit", souligne-t-elle également.

Le chancelier, très critiqué pour avoir tardé à livrer des armes lourdes à l'Ukraine et s'être opposé à un arrêt immédiat des importations de gaz et pétrole russes, dont l'Allemagne est très dépendante, est aussi dans la tourmente.

"Il a besoin de Macron parce que Macron est populaire en Allemagne", estime Frank Baasner. "Nous on voulait toujours Macron quand on avait (la chancelière Angela) Merkel et les Français voulaient Merkel quand ils avaient Macron", s'amuse-t-il.

"Il peut difficilement aller tout seul à Kiev", renchérit Hans Stark, expert à l'Institut français de relations internationales (Ifri).

Le président Macron ne se rendra en Ukraine que si une telle visite apporte des "résultats utiles", souligne-t-on à Paris. Un déplacement conjoint n'est "pas à l'étude".  

«Voiture au garage»

Côté bilatéral, les planètes sont de nouveau alignées. La coalition gouvernementale allemande (Sociaux-démocrates, Verts et Libéraux) s'est dotée d'une feuille de route européenne ambitieuse, qui rejoint celle formulée par Emmanuel Macron dans son discours de La Sorbonne en 2017.

Le "moteur" franco-allemand reste une réalité dans la construction européenne même s'il avait perdu de sa vigueur durant le règne d'Angela Merkel (2005-2021), notent les experts interrogés.

"Madame Merkel était bonne dans la gestion de crise quand il y avait une contrainte extérieure très forte. Mais elle n'a pas été une force d'entraînement dans l'intégration européenne", observe Frank Baasner.

"Le moteur était un peu à l'arrêt parce que la voiture était au garage. Il y a une volonté de le redémarrer", dit-il.

Avec le choc de la guerre en Ukraine, beaucoup de responsables allemands sont "convaincus que Berlin doit éviter, comme ce fut le cas en 2017, de procrastiner" sur l'Europe, analyse l'ancien diplomate Bernard Chappedelaine dans une note d'analyse de l'Institut Montaigne à Paris.

"Le chancelier allemand doit maintenant saisir l'opportunité que représente la victoire de Macron. Le président français a besoin de soutien dans sa mission européenne", écrivait l'hedomadaire allemand Focus au lendemain de sa réélection le 24 avril.


Paris entend résoudre les tensions avec Alger « sans aucune faiblesse »

le chef de la diplomatie française, chef de la diplomatie française (Photo AFP)
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  • Le chef de la diplomatie française a assuré mardi que Paris entendait résoudre les tensions avec Alger « avec exigence et sans aucune faiblesse ».
  • « L'échange entre le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) et son homologue algérien (Abdelmadjid Tebboune) a ouvert un espace diplomatique qui peut nous permettre d'avancer vers une résolution de la crise », a-t-il ajouté.

PARIS : Le chef de la diplomatie française a assuré mardi que Paris entendait résoudre les tensions avec Alger « avec exigence et sans aucune faiblesse ». Il s'exprimait au lendemain d'un entretien entre les présidents français et algérien, qui visait à renouer le dialogue après huit mois de crise diplomatique sans précédent.

« Les tensions entre la France et l'Algérie, dont nous ne sommes pas à l'origine, ne sont dans l'intérêt de personne, ni de la France, ni de l'Algérie. Nous voulons les résoudre avec exigence et sans aucune faiblesse », a déclaré Jle chef de la diplomatie française devant l'Assemblée nationale, soulignant que « le dialogue et la fermeté ne sont en aucun cas contradictoires ».

« L'échange entre le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) et son homologue algérien (Abdelmadjid Tebboune) a ouvert un espace diplomatique qui peut nous permettre d'avancer vers une résolution de la crise », a-t-il ajouté.

Les Français « ont droit à des résultats, notamment en matière de coopération migratoire, de coopération en matière de renseignement, de lutte contre le terrorisme et au sujet bien évidemment de la détention sans fondement de notre compatriote Boualem Sansal », a affirmé le ministre en référence à l'écrivain franco-algérien condamné jeudi à cinq ans de prison ferme par un tribunal algérien. 


Algérie: Macron réunit ses ministres-clés au lendemain de la relance du dialogue

Emmanuel Macron, président français (Photo AFP)
Emmanuel Macron, président français (Photo AFP)
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  • Emmanuel Macron  réunit mardi plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, dont Bruno Retailleau, Gérald Darmanin et Jean-Noël Barrot, au lendemain de l'appel avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune
  • Le président français a décidé, à la suite de ce coup de fil, de dépêcher le 6 avril à Alger le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot afin de « donner rapidement » un nouvel élan aux relations bilatérales.

PARIS : Emmanuel Macron  réunit mardi à 18H00 plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, dont Bruno Retailleau, Gérald Darmanin et Jean-Noël Barrot, au lendemain de l'appel avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune pour relancer le dialogue, a appris l'AFP de sources au sein de l'exécutif.

Le président français a décidé, à la suite de ce coup de fil, de dépêcher le 6 avril à Alger le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot afin de « donner rapidement » un nouvel élan aux relations bilatérales après des mois de crise, selon le communiqué conjoint publié lundi soir.

Le ministre français de la Justice, Gérald Darmanin, effectuera de même une visite prochainement pour relancer la coopération judiciaire.

Le communiqué ne mentionne pas en revanche le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, figure du parti de droite Les Républicains, partisan d'une ligne dure à l'égard de l'Algérie ces derniers mois, notamment pour obtenir une nette augmentation des réadmissions par le pays de ressortissants algériens que la France souhaite expulser.

Bruno Retailleau sera présent à cette réunion à l'Élysée, avec ses deux collègues Barrot et Darmanin, ainsi que la ministre de la Culture, Rachida Dati, et celui de l'Économie, Éric Lombard, ont rapporté des sources au sein de l'exécutif.

 Dans l'entourage du ministre de l'Intérieur, on affirme à l'AFP que si la relance des relations décidée par les deux présidents devait bien aboutir à une reprise des réadmissions, ce serait à mettre au crédit de la « riposte graduée » et du « rapport de force » prônés par Bruno Retailleau. 


Algérie: la relance de la relation décriée par la droite

Cette photo prise le 25 août 2022 montre les drapeaux français et algérien avant l'arrivée du président français à Alger pour une visite officielle  afin d'aider à rétablir les liens avec l'ancienne colonie française, qui célèbre cette année le 60e anniversaire de son indépendance. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Cette photo prise le 25 août 2022 montre les drapeaux français et algérien avant l'arrivée du président français à Alger pour une visite officielle afin d'aider à rétablir les liens avec l'ancienne colonie française, qui célèbre cette année le 60e anniversaire de son indépendance. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • La droite a dénoncé mardi la relance de la relation bilatérale avec l'Algérie en minimisant son impact sur les obligations de quitter le territoire (OQTF).
  • Selon l'élu des Alpes-Maritimes, cette conversation entre les deux chefs d'État signifie « que les ministres n'ont aucun pouvoir, M. Retailleau en premier ».

PARIS : La droite a dénoncé mardi la relance de la relation bilatérale avec l'Algérie en minimisant son impact sur les obligations de quitter le territoire (OQTF), Laurent Wauquiez déplorant « une riposte très provisoire » et Éric Ciotti, allié du RN, dénonçant une relation « insupportable » entre les deux pays.

« La riposte était très graduée et en plus très provisoire », a réagi Laurent Wauquiez sur X au lendemain de la conversation entre les présidents français Emmanuel Macron et algérien Abdelmadjid Tebboune, qui ont acté une relance de la relation bilatérale, après des mois de crise.

Lors de la réunion du groupe des députés LR, l'élu de Haute-Loire, qui brigue la présidence du parti face au ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, s'est dit convaincu que les autorités algériennes n'accepteront pas les OQTF.

« On va se retrouver dans 90 jours avec les OQTF dangereux qui seront dans la nature. Nous ne pouvons pas l'accepter », a déploré le député de Haute-Loire.

De son côté, Éric Ciotti, l'ancien président des LR alliés avec le RN, a directement ciblé le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau sur CNews, lui reprochant de n'avoir montré que « des petits muscles face à Alger ».

Selon l'élu des Alpes-Maritimes, cette conversation entre les deux chefs d'État signifie « que les ministres n'ont aucun pouvoir, M. Retailleau en premier ».

« La relation privilégiée Macron-Algérie depuis 2016 perdure. Et cette relation est insupportable, parce qu'elle traduit un recul de notre pays. »

Les deux présidents, qui se sont entretenus le jour de l'Aïd el-Fitr marquant la fin du ramadan, ont marqué « leur volonté de renouer le dialogue fructueux », selon un communiqué commun.

La reprise des relations reste toutefois subordonnée à la libération de l'écrivain Boualem Sansal et à des enjeux de politique intérieure dans les deux pays.