Un journaliste israélien renommé dénonce la «brutalité» de Tel-Aviv dans le complexe d'Al-Aqsa

Un journaliste israélien de premier plan a lancé une attaque cinglante contre le gouvernement de Tel-Aviv (Photo, Capture d'écran).
Un journaliste israélien de premier plan a lancé une attaque cinglante contre le gouvernement de Tel-Aviv (Photo, Capture d'écran).
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Publié le Samedi 23 avril 2022

Un journaliste israélien renommé dénonce la «brutalité» de Tel-Aviv dans le complexe d'Al-Aqsa

  • Nir Hasson, du journal Haaretz, demande une enquête sur les exactions «terribles» des policiers et des soldats contre les civils, les journalistes et les femmes
  • Le Likoud et la droite de l'ancien Premier ministre Netanyahou cherchent à tirer des avantages politiques de la violence, soutient le journaliste

CHICAGO: Un journaliste israélien de premier plan a lancé une attaque cinglante contre le gouvernement de Tel-Aviv en dénonçant la manière avec laquelle la police et les soldats ont brutalisé des civils et des journalistes dans l'enceinte de la mosquée Al-Aqsa, dans le lieu appelé «Haram al-Sharif» («mont du Temple») au cours de la semaine dernière, et a demandé une enquête sur leurs actions.

Nir Hasson, qui couvre Jérusalem et la communauté palestinienne pour la publication libérale en langue anglaise Haaretz, a également déclaré qu'il pensait que la violence ne conduirait pas à une nouvelle intifada.

La manière dont le conflit a été géré reflète également un changement dans les politiques du gouvernement actuel de Naftali Bennett par rapport à celles de l'ancien Premier ministre Benjamin Netanyahou, a-t-il affirmé.

Hasson, qui s'exprimait dans le Ray Hanania Radio Show, sponsorisé par Arab News, sur l’US Arab Radio Network, a indiqué que la violence a commencé lorsqu'un groupe d'Israéliens religieux est entré dans le mont du Temple «avec des agendas politiques», mais qu'elle n'a pas atteint les niveaux des années précédentes.

Hasson a reconnu que, dans de nombreux cas, la police a dépassé les bornes en frappant des civils et des journalistes et en organisant mal sa réponse aux manifestations.

«L'année dernière, ils ont tout fait de travers. Ils ont infligé une punition collective à tous les Palestiniens de Jérusalem-Est, quotidiennement», a souligné Hasson.

«Cette année, ils [la police] ont essayé de faire la différence entre la majorité des Palestiniens qui sont venus sur le mont du Temple ou à la Porte de Damas pour prier ou pour célébrer la fin de la fête du ramadan et la minorité qui a suscité des rixes et jeté des pierres sur la police.»

«Cependant, […] nous avons vu un très grand nombre de vidéos très dures qui montrent la police en train d’utiliser des matraques et de frapper des gens, des journalistes, des femmes, un homme à côté de son fils.»

«C'est terrible. Je ne peux pas être plus critique envers la police de Jérusalem à ce sujet. Je pense qu'ils doivent donner plus de réponses et qu'ils doivent ouvrir des enquêtes contre ces officiers, non seulement parce que cela n'a aucun sens de traiter [...] des civils de cette façon, mais aussi parce que cela met de l'huile sur le feu.»

Hasson a déclaré qu’on s’attendait à une certaine violence pendant les trois célébrations religieuses, mais que cette dernière n'atteignait pas celle des années précédentes, comme lorsque l'ancien général et Premier ministre israélien Ariel Sharon avait conduit un bataillon de soldats et de policiers au Haram al-Sharif, provoquant en septembre 2000 la première intifada.

«Ce n'est pas la première fois que nous assistons à ces affrontements et à cette montée de la violence à Jérusalem. Et nous savons depuis au moins cinq ou six ans que chaque ramadan est marqué par de nombreuses tensions, notamment autour du mont du Temple et du complexe d'Al-Aqsa», a soutenu M. Hasson.

Les affrontements de la première intifada, a-t-il encore précisé, ont abouti à un accord entre Israéliens et Palestiniens pour ne pas attiser les tensions. Jusqu'en 2003, Israël limitait la visite des Juifs religieux au Haram al-Sharif à cinq personnes à la fois. En 2003, ce nombre a été porté à dix, en 2010, à vingt et, en 2011, sous Netanyahou, à cinquante personnes à la fois.

Hasson a souligné que, pour une bonne part, les violences de l'année dernière, qui ont fait plus de morts et de blessés et se sont étendues à l’ensemble de la Cisjordanie, à Gaza et en Israël, étaient le résultat de la politique de Netanyahou, qui a voulu recourir à l’agression pour soutenir ses espoirs de réélection.

Netanyahou a perdu les élections israéliennes au profit de Naftali Bennett, qui, selon Hasson, n'a pas exploité les tensions à des fins politiques.

«Si vous vous souvenez de l'année dernière, après les élections, Netanyahou devait diriger une nouvelle coalition. Et la compréhension politique commune en Israël était qu’il avait intérêt à faire monter la pression et à exercer un peu plus de violence pour augmenter les chiffres de la Knesset et construire sa coalition.

«Aujourd’hui, j’ignore si Netanyahou a vraiment fait quelque chose d’imprudent de manière intentionnelle. Mais nous avons vu la police agir brutalement sans aucune justification. Si vous vous en souvenez, ils ont bloqué les escaliers de la porte de Damas, empêchant sans raison les gens de s'y asseoir. Cela n'avait aucun sens, mais ça n'a engendré que de la violence là-bas.»

«Une partie de la réponse réside bien sûr dans le fait que le gouvernement de Naftali Bennett a des intérêts vitaux à rester aussi discret que possible: chaque fois qu'il y a de la violence, des attaques terroristes, il est durement sanctionné par la droite, par le Likoud et Netanyahou. Ils disent qu'on ne peut pas faire confiance à Bennett, que le gouvernement est dans l’incapacité d’assurer la sécurité d'Israël».

Hasson a fait observer qu'il y a des extrémistes, des deux côtés, qui souhaitent les conflits et exploiteront tout événement ou tout moment pour alimenter les affrontements.

«Il y a certains groupes politiques ou religieux, principalement des ONG, qui essaient de pousser le gouvernement israélien à changer le statu quo, mais ils ne font pas partie du courant dominant ni du gouvernement. Toutes les institutions de sécurité d’Israël, les forces de défense israéliennes, la police, le Shin Bet sont d'accord pour dire qu'Israël doit être très prudent dans ses démarches sur le mont du Temple et Al-Aqsa», a déclaré Hasson.

Hasson a en outre fait remarquer que les tensions s’étaient apaisées depuis les premiers affrontements de la semaine dernière, malgré la tentative entreprise jeudi dernier par Itamar Ben-Gvir, membre de la Knesset d'extrême droite, de conduire plusieurs centaines de radicaux qui brandissaient le drapeau israélien dans l'enceinte de la mosquée Al-Aqsa.

«Les choses sont à peu près calmes. Mais nous avons eu aujourd'hui un défilé de drapeaux de la droite, de la droite radicale en Israël et d'un membre de la Knesset, Itamar Ben-Gvir, qui appartient au parti de la droite radicale. Ils voulaient protester contre la violence des Palestiniens et ils ont demandé à la police de marcher de Jérusalem-Ouest à Jérusalem-Est et de passer par le quartier musulman de la Vieille Ville de Jérusalem, mais la police ne les a pas laissé faire et elle les a bloqués sur l’ensemble du chemin», a expliqué Hasson.

«Cela a également contribué à faire monter la tension et la violence à Jérusalem aujourd'hui. Il y a eu quelques heures d'affrontements entre ces manifestants, ces militants de droite et la police dans le centre de Jérusalem. Ils ne les ont pas laissé se rendre à Jérusalem-Est. Mais, pour l'instant, cette soirée semble être très calme.»

Hasson a déclaré que, lors des dix derniers jours du ramadan, le Haram al-Sharif devrait être fermé pour les non-musulmans et que les tensions «devraient être moindres».

Dans le même temps, le secrétaire d'État américain, Anthony Blinken, a exhorté le président palestinien, Mahmoud Abbas, et le ministre des Affaires étrangères et Premier ministre suppléant, Yaïr Lapid, lors d'appels téléphoniques séparés, à s'abstenir de «toute action ou de tout discours susceptible d'aggraver les tensions».

Blinken a envoyé la secrétaire adjointe par intérim du Bureau des affaires du Proche-Orient, Yael Lempert, et le secrétaire adjoint aux affaires israéliennes et palestiniennes du Bureau des affaires du Proche-Orient, Hady Amr, rencontrer des dirigeants en Israël, en Cisjordanie et en Jordanie afin de contribuer à apaiser les tensions.

Le Ray Hanania Radio Show, animé par l’US Arab Radio Network et sponsorisé par Arab News, est diffusé chaque semaine en direct le mercredi à Détroit, Washington, D.C., Ontario et rediffusé le jeudi à Chicago à midi sur la radio WNWI 1080 AM.

 


Selon une source ukrainienne , Zelensky ne serait pas prêt à signer un accord sur les minerais avec Washington

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky n'est « pas prêt » à signer un accord avec les États-Unis qui leur offrirait un accès préférentiel aux minerais du pays, a affirmé samedi à l'AFP une source ukrainienne proche du dossier, alors que les deux pays sont en pleines tensions.

Donald Trump réclame depuis plusieurs semaines l'équivalent de 500 milliards de dollars de terres rares, en guise de dédommagement, selon lui, du soutien américain à Kiev face à l'invasion russe, une condition qu'Ukraine ne peut accepter pour l'instant.

« Le président ukrainien n'est pas prêt à accepter le projet dans sa forme actuelle. Nous essayons toujours de faire des changements de manière constructive », a expliqué cette source ukrainienne qui a requis l'anonymat.

« Ils veulent nous soutirer 500 milliards de dollars », a-t-elle accusé.

« Quel genre de partenariat est-ce là ? (...) Et pourquoi devons-nous donner 500 milliards, il n'y a pas de réponse », a-t-elle encore dit, affirmant que Kiev avait « proposé des amendements. Ils ont été soumis ».

Depuis l'appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine le 12 février, Moscou et Washington ont exprimé leur volonté de repartir sur de nouvelles bases, et le président américain a complètement renversé la position de son pays concernant la guerre en Ukraine, en reprenant la rhétorique du Kremlin sur la responsabilité de Kiev.

Le 24 février 2022, l'Ukraine a été envahie par la Russie, le Kremlin affirmant agir pour protéger le pays contre la menace de l'OTAN et empêcher un élargissement de l'organisation.

Donald Trump souhaite négocier un accord avec l'Ukraine afin d'obtenir un accès à 50 % de ses minerais stratégiques, en guise de compensation pour l'aide militaire et économique déjà fournie à Kiev.

Le conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, Mike Waltz, s'est montré très pressant vendredi.

« Le président Zelensky va signer cet accord, et vous le verrez à très court terme, et c'est bon pour l'Ukraine », a-t-il insisté lors d'un rassemblement de conservateurs près de Washington.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rejeté avec vigueur la première proposition américaine d'accord, arguant qu'il ne pouvait « pas vendre » son pays.

Il a toutefois laissé la porte ouverte à des « investissements » américains en échange de telles garanties.

De son côté, Donald Trump affirme que les États-Unis ont dépensé 350 milliards de dollars pour s'engager dans une guerre qui ne pouvait pas être gagnée. Or, selon l'institut économique IfW Kiel, l'aide américaine globale à l'Ukraine, financière, humanitaire et militaire, a atteint 114,2 milliards d'euros (près de 120 milliards de dollars au cours actuel) entre début 2022 et fin 2024, dont 64 milliards d'euros en assistance militaire.

Le 1er février, M. Zelensky a assuré que l'Ukraine n'avait reçu à ce stade que 75 des 177 milliards de dollars d'aide votée par le Congrès américain.


Les États-Unis proposent à l'ONU une résolution pour « une fin rapide » du conflit en Ukraine

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine.  (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine. (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
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  • Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale de l'Ukraine.
  • Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE.

NATIONS-UNIES : Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale du pays, après une nouvelle attaque du président américain Donald Trump contre son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.

Dans un communiqué, le secrétaire d'État américain, Marco Rubio, a exhorté les pays membres de l'ONU à approuver cette nouvelle résolution « simple » et « historique », et « tous les États membres à la soutenir, afin de tracer un chemin vers la paix ».

« Cette résolution est une bonne idée », a rapidement commenté l'ambassadeur russe à l'ONU, Vassili Nebenzia, déplorant toutefois l'absence de référence « aux racines » du conflit.

Les Européens, désarçonnés par l'ouverture du dialogue américano-russe sur l'Ukraine, n'avaient pas réagi samedi matin à la proposition américaine.

« Nous n'avons pas de commentaire pour l'instant », a simplement indiqué l'ambassadeur français à l'ONU Nicolas de Rivière, alors que l'Assemblée générale doit se réunir lundi.

Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE, mais aussi à un mépris pour les principes fondamentaux du droit international », a déclaré à l'AFP Richard Gowan, de l'International Crisis Group.

L'Assemblée générale de l'ONU se réunit lundi pour marquer le troisième anniversaire de l'invasion russe de l'Ukraine.

À cette occasion, l'Ukraine et les Européens ont préparé un projet de résolution qui souligne la nécessité de « redoubler » d'efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre « cette année », et prend note des initiatives de plusieurs États membres ayant présenté « leur vision pour un accord de paix complet et durable ».

Le texte réitère également les précédentes demandes de l'Assemblée générale, appelant à un retrait immédiat et inconditionnel des troupes russes d'Ukraine ainsi qu'à la cessation des attaques de la Russie contre l'Ukraine.

Ces précédents votes avaient rassemblé plus de 140 voix sur les 193 États membres.

Les nouvelles salves de M. Trump contre M. Zelensky interviennent alors que la visite de l'émissaire du président américain, Keith Kellogg, semblait avoir apaisé la situation. Ces nouvelles attaques de M. Trump contre M. Zelensky font suite à des premières invectives virulentes plus tôt dans la semaine, qui avaient suscité une vive réaction de la part de Kiev et la stupéfaction de ses alliés européens.

M. Zelensky avait déclaré avoir eu des échanges « productifs » avec M. Kellogg, et ce dernier l'avait qualifié de « dirigeant courageux et assiégé d'une nation en guerre ».

Vendredi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a réaffirmé que le président Vladimir Poutine était « ouvert » à des pourparlers de paix.

La Russie exige notamment que l'Ukraine lui cède quatre régions ukrainiennes, en plus de la Crimée qu'elle a annexée en 2014, et qu'elle n'adhère jamais à l'Otan. Des conditions jugées inacceptables par les autorités ukrainiennes qui demandent à leurs alliés des garanties de sécurité solides.

M. Trump et ses collaborateurs ont jugé « irréaliste » l'adhésion de l'Ukraine à l'Otan et son ambition de reprendre ses territoires perdus à la Russie.

Sur le terrain, la situation reste difficile pour les troupes ukrainiennes. L'armée russe a revendiqué vendredi la prise de deux localités dans l'est de l'Ukraine.


60 ans après, l'assassinat de Malcolm X continue de secouer l'Amérique

L'avocat Ben Crump (à droite) et la fille de Malcolm X, Ilyasah Shabazz, s'adressent à la presse pour demander la déclassification des documents du pasteur musulman afro-américain et militant des droits de l'homme Malcolm X, à l'occasion du 60e anniversaire de son assassinat, à Harlem, dans l'État de New York, le 21 février 2025. La conférence de presse s'est tenue au Malcolm X and Dr Betty Shabazz Memorial and Educational Center, dans la salle de bal où Malcolm X a été assassiné le 21 février 1965. (Photo de CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
L'avocat Ben Crump (à droite) et la fille de Malcolm X, Ilyasah Shabazz, s'adressent à la presse pour demander la déclassification des documents du pasteur musulman afro-américain et militant des droits de l'homme Malcolm X, à l'occasion du 60e anniversaire de son assassinat, à Harlem, dans l'État de New York, le 21 février 2025. La conférence de presse s'est tenue au Malcolm X and Dr Betty Shabazz Memorial and Educational Center, dans la salle de bal où Malcolm X a été assassiné le 21 février 1965. (Photo de CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
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  • Six décennies jour pour jour après sa mort, un hommage est rendu vendredi à la figure de proue du mouvement « Black Power », notamment pour son héritage en matière de « justice sociale ».
  • « Nous espérons que la vérité tant attendue éclatera, après 60 ans d'attente, et que ce qui s'est passé sera documenté », explique à l'AFP Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

NEW-YORK : Six décennies jour pour jour après sa mort, un hommage est rendu vendredi à la figure de proue du mouvement « Black Power », notamment pour son héritage en matière de « justice sociale ». C'est ce que rappelle le Shabazz Center, le mémorial et centre éducatif installé dans l'ancienne salle de bal de Harlem où il a été abattu à 39 ans, au faîte de son influence, et ce quelques mois seulement après l'abolition de la ségrégation raciale.

Qui a commandité le meurtre ? Comment le drame a-t-il pu survenir en pleine réunion publique, alors que les menaces pesant sur le militant, porte-voix de la « Nation of Islam » puis de l'abolition des discriminations, étaient connues des autorités ?

Pour obtenir des réponses, sa famille a engagé en novembre 2024 des poursuites au civil spectaculaires, réclamant 100 millions de dollars aux forces de l'ordre et aux agences fédérales qu'elle accuse, selon elle, d'avoir joué un rôle à divers degrés dans son assassinat.

Dans ce dossier qui doit entrer dans le vif du sujet début mars devant un tribunal de Manhattan, la famille assure disposer d'éléments nouveaux lui permettant d'assigner en justice la police de New York (NYPD), le FBI ou encore la CIA.

« Nous espérons que la vérité tant attendue éclatera, après 60 ans d'attente, et que ce qui s'est passé sera documenté », explique à l'AFP Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

- « Qui a donné l'ordre ? » -

Selon l'assignation en justice, la famille du leader afro-américain, également connu sous le nom d'El-Hajj Malik El-Shabazz, estime que les forces de l'ordre et les services de renseignement américains ont sciemment désengagé les policiers dont la mission était de le protéger la nuit du drame.

Des agents en civil ne sont pas non plus intervenus au moment des faits et, depuis sa mort, les agences de renseignement s'emploieraient à dissimuler leurs agissements, selon la plainte.

Contactée par l'AFP, la police de New York n'a pas souhaité s'exprimer pour l'instant.

« Cette dissimulation a duré des décennies, privant la famille Shabazz de la vérité et de leur droit à obtenir justice », estime auprès de l'AFP Me Ben Crump, qui défend le dossier pour les filles de Malcolm X.

« Nous écrivons l'histoire en nous dressant ici face à ces torts et en demandant des comptes devant les tribunaux », se félicite le conseil, qui a demandé vendredi la « déclassification de documents » liés à ce dossier.

L'affaire avait déjà rebondi en 2021, lorsque deux des trois anciens hommes reconnus coupables de l'assassinat et ayant passé plus de vingt ans derrière les barreaux ont finalement été innocentés, ce qui constitue l'une des plus grandes erreurs judiciaires des États-Unis. En réparation, les deux Afro-Américains ont touché 36 millions de dollars de la part de la ville et de l'État de New York.

« On sait déjà assez précisément comment l'assassinat de Malcolm X s'est déroulé. On sait qui en est responsable : cinq membres de la Nation of Islam. La seule chose qu'on ignore, c'est qui a donné l'ordre », observe Abdur-Rahman Muhammad, historien et spécialiste reconnu du dossier, dont les travaux pendant des décennies ont contribué à disculper les deux accusés à tort.

Selon lui, les éléments mis en avant aujourd'hui par la famille de Malcolm X sont « peu crédibles ».

Il concède toutefois que « si la plainte permet de déterminer qui a donné l'ordre final, alors elle aura de la valeur ».

Cet énième rebondissement aura au moins permis de remettre en avant « l'héritage » de Malcolm X, plus important que jamais sous le second mandat de Donald Trump, « ennemi implacable » de la communauté noire, affirme l'historien.

« Cela va inciter les Afro-Américains à se serrer les coudes », anticipe Abdur-Rahman Muhammad. « En résumé, la communauté noire doit revenir au message de Malcolm : lutter. »