PARIS: "J'hésitais déjà en 2017 mais là j'hésite encore plus": à l'instar de Pierre, professeur de sciences économiques et sociales, de nombreux enseignants, se disent "un peu perdus" face au vote du second tour de la présidentielle entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen.
"Une chose est certaine, c'est que le vote Le Pen est complètement exclu", déclare ce professeur de sciences économiques dans un lycée de banlieue parisienne, âgé de 35 ans.
Selon Pierre, deux options: "Voter Macron ou s'abstenir. On est tous un peu +emmerdés+, un peu perdus", lance-t-il, en évoquant le vote de sa profession. "J'hésitais déjà en 2017 mais là j'hésite encore plus".
Même casse-tête pour Karim, 30 ans et prof d'histoire-géographie à Saint-Denis près de Paris. "Je n'ai jamais été autant indécis de toute ma vie, tout est confus, c'est horrible".
En 2017, "j'avais voté Macron avec beaucoup d'hésitation. Après les cinq années passées, où ce gouvernement a été ultra-violent socialement et psychologiquement, avec les digues nous séparant de l'extrême droite qui ont déjà sauté, c'est très dur de prendre sa décision".
Il assure "prendre encore du temps pour faire (son) choix entre le vote Macron ou l'abstention". "Vais-je vraiment assumer de m'en remettre aux autres en m'abstenant, notamment face à mes élèves déjà très défavorisés?", soupire-t-il.
Toujours en Seine-Saint-Denis, à Stains, Frédéric, 40 ans, professeur de sciences économiques et sociales, est dans la même hésitation: voter Macron ou s'abstenir.
"Le gouvernement actuel a esquinté le lycée et le service public durant cinq ans avec des conditions de travail qui se sont dégradées et des élèves qui ont perdu en apprentissage avec la réforme du lycée. Mais suis-je prêt pour autant à m'abstenir et prendre le risque de Le Pen? Je ne sais pas encore. C'est dur".
«Très peur du résultat»
En banlieue lilloise, Gaëlle, prof d'histoire-géographie en collège est elle aussi "indécise". "Je suis embêtée car ma zone est en vacances sur toute la durée du second tour et j'aurais bien aimé échanger avec les collègues en salle des profs,, on est beaucoup à ne savoir que faire", raconte cette femme de 54 ans.
La France compte quelque 870 000 enseignants, traditionnellement peu abstentionnistes.
La majorité des professeurs interrogés par l'AFP ont dit leur indécision. Mais certains ont fait leur choix.
"Je suis conscient de représenter une petite minorité dans l'Education nationale mais j'ai voté Macron au premier tour et je ferai de même au second", explique Olivier, 49 ans, professeur d'histoire-géographie en Charente-Maritime. "Je dois avouer que j'ai très peur du résultat final. Je ne le sens pas du tout, ce vote, car autour de moi, j'ai l'impression que les gens avancent comme des somnambules".
Même constat pour Jacques, 32 ans, un autre professeur de sciences économiques et sociales près de Paris, qui, par "crainte que les gens s'abstiennent trop", a décidé de "voter Macron". "Ce n'est pas un choix facile mais il faut bien s'y coller".
Hélène, professeur des écoles dans le Vaucluse, est catégorique: "Ce sera une abstention militante, d'opinion". "Ni l'un ni l'autre des deux programmes ne me satisfont. Bien sûr que Le Pen c'est pire, mais après ces cinq années horribles pour l'école sous Macron, je ne me sens pas prête à voter pour lui, c'est impossible", dit cette prof de 48 ans, qui pense que "l'abstention sera au coeur des sujets le 24 avril", jour du 2e tour.
Marie, 40 ans, CPE à Paris dans le secondaire votera "blanc". "Cela reste un acte citoyen d'aller voter, de se déplacer, c'est pour cela que je préfère le vote blanc à l'abstention". Pour elle, "hors de question de donner (s)a voix à Macron après cinq années très difficiles pour l'éducation".