Cuba: les familles des manifestants dévastées par les lourdes peines

Le verdict est tombé le 16 mars: des peines de six à 30 ans pour 128 Cubains accusés de sédition et vols (Photo, AFP).
Le verdict est tombé le 16 mars: des peines de six à 30 ans pour 128 Cubains accusés de sédition et vols (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 01 avril 2022

Cuba: les familles des manifestants dévastées par les lourdes peines

  • Le verdict est tombé le 16 mars: des peines de six à 30 ans pour 128 Cubains accusés de sédition et vols
  • Ils avaient participé à deux des manifestations les plus violentes des 11 et 12 juillet, à La Güinera et dans le quartier Diez de Octubre

LA HAVANE: "En moi, il y a une révolutionnaire qui souffre", confie Virgen Frometa, Cubaine dont le frère, en visite d'Allemagne où il réside, a écopé de 25 ans de prison pour avoir manifesté en juillet 2021.

"Je demande la libération immédiate de mon frère", Luis Frometa Compte, 59 ans, et "de tous les prisonniers" des manifestations historiques ayant secoué l'île les 11 et 12 juillet derniers, dit Mme Frometa, 56 ans, les yeux remplis de larmes.

Luis Frometa Compte, qui vit à Dresde, était arrivé depuis un mois à Cuba pour rendre visite à sa famille quand ont éclaté les émeutes qui se sont soldées par 1 395 personnes arrêtées dont 728 restent incarcérées, selon l'ONG Cubalex, basée à Miami.

Agent forestier installé en Allemagne depuis 37 ans, il a la double nationalité. Le 12 juillet, il sort acheter du rhum et, en croisant les manifestants, se joint à eux, filmant aussi les événements.

Cinq jours plus tard, des policiers en civil viennent le chercher chez sa soeur. Depuis il est en prison.

"Personne ne renverse une révolution désarmé, juste en parlant, en manifestant, en disant des choses qui ne plaisent pas ou en filmant, personne", s'emporte Virgen Frometa, scandalisée par la peine infligée à son frère pour sédition.

«Ils n'ont tué personne»

A quelques maisons de là, dans le quartier pauvre de La Güinera, en banlieue de La Havane, Emilio Roman, maçon de 51 ans, est lui aussi dévasté. Ses trois fils ont été condamnés pour sédition.

L'aîné, Yosney Emilio Roman, 25 ans, et sa soeur Mackyani Yosney, 23 ans, ont écopé de 12 ans de prison. Le benjamin Emy Yoslan, 18 ans, a pris sept ans.

Le 12 juillet, la famille Roldan fêtait un anniversaire. Mackyani est sortie acheter des cigarettes et est tombée sur la foule. "Elle s'est emballée", ses frères aussi, raconte son père.

Pendant les deux semaines qu'ont duré les procès en janvier, Emilio Roman est resté à l'entrée du tribunal.

"Je n'avais pas la force d'(entrer), de voir l'injustice qu'ils étaient en train de commettre contre tous ces gamins", dit-il dans sa modeste maison aux murs de ciment sans peinture et où le lit, la cuisine et la salle de bains se partagent le même espace.

Le verdict est tombé le 16 mars: des peines de six à 30 ans pour 128 Cubains accusés de sédition et vols. Ils avaient participé à deux des manifestations les plus violentes des 11 et 12 juillet, à La Güinera et dans le quartier Diez de Octubre.

Ces lourdes condamnations ont causé la stupeur sur l'île. Même le chanteur Silvio Rodriguez, une institution à Cuba et fervent défenseur de la révolution, s'en est offusqué.

"Condamnés à 15, 20 et 30 ans pour désordre public? Cela ne me semble pas juste", a-t-il commenté sur le portail officiel Cubadebate.

"S'ils ont commis les actes de violence dont on les accuse, je suis d'accord qu'ils soient jugés et qu'on leur applique les peines correspondantes. Mais à ce que je sache, ils n'ont tué personne".

L'UE inquiète

A La Guïnera, quelque 90 foyers ont un proche incarcéré depuis juillet. Les familles Frometa et Roman vont faire appel.

Désabusé, Emilio Roman voudrait que ses enfants quittent Cuba, comme le font des milliers d'habitants ces derniers mois, une vague migratoire massive sur fond de crise économique et malaise social. "Qu'ils ne passent pas un jour de plus dans ce pays, qui est une honte!"

Selon le texte du jugement, sa fille Mackyani, contre laquelle le parquet réclamait 25 ans de prison, a participé "au regroupement de personnes qui ont mené les émeutes en utilisant des armes capables de tuer, blesser et endommager avec force, comme des pierres, des bâtons et des bouteilles sous formes d'engins explosifs".

Dans les vidéos, elle "a une bouteille à la main", admet son père. Concernant ses frères, le dossier dit qu'ils "ont lancé des pierres et des bouteilles vers les agents du ministère de l'Intérieur".

Le parquet assure avoir agi avec transparence et respecté le droit à la défense, dénonçant une motivation politique derrière ces rassemblements.

"Nous avons pu prouver" qu'il y avait des personnes qui voulaient provoquer "une intervention militaire du gouvernement américain", a déclaré au journal télévisé Yohandris Lopez, procureur dans plusieurs procès de La Güinera.

Mercredi, l'Union européenne a dit "suivre avec une profonde inquiétude" les lourdes peines infligées, les jugeant "disproportionnées", comme l'a aussi estimé Washington, et regrettant que "ces procès soulèvent d'importantes préoccupations" en terme de "transparence et de régularité de la procédure".


Armes à Israël: les républicains tentent de forcer la main à Biden

Des Palestiniens déplacés marchent autour d'une flaque d'eau devant des bâtiments et des tentes détruits à Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 mai 2024, au milieu du conflit en cours entre Israël et le groupe militant Hamas. (Photo par AFP)
Des Palestiniens déplacés marchent autour d'une flaque d'eau devant des bâtiments et des tentes détruits à Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 mai 2024, au milieu du conflit en cours entre Israël et le groupe militant Hamas. (Photo par AFP)
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  • Pour les républicains, Joe Biden n'a pas le droit d'interférer dans la manière dont Israël mène sa campagne militaire, qui a provoqué un désastre humanitaire à Gaza
  • Mais 16 démocrates se sont joints aux républicains pour adopter la proposition de loi, défiant le chef de l'Etat

WASHINGTON: La Chambre américaine des représentants, dominée par les républicains, a voté jeudi une mesure largement symbolique visant à forcer le président démocrate Joe Biden à mettre fin à sa suspension d'une livraison de bombes à Israël.

Cette suspension de la livraison d'une cargaison d'armes, composée de bombes de 2 000 livres (907 kg) et de 500 livres (226 kg), a été décidée au moment où Washington, premier soutien militaire d'Israël, s'oppose à une offensive d'ampleur des troupes israéliennes à Rafah.

La mesure votée jeudi n'a aucune chance de devenir loi. En théorie, elle empêcherait M. Biden de geler toute aide militaire à Israël approuvée par le Congrès.

"Le président et son administration doivent immédiatement faire marche arrière et se tenir aux côtés d'Israël", a déclaré Mike Johnson, chef républicain de la Chambre des représentants, dans un communiqué.


Biden s'efforce de remobiliser l'électorat afro-américain

Le président américain Joe Biden s'exprime lors du service commémoratif des agents de la paix nationaux devant le Capitole américain à Washington, DC, le 15 mai 2024. (Photo, AFP)
Le président américain Joe Biden s'exprime lors du service commémoratif des agents de la paix nationaux devant le Capitole américain à Washington, DC, le 15 mai 2024. (Photo, AFP)
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  • Vendredi, Joe Biden ira prononcer un discours au Musée national de l'histoire et de la culture afro-américaine à Washington
  • La mobilisation des Afro-Américains avait été décisive dans la victoire de Joe Biden face à Donald Trump en 2020

WASHINGTON: A coup d'événements symboliques et d'interviews, Joe Biden, qui selon certains sondages serait en perte de vitesse auprès des Afro-Américains, s'efforce cette semaine de remobiliser cet électorat décisif.

Le président américain multiplie ainsi les hommages aux grandes luttes menées pour les droits civiques aux Etats-Unis.

Jeudi, le démocrate de 81 ans, qui va affronter son prédécesseur républicain Donald Trump pour un second mandat en novembre, a reçu les familles des plaignants d'un combat judiciaire emblématique contre la ségrégation scolaire, ayant débouché sur la décision "Brown vs Board of Education" de la Cour suprême.

Dans cet arrêt de 1954, la Cour a jugé que la séparation des élèves blancs et des élèves noirs dans les écoles violait la Constitution.

Vendredi, Joe Biden ira prononcer un discours au Musée national de l'histoire et de la culture afro-américaine à Washington.

Puis il rencontrera les représentants des "Divine Nine", des "fraternités" et "sororités" (associations typiques des universités américaines) fondées par des étudiants et des étudiantes noires.

Dimanche enfin, il doit s'exprimer lors de la remise des diplômes de l'université historiquement noire de Morehouse à Atlanta (sud-est), celle où étudia Martin Luther King, le grand meneur de la lutte pour les droits civiques dans les années 1960.

La Maison Blanche a d'ailleurs annoncé jeudi avoir investi au total 16 milliards de dollars dans la centaine d'universités historiquement noires du pays depuis l'élection de Joe Biden.

"Le président et moi-même restons déterminés à utiliser tous les moyens disponibles pour soutenir les universités historiquement noires", a commenté dans un communiqué la vice-présidente Kamala Harris, elle-même ancienne étudiante de l'un de ces établissements, la Howard University.

Gaza 

Reste à voir comment le démocrate, ferme soutien d'Israël, sera reçu à Morehouse, alors que certaines cérémonies de ce genre ont été perturbées récemment par des manifestants propalestiniens.

Concernant la guerre à Gaza, "il y a une inquiétude légitime", a dit le président américain, interrogé par une radio de la communauté afro-américaine à Atlanta (Géorgie, sud-est) à propos de ces mobilisations, en ajoutant: "Les gens ont le droit de manifester, de le faire pacifiquement."

Selon plusieurs sondages récents, Joe Biden, tout en restant nettement majoritaire auprès de cet électorat, perdrait du terrain auprès des électeurs noirs, en particulier les plus jeunes, dans certains Etats décisifs.

Parmi eux la Géorgie, ou encore le Wisconsin.

Ce n'est donc pas un hasard si Joe Biden a aussi accordé un entretien, également diffusé jeudi, à une radio afro-américaine de Milwaukee, dans cet Etat de la région des Grands Lacs.

Il y vante ses actions sociales et économiques en faveur des Afro-Américains et critique son opposant républicain.

"Il n'a littéralement rien fait (pour la communauté afro-américaine" et il veut empêcher son accès au vote", a dit Joe Biden.

Sur les ondes de la radio de Géorgie, il a déclaré: "Rappelez-vous qui est Trump. Il a accusé à tort les +Cinq de Central Park+", de jeunes Afro-Américains victimes d'une erreur judiciaire retentissante, "il a donné naissance aux théories du complot" autour de la nationalité de l'ancien président Barack Obama.

La mobilisation des Afro-Américains avait été décisive dans la victoire de Joe Biden face à Donald Trump en 2020. Il avait alors remporté 92% de leurs voix, contre 8% à son adversaire républicain, selon l'institut Pew Research.


Le micro d’une étudiante coupé alors qu’elle demande à Columbia de se mobiliser pour Gaza

Saham David Ahmed Ali s’exprime lors de la cérémonie de remise des diplômes de la Mailman School of Public Health de l’université Columbia. Son micro s’est coupé à deux reprises pendant son discours. (Capture d’écran)
Saham David Ahmed Ali s’exprime lors de la cérémonie de remise des diplômes de la Mailman School of Public Health de l’université Columbia. Son micro s’est coupé à deux reprises pendant son discours. (Capture d’écran)
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  • Le microphone s’est coupé à deux reprises pendant son discours, ce qui a incité les étudiants à huer et à scander «laissez-la parler» pendant que Mme Ali marquait une courte pause
  • On ne sait pas si le problème est dû à un défaut technique ou si le microphone a été délibérément coupé

LONDRES: Un microphone a brièvement été coupé cette semaine lors d’un discours prononcé au cours de la cérémonie de remise des diplômes de l’université Columbia aux États-Unis. L’oratrice avait critiqué la position de l’université à l’égard de Gaza.

Mardi, l’étudiante Saham David Ahmed Ali a prononcé un discours devant les diplômés de la Mailman School of Public Health. Elle a appelé à une action contre Israël, critiquant le «silence sur le campus de l’université Columbia».

Le microphone s’est coupé à deux reprises pendant son discours, ce qui a incité les étudiants à huer et à scander «laissez-la parler» pendant que Mme Ali marquait une courte pause. Elle a ensuite pu continuer. On ne sait pas si le problème est dû à un défaut technique ou si le microphone a été délibérément coupé.

Saham David Ahmed Ali a déclaré que l’université devait révéler ses relations avec des entreprises «tirant profit du génocide palestinien» et qu’elle devait immédiatement s’en désengager.

Elle a également demandé à Columbia d’appeler à un cessez-le-feu immédiat à Gaza, où les civils palestiniens sont actuellement confrontés à la famine, selon l’ONU, alors qu’Israël poursuit sa campagne militaire qui a fait plus de trente-cinq mille morts, des milliers d’autres blessés et des centaines de milliers de déplacés à la suite de l’attaque menée par le Hamas contre Israël le 7 octobre.

L’université Columbia a été témoin d’importantes manifestations sur son campus depuis le 17 avril après que la présidente de l’université, Minouche Chafik, a témoigné devant le Congrès américain au sujet d’incidents présumés d’antisémitisme contre des étudiants juifs sur son campus.

Les manifestants ont ensuite occupé certaines parties du campus, notamment le Hamilton Hall de l’université. La police de New York a arrêté des centaines de personnes à la suite de ces manifestations, qui ont également déclenché des mouvements similaires dans d’autres grandes universités américaines, ainsi que des contre-manifestations d’étudiants brandissant des drapeaux israéliens et américains.

Columbia a également pris la mesure inhabituelle d’annuler sa cérémonie d’ouverture cette année à la suite des manifestations, organisant uniquement des cérémonies de remise des diplômes propres à l’université.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com