PARIS: Sujet brûlant de cette fin de campagne, le dossier corse, avec la mort d'Yvan Colonna lundi soir et l'ouverture prochaine de pourparlers avec les élus locaux, met sous tension le président-candidat Macron, au moment où les autres prétendants à l'Elysée se déploient tous azimuts.
Le chef de l'Etat sortant a appelé sur France Bleu « au calme et à la responsabilité » en Corse, parce que « dans ce contexte, le plus important est que le calme se maintienne, que les discussions se poursuivent », a-t-il souligné en assurant que des « conséquences » seraient « tirées ».
L'agression le 2 mars dans la prison d'Arles du militant condamné à la perpétuité pour l'assassinat du préfet Erignac avait provoqué des manifestations parfois violentes, et poussé le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin à se rendre sur l'île.
Le calme est depuis revenu, mais l'exécutif surveille la situation comme le lait sur le feu.
Ce calme est le préalable qu'a posé Emmanuel Macron jeudi en définissant le cadre d'une discussion entre Etat et élus locaux qui s'ouvrira début avril: « débat sur l'inscription de la Corse dans la Constitution », « question des compétences et éventuellement de l'autonomie ». Avec « des lignes claires: dans la République française, la langue française est la langue ».
Les concurrents d'Emmanuel Macron dans la course à la présidence de la République l'accusent depuis d'électoralisme, de faiblesse face à la violence et d'inaction depuis cinq ans.
« Clarifier » rapidement
« Le gouvernement doit s’expliquer » sur les « très nombreuses questions » posées par « les circonstances » de l'agression, a exhorté mardi dans un communiqué la candidate RN Marine Le Pen, donnée à 20% (+2 points) des intentions de vote par un sondage Elabe, dans lequel elle réduit son écart avec le chef de l'Etat, à 27,5% (-3,5 points).
La mort dYvan Colonna signifie que « le djihad continue même en prison » et que « l’Etat d’Emmanuel Macron ne tient rien, ne maîtrise rien », a accusé l'autre candidat d'extrême droite, Eric Zemmour (Reconquête!), lors d'un point presse à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis).
Après l'agression, une inspection a été diligentée, une information judiciaire ouverte et des auditions parlementaires prévues, dont celle de Marc Ollier, chef d’établissement de la Maison centrale d’Arles, qui était initialement prévue mercredi à l'Assemblée nationale mais a été repoussée au 30 mars après la mort du militant.
La candidate LR Valérie Pécresse pose elle aussi le préalable du « retour à l'ordre » et se montre ouverte à la piste de l'autonomie, sous certaines conditions: « si on donne de l'autonomie, il faut que ce soit avec des obligations de résultat ».
« Appel au calme » également de l'écologiste Yannick Jadot, qui dénonce encore la « responsabilité » d'Emmanuel Macron pour avoir laissé « traîner » les discussions et prône une « autonomie de plein exercice, de plein droit, de la Corse ».
« Le groupe de la France insoumise à l'Assemblée nationale est favorable » à la création d'une commission d'enquête « pour déterminer la réalité des événements et créer une situation d'apaisement », a expliqué pour sa part Manuel Bompard, directeur de la campagne de Jean-Luc Mélenchon (LFI).
« quoi qu'il en coûte sur l'essence »
Accusé de fuir le débat dans une campagne écrasée par la guerre en Ukraine, Emmanuel Macron a défendu son bilan et répondu mardi aux questions des auditeurs de France Bleu pendant une heure. Sur le pouvoir d'achat, il a rappelé les mesures du gouvernement pour absorber la flambée des prix de l'énergie, vantant « un quoi qu'il en coûte sur l'essence ».
Le candidat a rappelé sa promesse d'« un chèque alimentaire pour aider les ménages les plus modestes et les classes moyennes », et de davantage d'intéressement et participation dans les entreprises, avec l'idée d'un « dividende salarié » lorsque des profits sont réalisés et des dividendes versés aux actionnaires.
A 19 jours du premier tour du 10 avril, les candidats, eux, se démultiplient.
Marine Le Pen s'est rendue dans son fief d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) avant d'être interrogée dans « La France dans les yeux » en soirée sur BFMTV, et le journal Valeurs Actuelles organise un « débat des valeurs » avec Eric Zemmour et Marion Maréchal, Jordan Bardella, Valérie Pécresse et son lieutenant Eric Ciotti.
A gauche, Anne Hidalgo organise une réunion publique à Limoges avec l'ex-président François Hollande, tandis que Philippe Poutou sera en meeting à Alençon (Orne).