LA HAYE : La Cour internationale de justice (CIJ) rendra mercredi son verdict dans une procédure lancée par Kiev, qui demande au plus haut tribunal de l'ONU d'ordonner à Moscou d'arrêter immédiatement son invasion de l'Ukraine.
La CIJ se prononcera lors d'une audience à partir de 16H00 (15H00 GMT) à La Haye, là où elle siège, à la suite d'une requête urgente de l'Ukraine introduite quelques jours après le début de l'invasion russe le 24 février.
Kiev estime que la Russie a illégalement justifié son invasion en alléguant à tort un génocide contre les populations russophones dans les régions ukrainiennes de Donetsk et Lougansk.
L'Ukraine souhaite que la CIJ, créée en 1946 pour régler les disputes entre les Etats, prenne des mesures d'urgence, dites conservatoires, pour ordonner à la Russie de "suspendre immédiatement les opérations militaires".
"La Russie doit être arrêtée, et la cour a un rôle à jouer pour arrêter cela", a déclaré lors d'une audience le représentant de l'Ukraine, Anton Korynevych.
En près de trois semaines de conflit, plus de trois millions de personnes ont fui l'Ukraine. Des délégations russe et ukrainienne ont repris mardi leurs pourparlers, alors que les frappes russes se multiplient sur Kiev et que l'offensive gagne l'ensemble du pays.
La Russie a refusé de comparaître lors des audiences tenues par la CIJ sur l'affaire, les 7 et 8 mars. Mais dans un document écrit, Moscou a réfuté la compétence de la cour sur la requête de l'Ukraine.
La Russie affirme que celle-ci ne relève pas du champ d'application de la Convention sur le génocide de 1948, sur laquelle Kiev fonde son dossier.
«Légitime défense»
"Le gouvernement de la Fédération de Russie demande respectueusement à la Cour de s'abstenir d'indiquer des mesures conservatoires et de retirer l'affaire de son rôle", a déclaré Moscou.
La Russie a ajouté qu'elle n'avait pas comparu devant les magistrats parce qu'elle n'avait pas eu assez de temps pour se préparer. Et l'invasion en Ukraine est un acte de "légitime défense".
Les jugements de la CIJ sont contraignants et sans appel, mais la cour n'a aucun moyen de les faire respecter. Le principal organe judiciaire de l'ONU fonde ses conclusions principalement sur les traités et les conventions.
L'Ukraine et la Russie sont toutes deux parties à la Convention des Nations unies sur le génocide de 1948. Kiev accuse Moscou d'entraver cette convention.
"Il est peu probable que la CIJ ne réponde pas aux demandes de l'Ukraine, au moins dans une certaine mesure ou entièrement", estime Marieke de Hoon, professeure adjointe de droit pénal international à l'Université d'Amsterdam.
Avant de se pencher sur le fond du conflit entre les deux pays, ce qui pourrait prendre des années, la CIJ n'a à ce stade qu'à déterminer s'il y a un différend à première vue sur l'interprétation de la convention sur le génocide, observe-t-elle.
Il ne sera "pas difficile" pour la juridiction de statuer que ce critère est atteint, déclare Marieke de Hoon auprès de l'AFP.
Est-ce que la Russie prendra ce jugement en compte? "Cela est une toute autre question", souligne-t-elle.