Blé, aluminium ou titane: Ukraine et Russie, clés de matières premières stratégiques

Une moissonneuse-batteuse décharge le blé sur un champ près du village de Krasne, dans la région de Chernihiv, à 120 km au nord de Kiev, le 5 juillet 2019 (Photo, AFP).
Une moissonneuse-batteuse décharge le blé sur un champ près du village de Krasne, dans la région de Chernihiv, à 120 km au nord de Kiev, le 5 juillet 2019 (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 08 mars 2022

Blé, aluminium ou titane: Ukraine et Russie, clés de matières premières stratégiques

  • La Russie est l'un des premiers producteurs mondiaux de gaz et de pétrole, et les investisseurs s'affolent d'éventuelles ruptures d'approvisionnement
  • Les cours du pétrole se sont approchés lundi de leurs plus hauts historiques, dépassant brièvement 130 dollars le baril pour la première fois depuis 2008

LONDRES: Blé et tournesol, ou titane, aluminium et nickel : la Russie et l'Ukraine jouent un rôle clé dans l'approvisionnement mondial en matières premières stratégiques, à usage industriel ou alimentaire.

Depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine, les cours mondiaux de nombre d'entre elles ont flambé à des niveaux jamais vus.

Gaz et pétrole

La Russie est l'un des premiers producteurs mondiaux de gaz et de pétrole, et les investisseurs s'affolent d'éventuelles ruptures d'approvisionnement en hydrocarbures.

Pour l'instant, les sanctions économiques évitent le secteur de l'énergie, mais les Etats-Unis, moins dépendants que l'Europe grâce à leur production nationale, évoquent désormais une interdiction d'importer du pétrole russe. La Russie est le deuxième exportateur mondial de brut.

Les cours du pétrole, qu'il s'agisse du Brent de mer du Nord ou du WTI américain, se sont approchés lundi de leurs plus hauts historiques, dépassant brièvement 130 dollars le baril pour la première fois depuis 2008.

Le prix du gaz atteint le même jour un record historique en Europe, à 345 euros le mégawattheure. L'Union européenne importe 40% de son gaz de Russie.

Produits agricoles: la Méditerranée dépendante de la mer Noire

La Russie, devenue en 2018 le premier exportateur mondial de blé, est "cruciale" pour alimenter la planète mais les capacités d'exportation de l'Ukraine inquiètent également. Les deux pays sont un "grenier à céréales" pour le reste du monde.

En Europe, le cours du blé flambe depuis le début du conflit pour atteindre lundi un prix inédit, à 450 euros la tonne.

L'Ukraine, quatrième exportateur mondial de maïs, était en passe de devenir le 3e exportateur de blé derrière la Russie et les Etats-Unis.

Pour faire sortir les céréales du pays sans passer par les ports, "l'opérateur des trains (ukrainien) veut exporter par le réseau ferré du blé, du maïs et du tournesol vers les pays voisins (Roumanie, Hongrie, Slovaquie et Pologne", commente le courtier Inter-Courtage dans une note.

D’autres pays comme la Bulgarie prennent des mesures pour limiter les exportations, la Hongrie a même interdit les ventes à l'étranger de céréales, ce qui contribue à resserrer l'offre d'un marché déjà très tendu avant l'invasion.

L'approvisionnement en céréales des pays comme l'Egypte, l'Algérie ou d'Afrique sub-saharienne, de plus en plus dépendants des blés russes et ukrainiens, "risque de poser problème si les bateaux transportant les blés originaires de la mer Noire sont arrêtés" avertit Philippe Chotteau, chef économiste de l'Institut de l'Élevage à Paris.

"Le Liban dépend à 50% pour son alimentation du blé russe et ukrainien. C'est dire si pour certains pays, cela va être plus dramatique que pour nous, les hausses de prix. Là-bas, ce seront des pénuries", craint aussi Christiane Lambert, présidente de la première organisation représentant les agriculteurs en Europe, la Copa-Cogeca.

Selon le cabinet spécialisé Agritel, "c'est sur l'huile de tournesol que pèse le plus grand danger". 

Célèbre pour ses champs de tournesol à perte de vue, l'Ukraine est premier producteur mondial de l'oléagineux et premier exportateur mondial de son huile et "la situation est très tendue sur le marché mondial des huiles", analyse Sébastien Poncelet, expert chez Agritel.

Les marchés financiers vulnérables face à la guerre en Ukraine

Les marchés ont affiché leur vulnérabilité lundi face à la guerre en Ukraine, toujours dans l'incapacité d'anticiper l'évolution et l'impact économique du conflit qui provoque une flambée des prix des matières premières et une forte volatilité.

Après des replis de plus de 4% en début de journée, certains indices européens ont fait une petite incursion dans le vert avant de finalement battre en retraite pour finir dans le rouge: Francfort a lâché 1,98%, Paris 1,31%, Milan 1,36% et Londres 0,40%.

A New York, Wall Street a terminé en sévère baisse, inquiète de l'impact sur l'économie et l'inflation de la guerre en Ukraine et des sanctions: l'indice Dow Jones a perdu 2,37%, le Nasdaq a plongé de 3,62% et le S&P 500 a cédé 2,95%.

Métaux : automobile et aéronautique en première ligne

Les métaux industriels "les plus exposés" aux sanctions de la Russie par la communauté internationale sont l'aluminium, le nickel et le palladium, estime Capital Economics.

Le groupe russe Rusal est le deuxième producteur industriel d'aluminium du monde. Ce métal a atteint un nouveau record historique lundi sur la Bourse des métaux de Londres (LME), à 4 073,50 dollars la tonne.

Pour le nickel, il y a Nornickel Norilsk, dirigé par l'oligarque Vladimir Potanine. En 2019, la Russie était le troisième producteur de minerai de nickel derrière l'Indonésie et les Philippines, mais elle est en deuxième position pour le nickel raffiné, derrière la Chine. 

Après l'invasion militaire, Capital Economics estime que 7% du marché mondial du nickel raffiné "pourrait être affecté" par d'éventuelles sanctions. 

Or, le métal, qui a atteint lundi un record historique à 55 000 dollars la tonne, est l'un des plus demandés sur la planète dans les usines de batteries électriques, censées permettre à l'industrie automobile d'abandonner le pétrole.

Pour le palladium, qui décroche également un record absolu à 3 442,47 dollars l'once, dont la Russie contrôle 50% du marché mondial, l'automobile est aussi en première ligne. Il est utilisé pour la fabrication des pots catalytiques. 

Le titane, métal prisé des avionneurs pour sa légèreté et sa très haute résistance, est également un enjeu indirect du conflit. La société russe VSMPO-Avisma, fondée en 1941 dans l'Oural, est le premier fournisseur de l'aéronautique mondiale, selon le directeur général du motoriste aéronautique Safran, Olivier Andriès, qui dit disposer de "quelques mois de stocks" devant lui.

VSMPO-Avisma est également le premier fournisseur de Boeing, qui a annoncé lundi avoir suspendu ses achats de titane en provenance de Russie.

Ukraine: inquiète pour l'économie, Wall Street termine en forte baisse

La Bourse de New York a conclu une séance maussade en forte baisse lundi, inquiète de la flambée des cours du pétrole, ainsi que de l'impact sur l'économie mondiale de la guerre en Ukraine et des sanctions contre la Russie.

La Russie a mis en garde lundi contre des "conséquences catastrophiques" pour le marché mondial de la mise en place d'un embargo occidental sur le pétrole russe, discuté par Washington et l'Union européenne comme mesure de riposte à l'intervention militaire de Moscou en Ukraine.

"Il est tout à fait évident que le refus d'acheter le pétrole russe va aboutir à des conséquences catastrophiques pour le marché mondial", a menacé le vice-Premier ministre russe, chargé de l'Énergie, Alexandre Novak.

 


Israël : Netanyahu revient sur son choix pour la direction du Shin Bet

Benjamin Netanyahu, Premier ministre israélien (Photo AFP)
Benjamin Netanyahu, Premier ministre israélien (Photo AFP)
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  • La nomination de l'amiral Sharvit a été critiquée aux États-Unis par le sénateur républicain Lindsey Graham, proche du président américain Donald Trump. 
  • M. Netanyahu avait annoncé la nomination d'Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet lundi, malgré le gel par la Cour suprême du limogeage du directeur en exercice de l'agence, Ronen Bar.

JERUSALEM : Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a annoncé mardi être revenu sur son choix pour le nouveau directeur de l'Agence de la sécurité intérieure (Shin Bet) après que son candidat a été critiqué à Washington par un influent sénateur.

« Lundi, M. Netanyahu a de nouveau rencontré le vice-amiral [Eli] Sharvit à propos de sa nomination à la tête du Shin Bet », indique un communiqué du Bureau du Premier ministre.

Il l'a « remercié [...] d'avoir répondu à l'appel du devoir, mais l'a informé qu'après plus ample considération, il avait l'intention d'examiner d'autres candidatures », a indiqué un communiqué du bureau de M. Netanyahu.

Ce revirement soudain survient après que la nomination de l'amiral Sharvit a été critiquée aux États-Unis par le sénateur républicain Lindsey Graham, proche du président américain Donald Trump. 

« S'il est vrai que l'Amérique n'a pas de meilleur ami qu'Israël, la nomination d'Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet est plus que problématique », a écrit M. Graham sur X.

« Mon conseil à mes amis israéliens est de changer de cap et d'examiner plus minutieusement le passé de leur candidat », a-t-il ajouté, notant que des « déclarations » de l'amiral Sharvit « sur le président Trump et sa politique créeraient des tensions inutiles à un moment critique ».

M. Netanyahu avait annoncé la nomination d'Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet lundi, malgré le gel par la Cour suprême du limogeage du directeur en exercice de l'agence, Ronen Bar.

La décision de démettre M. Bar de ses fonctions, en qui M. Netanyahu dit ne plus avoir confiance, est fortement critiquée en Israël où les manifestations se multiplient contre le gouvernement et contre ce qui est perçu par ses opposants comme une dérive dictatoriale du Premier ministre.


Ukraine : Poutine « reste ouvert à tout contact » avec Trump, après ses critiques selon le Kremlin

Zelensky, Trump et Poutine (Photo AFP)
Zelensky, Trump et Poutine (Photo AFP)
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  • « Le président reste ouvert à tout contact avec le président Trump », a indiqué le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.
  • Ce changement de ton a tranché avec la dynamique de rapprochement impulsée par Donald Trump et Vladimir Poutine depuis le retour du premier à la Maison Blanche en janvier.

MOSCOU : Vladimir Poutine « reste ouvert à tout contact » avec son homologue américain Donald Trump, a affirmé lundi le Kremlin, après les critiques du locataire de la Maison Blanche à l'encontre du président russe malgré leur rapprochement entamé depuis plusieurs semaines.

« Le président reste ouvert à tout contact avec le président Trump », a indiqué le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, lors de son briefing quotidien, précisant qu'« aucun » nouvel appel entre les deux dirigeants n'était « prévu pour l'instant ».

Donald Trump a dit à la chaîne américaine NBC être « très énervé, furieux » envers son homologue russe, après que ce dernier eut évoqué l'idée d'une « administration transitoire » en Ukraine, sans son président actuel, Volodymyr Zelensky.

Ce changement de ton a tranché avec la dynamique de rapprochement impulsée par Donald Trump et Vladimir Poutine depuis le retour du premier à la Maison Blanche en janvier.

Ces dernières semaines, Moscou et Washington ont convenu d'une remise à plat de leurs relations bilatérales, très fortement dégradées par des années de tensions, qui ont culminé depuis 2022 avec le déclenchement de l'assaut russe contre l'Ukraine, soutenue par les États-Unis.

Donald Trump, qui souhaite mettre fin au conflit le plus rapidement possible, a également menacé la Russie de nouvelles taxes sur le pétrole russe si aucun accord n'était trouvé.

Or, la manne financière issue de la vente de son or noir est vitale pour Moscou, qui doit financer son offensive en Ukraine, particulièrement coûteuse.

Le président russe Vladimir Poutine a rejeté plus tôt ce mois-ci la proposition de cessez-le-feu inconditionnel de Donald Trump en Ukraine, que Kiev avait pourtant acceptée sous pression américaine.

Lundi, Dmitri Peskov a martelé que la Russie continuait à travailler « tout d'abord sur l'établissement de relations bilatérales et nous travaillons également sur la mise en œuvre de certaines idées liées au règlement ukrainien ».

« Le travail est en cours. Il n'y a pas encore de détails précis. Il s'agit d'un processus qui prend du temps, probablement en raison de la complexité du sujet », a-t-il poursuivi.


Lutte contre l'immigration clandestine : plus de 40 pays réunis à Londres

Des sauveteurs britanniques aident une vingtaine de migrants sur un bateau semi-rigide essayant de traverser la Manche depuis la France (Photo, AFP).
Des sauveteurs britanniques aident une vingtaine de migrants sur un bateau semi-rigide essayant de traverser la Manche depuis la France (Photo, AFP).
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  • Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, accueille ce lundi à Londres les représentants d'une quarantaine de pays pour un sommet de deux jours dédié à la lutte contre l'immigration illégale.
  • Les trois premiers mois de l'année ont toutefois été marqués par un nouveau record d'arrivées, avec un total de 5 840 personnes ayant traversé la Manche à bord de ces embarcations de fortune.

LONDRES : Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, accueille ce lundi à Londres les représentants d'une quarantaine de pays pour un sommet de deux jours dédié à la lutte contre l'immigration illégale, un dossier prioritaire pour Londres.

Le dirigeant travailliste, qui a pris ses fonctions en juillet dernier, a promis, comme ses prédécesseurs conservateurs, d'endiguer le phénomène des « small boats » (petits bateaux) en luttant contre les réseaux de passeurs.

Les trois premiers mois de l'année ont toutefois été marqués par un nouveau record d'arrivées, avec un total de 5 840 personnes ayant traversé la Manche à bord de ces embarcations de fortune.

Keir Starmer donnera le coup d'envoi de ce « premier grand sommet international organisé au Royaume-Uni pour faire face à l'urgence de l'immigration clandestine », qui se tiendra sous la houlette de la ministre de l'Intérieur Yvette Cooper.

Le ministre français Bruno Retailleau et son homologue allemande Nancy Faeser sont attendus, de même que des représentants du reste de l'Europe, d'Asie, du Moyen-Orient, d'Afrique et d'Amérique du Nord, y compris des États-Unis.

Les discussions porteront sur la collaboration entre les États pour démanteler les réseaux de passeurs de migrants, notamment vers le Royaume-Uni et les pays de l'Union européenne.

« Je ne crois tout simplement pas qu'il soit impossible de s'attaquer à la criminalité organisée liée à l'immigration », a déclaré le dirigeant travailliste dans un communiqué diffusé dimanche par le ministère de l'Intérieur.

- « Consensus mondial » -

« Nous devons combiner nos ressources, partager nos renseignements et nos tactiques, et nous attaquer au problème en amont », doit-il ajouter.

Ce sommet s'inscrit dans le prolongement des discussions que Mme Cooper avait eues en décembre avec ses homologues belge, allemand, français et néerlandais.

Les cinq pays avaient alors signé un plan d'action commun destiné à renforcer la coopération pour lutter contre ces réseaux de passeurs de migrants.

Le sommet de cette semaine réunira des représentants de pays de départ de migrants, comme le Vietnam ou l'Irak, ainsi que de pays de transit, comme ceux des Balkans.

Il réunira également le directeur de la Border Force, l'agence responsable des opérations de contrôle de la frontière au Royaume-Uni, ainsi que des représentants d'Interpol, d'Europol et d'Afripol.

Selon le ministère britannique de l'Intérieur, les ministres discuteront de l'équipement, de l'infrastructure et des faux papiers que les bandes criminelles utilisent pour faire entrer des personnes illégalement.

Ils examineront également le fonctionnement des filières et chercheront à « établir un consensus mondial sur la lutte » contre le recrutement de migrants en ligne.

Les Britanniques souhaitent également voir avec la Chine comment elle peut cesser d'exporter des moteurs et d'autres pièces détachées de petits bateaux utilisés pour les traversées de la Manche.

Keir Starmer est sous pression, face à la montée du parti anti-immigration Reform UK de Nigel Farage, qui a obtenu environ quatre millions de voix lors des élections générales de juillet, un résultat sans précédent pour un parti d'extrême droite.

Le Premier ministre a comparé les passeurs d'immigrés clandestins à des « terroristes ». En réponse, son gouvernement a introduit un projet de loi conférant aux forces de l'ordre des pouvoirs comparables à ceux dont elles disposent en matière de lutte antiterroriste, afin de combattre ces réseaux.

En février, le gouvernement a durci les règles d'acquisition de la nationalité pour la rendre pratiquement impossible à une personne arrivée illégalement au Royaume-Uni.

Il a aussi annoncé des règles plus strictes en matière de droit du travail.

« Fermer les yeux sur le travail illégal fait le jeu des passeurs qui tentent de vendre des places sur des bateaux peu solides et surchargés en promettant un travail et une vie au Royaume-Uni », a déclaré dimanche Mme Cooper, citée dans un communiqué de son ministère.

Au total, plus de 157 770 migrants sont arrivés au Royaume-Uni en traversant la Manche à bord de petites embarcations depuis que le gouvernement a commencé à collecter des données en 2018.