La Chine, une bouée de sauvetage limitée pour Moscou

L'amitié sino-russe est un «exemple de relation digne, où chacun aide et soutient l'autre dans son développement», a estimé le mois dernier Vladimir Poutine, reçu en grande pompe à Pékin pour les Jeux olympiques. (Photo, AFP)
L'amitié sino-russe est un «exemple de relation digne, où chacun aide et soutient l'autre dans son développement», a estimé le mois dernier Vladimir Poutine, reçu en grande pompe à Pékin pour les Jeux olympiques. (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Vendredi 04 mars 2022

La Chine, une bouée de sauvetage limitée pour Moscou

  • La Chine, qui s'abstient de condamner l'intervention russe et réfute le terme «d'invasion», s'oppose à toute sanction contre Moscou
  • Soucieux de préserver ses intérêts économiques et de ne pas s'attirer les foudres de l'Occident, Pékin n'est pas prêt à tout pour aider Moscou à contourner les sanctions

PÉKIN : La Russie compte sur la Chine pour atténuer l'effet des sanctions liées à son invasion de l'Ukraine, mais Pékin n'est pas prêt à tous les sacrifices au nom de l'amitié, préviennent des analystes.

Les pays occidentaux ont mis en place un train de sanctions visant à paralyser le secteur bancaire et la monnaie russes après l'invasion de l'Ukraine la semaine dernière.

Plusieurs banques ont été exclues de la plateforme interbancaire Swift, un rouage essentiel de la finance mondiale destiné à faciliter les transferts. 

La Chine, qui s'abstient de condamner l'intervention russe et réfute le terme "d'invasion", s'oppose elle à toute sanction contre Moscou.

Depuis l'invasion russe de la Crimée en 2014 et de précédentes sanctions contre le régime poutinien, les relations économiques et politiques entre Moscou et Pékin se sont considérablement renforcées.

Fort de son rôle dans le commerce mondial, le géant asiatique dispose de très loin des plus importantes réserves de change en euros et en dollars.

La Chine a "les moyens financiers d'aider la Russie" et est le seul pays à pouvoir le faire, affirme l'économiste Paola Subacchi, de l'Université de Londres. 

«Chacun aide et soutient»

L'amitié sino-russe est un "exemple de relation digne, où chacun aide et soutient l'autre dans son développement", a estimé le mois dernier Vladimir Poutine, reçu en grande pompe à Pékin pour les Jeux olympiques.

En délicatesse avec Washington, les deux géants tendent ainsi à réduire leurs échanges en dollars, par crainte de sanctions qu'offre l'extraterritorialité du billet vert.  

"Quand le rouble avait chuté à cause des sanctions" liées à la Crimée, la Chine a accepté d'être payée en yuans, sa devise, pour compenser la hausse des importations en dollars, souligne Mme Subacchi.

Mais soucieux de préserver ses intérêts économiques et de ne pas s'attirer les foudres de l'Occident, Pékin n'est pas prêt à tout pour aider Moscou à contourner les sanctions.

Le géant asiatique dispose de son propre système de paiement interbancaire transfrontalier (CIPS), qui fonctionne exclusivement en yuans.

"Le CIPS peut en théorie partiellement remplacer Swift", indique Juuso Kaaresvirta, spécialiste des échanges Chine-Russie, à la Banque de Finlande.

Mais les banques chinoises ne "s'y risqueront pas" de peur de s'exposer à des sanctions américaines qui les priveraient d'accès au dollar, assure M. Kaaresvirta.

Plusieurs banques publiques chinoises seraient ainsi réticentes à financer des achats de matières premières en Russie, selon l'agence Bloomberg.

Basée à Pékin, la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures (BAII), qui est la réponse chinoise à la Banque mondiale, a suspendu jeudi ses activités avec la Russie et le Belarus, visés par des sanctions.

«Bouée de sauvetage»

L'essentiel des exportations russes concerne les hydrocarbures, dont la Chine ne cesse d'augmenter les volumes ces dernières années.

Les importations chinoises de gaz ne représentent toutefois qu'une infime partie de celles de l'Union européenne.

Le mois dernier, Pékin et Moscou ont scellé un nouvel accord pour la fourniture de 10 milliards de m3 de gaz naturel à la Chine en provenance de l'extrême-orient russe. Les paiements se feront en euros.

La Chine et la Russie ont plusieurs projets de gazoducs, dont le premier est entré en service en 2019.

Le géant asiatique risque cependant de mesurer avec "grande prudence" son soutien à la Russie, d'autant que l'Ukraine est aussi un des greniers à blé de Pékin, estime Jie Yu du centre de réflexion Chatham House à Londres.

Le pouvoir communiste veut s'éviter des sanctions occidentales, sans pour autant "tourner le dos" à la Russie, observe Gary Hufbauer, chercheur au centre de réflexion Peterson Institute for International Economics (PIIE) à Washington.

Au lendemain de l'invasion de l'Ukraine, l'Australie avait accusé la Chine d'être la "bouée de sauvetage" de Moscou après la levée de restrictions sur ses importations de blé russe.

L'accord, connu depuis début février mais annoncé le jour de l'invasion, permet des importations depuis toutes les régions russes, contre sept seulement précédemment.

"Les affaires vont reprendre normalement", affirme l'analyste Chen Long, du cabinet Plenum, subodorant que Pékin n'ira pas plus loin que les autres pays.

Et de souligner que "l'Allemagne achète toujours du gaz russe". Pour autant, "est-ce une bouée de sauvetage de la Russie?"


Trump annonce des discussions «directes» avec l'Iran sur le nucléaire

Donald Trump a créé la surprise en annonçant que Washington menait des discussions "directes" avec l'Iran sur son programme nucléaire, en recevant lundi le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, reparti sans les concessions commerciales qu'il espérait obtenir. (AFP)
Donald Trump a créé la surprise en annonçant que Washington menait des discussions "directes" avec l'Iran sur son programme nucléaire, en recevant lundi le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, reparti sans les concessions commerciales qu'il espérait obtenir. (AFP)
Short Url
  • "Nous avons des discussions directes avec l'Iran. Elles ont commencé, elles se poursuivront samedi, nous aurons une très grande réunion", a déclaré à la presse le président américain
  • Il a ensuite assuré que cette rencontre se tiendrait samedi "à très haut niveau" et même "quasiment au plus haut niveau"

WASHINGTON: Donald Trump a créé la surprise en annonçant que Washington menait des discussions "directes" avec l'Iran sur son programme nucléaire, en recevant lundi le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, reparti sans les concessions commerciales qu'il espérait obtenir.

"Nous avons des discussions directes avec l'Iran. Elles ont commencé, elles se poursuivront samedi, nous aurons une très grande réunion", a déclaré à la presse le président américain.

Il a ensuite assuré que cette rencontre se tiendrait samedi "à très haut niveau" et même "quasiment au plus haut niveau".

Il s'agit d'une annonce spectaculaire de la part du président américain, notoirement peu friand de tractations diplomatiques complexes impliquant plus de deux parties, alors que l'Iran avait rejeté dimanche tout dialogue direct avec Washington.

Téhéran a confirmé sa position après cette annonce.

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, doit avoir samedi à Oman des "entretiens indirects" avec l'émissaire américain pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, a annoncé mardi l'agence iranienne Tasnim.

"Il s'agit autant d'une opportunité que d'un test. La balle est dans le camp de l'Amérique", avait écrit plus tôt M. Araghchi sur le résau social X, en annonçant la tenue de discussions "de haut niveau indirectes".

Proches alliés durant la monarchie Pahlavi, les deux pays n'ont plus de relations diplomatiques depuis 1980 et la prise d'otages de diplomates américains dans leur ambassade à Téhéran, dans la foulée de la Révolution islamique.

Mais ils échangent indirectement par le biais de l'ambassade de Suisse à Téhéran. Le sultanat d'Oman a plusieurs fois joué un rôle de médiateur, et le Qatar dans une moindre mesure.

"Grand danger" 

"Nous traitons directement avec eux. Et peut-être que nous aurons un accord", a dit lundi le président américain, qui avait retiré avec fracas les Etats-Unis d'un accord international avec l'Iran lors de son premier mandat, en 2018.

Cet accord, conclu en 2015, prévoyait la levée de certaines sanctions en échange d'un encadrement des activités nucléaires iraniennes.

Donald Trump a dit lundi que si un nouvel accord était trouvé, il serait "différent et peut-être beaucoup plus robuste". Mais il a ajouté que l'Iran serait "en grand danger" si les discussions n'aboutissaient pas.

En attendant, l'Iran doit mener mardi à Moscou des consultations sur ce même dossier avec ses proches partenaires, la Russie et la Chine.

Benjamin Netanyahu, tenant d'une ligne dure face à Téhéran, a appelé à ce que l'Iran ne produise "jamais" d'arme nucléaire. Il a plaidé pour que les tractations diplomatiques débouchent sur un démantèlement "complet", évoquant l'exemple de la Libye.

Concernant les droits de douane, autre enjeu de sa visite, le Premier ministre israélien a promis d'"éliminer le déficit commercial des Etats-Unis" vis-à-vis d'Israël.

Il est le premier dirigeant étranger reçu par le président américain depuis l'annonce la semaine dernière des nouveaux droits de douane, qui ont provoqué un coup de tabac sur les places financières mondiales.

"Un autre cessez-le-feu" 

Le dirigeant israélien est reparti sans promesse d'exemption ou de réduction des droits de douane de 17%, qui seront imposés sur les importations en provenance de son pays à compter de mercredi.

Un journaliste a demandé à Donald Trump s'il comptait revenir sur cette taxe, et il a répondu: "Peut-être pas. N'oubliez pas que nous aidons beaucoup Israël".

Israël avait tenté en vain d'échapper aux nouvelles taxes en levant mardi la totalité des droits de douane restants sur les 1% de marchandises américaines encore concernées.

Benjamin Netanyahu a par ailleurs déclaré que Israël oeuvrait à un nouvel "accord" sur la libération des otages retenus par le Hamas à Gaza.

"Nous faisons tout notre possible pour faire sortir les otages. Nous envisageons un autre cessez-le-feu, nous verrons bien ce qui se passera", a renchéri Donald Trump.

Après deux mois d'une trêve fragile, l'armée israélienne a repris le 18 mars son offensive militaire dans la bande de Gaza, d'où le mouvement palestinien avait lancé une attaque sans précédent le 7 octobre 2023 en Israël.

La récente trêve a permis le retour de 33 otages israéliens, dont huit sont décédés, en échange de la libération de quelque 1.800 Palestiniens détenus par Israël.

Sur les 251 otages enlevés lors de l'attaque du Hamas, 58 sont toujours retenus dans le territoire palestinien, dont 34 sont morts selon l'armée israélienne.


L'Iran refuse de négocier directement avec les États-Unis

Un Iranien marche sous une bannière du guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, lors d'une journée pluvieuse à Téhéran, le 5 avril 2025. (Photo ATTA KENARE / AFP)
Un Iranien marche sous une bannière du guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, lors d'une journée pluvieuse à Téhéran, le 5 avril 2025. (Photo ATTA KENARE / AFP)
Short Url
  • Le mois dernier, Donald Trump a adressé une lettre aux dirigeants iraniens dans laquelle il propose d'engager des négociations sur leur programme nucléaire
  • « Des négociations directes avec une partie qui menace constamment de recourir à la force (...) et dont les différents responsables expriment des positions contradictoires n'auraient pas de sens », a déclaré le ministre iranien des Affaires étrangères.

TEHERAN : L'Iran a rejeté dimanche tout dialogue direct avec les États-Unis, estimant que cela « n'aurait aucun sens », alors que le président américain Donald Trump suggère des pourparlers directs et menace de bombarder le pays en cas d'échec de la diplomatie.

Les pays occidentaux, les États-Unis en tête, soupçonnent l'Iran de vouloir se doter de l'arme nucléaire depuis des décennies. Téhéran rejette ces allégations et affirme que ses activités nucléaires n'ont qu'une finalité civile, notamment en matière d'énergie.

Le mois dernier, Donald Trump a adressé une lettre aux dirigeants iraniens dans laquelle il propose d'engager des négociations sur leur programme nucléaire. Mais le président américain a également menacé de bombarder l'Iran en cas d'échec de la diplomatie et a pris des sanctions supplémentaires à l'encontre du secteur pétrolier iranien. 

« Des négociations directes avec une partie qui menace constamment de recourir à la force (...) et dont les différents responsables expriment des positions contradictoires n'auraient pas de sens », a déclaré samedi soir le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi, selon des propos rapportés dimanche par son ministère.

« Mais nous restons attachés à la diplomatie et sommes prêts à essayer la voie de négociations indirectes », a ajouté M. Araghchi. 

Jeudi, le président américain a affirmé qu'il préférait mener des « négociations directes » avec l'Iran.

« À quoi bon menacer si l'on veut négocier ? », s'est interrogé samedi le président iranien, Massoud Pezeshkian, élu l'an dernier avec la promesse de reprendre le dialogue avec l'Occident afin d'obtenir un allègement des sanctions pour relancer l'économie.

En 2015, l'Iran a conclu un accord avec les membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU (Chine, Russie, États-Unis, France et Royaume-Uni) et l'Allemagne pour encadrer ses activités nucléaires.

Le texte prévoyait un allègement des sanctions en échange d'une limitation des activités nucléaires iraniennes. 

En 2018, Donald Trump a retiré son pays de l'accord avec fracas durant son premier mandat et rétabli les sanctions. En guise de représailles, l'Iran s'est désengagé du texte et a accéléré son programme nucléaire.

L'Iran ne cherche pas à se doter de l'arme nucléaire, mais « n'aura d'autre choix que de le faire » en cas d'attaque contre le pays, a mis en garde lundi Ali Larijani, un proche conseiller du guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei.


Netanyahu rencontrera lundi Trump à la Maison Blanche

Le président américain Donald Trump et  le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu (Photo AFP)
Le président américain Donald Trump et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu (Photo AFP)
Short Url
  • Le président américain Donald Trump accueillera le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu à la Maison Blanche, lundi, pour aborder plusieurs sujets, des droits de douane à l'Iran.
  • Israël se verra ainsi infliger des tarifs douaniers s'élevant à 17 %.

JERUSALEM : Le président américain Donald Trump accueillera le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu à la Maison Blanche, lundi, pour aborder plusieurs sujets, des droits de douane à l'Iran, ont annoncé samedi ses services.

« Les deux dirigeants vont s'entretenir des droits de douane, des efforts pour ramener les otages israéliens, des relations israélo-turques, de la menace iranienne et de la lutte contre la Cour pénale internationale », a déclaré le bureau du Premier ministre dans un communiqué. 

Une grande partie des produits que les États-Unis importent du reste du monde sont soumis, depuis samedi, à des droits de douane additionnels de 10 %, mais l'addition sera encore plus lourde dès le 9 avril pour certains pays qui exportent plus qu'ils n'importent auprès du partenaire américain.

Israël se verra ainsi infliger des tarifs douaniers s'élevant à 17 %.

Cette annonce intervient également au moment où un nouveau cessez-le-feu semble lointain dans le territoire palestinien de Gaza, où l'armée israélienne a intensifié ses opérations, et où les tensions autour du nucléaire iranien s'intensifient.

Le président américain, qui a appelé Téhéran à entamer des négociations sur son programme nucléaire, a menacé ces derniers jours de bombarder l'Iran en cas d'échec de la diplomatie.

L'Iran se dit prêt à discuter avec les États-Unis, mais a refusé des pourparlers directs sous la menace et la pression.