DUBAÏ: L'ère du numérique a transformé la façon dont les gens travaillent et vivent. Elle est devenue plus évidente à mesure que la pandémie de coronavirus a forcé chacun à apprendre, à travailler et à communiquer dans un environnement en ligne.
Lors d’un débat, intitulé «l'avenir du travail», durant le 2e jour du Sommet de la société civile 20 (C20), un groupe d'experts et de chefs d'entreprise ont échangé sur le leadership à l'ère du numérique.
Le C20 est l'un des huit groupes d'engagement officiels du Groupe des vingt (G20), qui permet aux représentants de la société civile de faire valoir une voix non gouvernementale et non commerciale.
Interrogés lors de la session «Repenser le leadership à l’ère numérique», ils ont déclaré être d’accord sur le fait que le leadership doit travailler de pair avec la technologie et qu’« il doit exister une meilleure compréhension entre le leadership et l’autorité en cette ère numérique».
«Le leadership a parfois besoin d'autorité, parfois non», explique Salma al-Yassir, cofondatrice de Womaneze, soulignant qu'il est important de comprendre la différence entre les deux.
En outre, ajoute Salma al-Yassir, le manque de compréhension crée des craintes sous-jacentes, conduisant à une certaine résistance au changement comme le passage à un travail axé sur la technologie.
Pour Roberto Croci, directeur général de Microsoft pour les start-up de la région Moyen-Orient, le leadership à l'ère du numérique ne concerne pas la technologie, mais plutôt les personnes.
«Il est centré sur l'humain. Les dirigeants ne comprennent pas bien leur rôle, pensant toujours à eux-mêmes… mais il s'agit des autres», explique Roberto Croci au panel.
«Un leader doit se révéler vulnérable, c’est normal d'être humain. Un bon leader devrait poser les bonnes questions, car il ne possède pas toutes les réponses.»
Anastasia Dedyukhina, fondatrice de Consciously Digital, pense aussi que «le leadership devrait travailler de pair avec la technologie».
«Un grand leader n'écoute pas seulement les gens, mais aussi les suggestions. La pandémie de coronavirus est un exemple parfait, si un dirigeant écoute les employés, cela revigorera le leadership», ajoute-t-elle.
Mais Mme Dedyukhina avertit: «Les outils technologiques ne sont pas nécessairement neutres. Certains finissent par mettre les travailleurs en laisse numérique.»
«De petites choses – comme la communication numérique par rapport à la communication personnelle – font une grande différence… l'adoption de la technologie a un effet sur les employés», explique-t-elle.
«La technologie fait des ravages chez les gens. Ce n’est pas notre état naturel. On ne peut pas s'attendre à ce que nous restions devant un écran pendant des heures. Les entreprises doivent en être conscientes et en tenir compte», commente Salma al-Yassir.
Pour Roberto Croci, certains dirigeants n’actualisent pas leur façon d’évaluer les personnes sur leurs performances.
«Les gens doivent être récompensés sur les résultats et l'impact. Qui se soucie si vous travaillez neuf heures sur votre ordinateur portable? Le comportement des dirigeants montrent comment respecter les employés», explique M. Croci.
«Nous voyons des signes de “fatigue numérique” dans cette nouvelle normalité. Les longues réunions ne sont pas normales et ne sont pas saines.»
Les personnes interrogées ont également émis des opinions critiques sur le télétravail, devenu la norme pour les travailleurs du monde entier depuis la pandémie de coronavirus.
«À court terme travailler à domicile peut être formidable, mais les six derniers mois ont plus ressemblé à de la survie», décrit Anastasia Dedyukhina. Elle mentionne une étude dans laquelle les employés à domicile déclarent qu’il sont impatients de retourner au travail de bureau, car ils craignent que leur évolution professionnelle ne soit compromise par leur absence physique.
«L'idée de s'approprier une journée semble au départ géniale mais cela ne dure pas, puis cela devient fatiguant. Il est peut-être temps pour les dirigeants de se remettre en question et de donner aux travailleurs le choix de travailler à domicile ou au bureau», reprend Salma al-Yassir.
«Il est peut-être temps de faire une combinaison de propositions, de faire confiance aux gens dans leur travail.»
«Comment évaluez-vous vos employés?… Vous ne devez pas nécessairement être un Google ou un Microsoft. C'est la façon dont vous vous souciez d’eux qui est importante. Considérez vos employés comme des êtres humains. Demandez-vous si vous accepteriez les mêmes conditions… Nous avons besoin d’un leadership centré sur l’humain en ces temps difficiles», ajoute M. Croci de Microsoft.
Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com