RIYAD: Le ministre chypriote des Affaires étrangères a affirmé dans une interview exclusive accordée à Arab News, que la position de son gouvernement est alignée sur celle des autres États membres de l’UE, qui soutiennent l’intégrité territoriale de l’Ukraine et de tous les pays du monde.
En tant que nation souffrant de l’occupation d’une partie de son propre territoire, on ne pouvait que s’attendre à ce que Chypre adopte une telle position, a déclaré Ioannis Kasoulides mardi, en faisant référence au mini-État séparatiste de Chypre du Nord, qui n’est reconnu que par la Turquie.
«Chypre partage la même position que les autres membres de l’UE. Imaginez que Chypre, qui a un problème avec l’occupation d’une partie de son pays, ait une position différente de celle du soutien à l’intégrité territoriale des pays», a-t-il souligné.
Faisant allusion à un accord historique portant sur une série de questions mondiales, signé en 1975 par trente-cinq pays dans la capitale finlandaise, Helsinki, Kasoulides a ajouté être favorable «aux accords d’Helsinki, qui impliquent l’inviolabilité des frontières et le non règlement des différends par des moyens militaires.»
À l’instar de nombreux autres pays, Chypre a été prise au dépourvu par le conflit ukrainien, car elle entretient des relations étroites avec la Russie et l’Ukraine.
Le pays méditerranéen compte une population de 1,22 millions d’habitants. Sa principale industrie est le tourisme, qui représente environ 18% de son économie. La Russie et l’Ukraine sont les principaux contributeurs de ces revenus.
Plus de 780 000 touristes russes ont visité Chypre en 2019 avant le début de la pandémie de Covid-19, sur un total d’environ 3,9 millions. La même année, plus de 95 000 touristes ukrainiens sont entrés dans le pays.
«Nous entretenons de bonnes relations avec la Russie, dans le secteur financier, et de nombreux touristes (russes) visitent Chypre», a indiqué Kasoulides.
«Nous aurions aimé préserver ces bonnes relations, mais lorsqu’il s'agit de principes, de valeurs et de l’unité de l’UE, j’ai bien peur que ce soit ce qui prévale.»
L’interview avec le ministre des Affaires étrangères, Ioannis Kasoulides, a été réalisée après sa rencontre avec le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, et le ministre d’État aux Affaires étrangères, Adel al-Joubeir.
Mardi, le prince héritier a reçu le président de Chypre, Nicos Anastasiades, au palais d’Al-Yamamah à Riyad.
Après une cérémonie de bienvenue, le prince héritier et le président Anastasiades ont discuté des relations et de la coopération entre les deux pays, et ont passé en revue les efforts visant à renforcer la coordination dans divers domaines, ainsi que les questions régionales et internationales d’intérêt commun.
La visite historique d’Anastasiades témoigne de la solidité des liens bilatéraux entre l’Arabie saoudite et Chypre depuis l’établissement de leur relations diplomatiques. Ils ont intensifié la nature stratégique de leur partenariat et renforcé leurs liens politiques, commerciaux et socio-économiques.
Le mois dernier, une délégation saoudienne dirigée par le ministre des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhane, s’est rendue à Nicosie, la capitale de Chypre, en tant que premiers invités de Kasoulides après sa prise de fonctions.
«Tout d’abord, permettez-moi de dire que nous sommes venus ici pour marquer le début d’une nouvelle étape dans nos relations», a déclaré Kasoulides. «Nous entretenons de bonnes relations depuis cinq ans maintenant. Nous passons aujourd’hui à des relations beaucoup plus rapides, plus organisées et plus ciblées.»
«Nous avons annoncé publiquement notre soutien à la candidature de l’Arabie saoudite à l’Expo 2030», a-t-il mentionné, ajoutant que les efforts conjoints à cette fin s’inscriront désormais dans le cadre du partenariat stratégique, conformément à la Vision 2030.
Se référant au Conseil de coopération du Golfe dans son ensemble, Kasoulides a affirmé que Chypre entretient «d’excellentes relations avec tous les pays du CCG et nous sommes reconnaissants du fait qu’en regardant un petit pays comme le nôtre, ils voient un ami qui peut apporter sa contribution, de toutes les manières possibles.»
Chypre fait partie des nombreux pays qui ont exprimé leur inquiétude face aux récentes attaques visant à perturber la stabilité et la sécurité de la région du Golfe. Elle a exprimé sa forte solidarité avec le gouvernement et le peuple saoudien et a catégoriquement condamné les frappes de drones de la milice houthie soutenue par l'Iran contre des établissements civils.
«Nous avons condamné sans réserve les attaques terroristes des Houthis», a-t-il affirmé. «Nous avons soulevé la question au sein de l'UE, dans le but de voir un jour l'UE déclarer la milice houthie comme organisation terroriste.
«Certains États membres hésitent à le faire, affirmant que pour fournir une aide humanitaire aux Yéménites, ils ne peuvent pas en même temps déclarer les Houthis comme terroristes car ils ne pourront pas avoir de relations avec eux. Je ne suis pas d'accord avec cette affirmation. Espérons que cela se fera dans un futur proche.»
Lors de leur rencontre à Nicosie, Kasoulides avait informé le prince Faysal ben Farhane des derniers développements sur la question chypriote. Il avait décrit les mesures de confiance que le gouvernement Anastasiades avait l'intention de proposer afin d'ouvrir la voie à la «reprise de négociations sérieuses pour la réunification de Chypre selon le cadre convenu».
Le différend chypriote trouve son origine dans l'invasion turque du pays en 1974, en réponse à un coup d'État visant à l'union avec la Grèce. Environ 180 000 Chypriotes grecs ont fui le tiers nord de Chypre, tandis que des dizaines de milliers de Chypriotes turcs se sont installés dans le nord, dont seule la Turquie reconnaît la déclaration d'indépendance.
Kasoulides a de nouveau abordé la question lors de l'interview de mardi. «Nous avons toujours été constants dans notre politique de résolution du différend par la négociation et sous l'égide des Nations unies, sur la base des résolutions de l'ONU pour la création d'une fédération bicommunautaire et bizonale», a-t-il clarifié.
«Je crains que ce soit ce que la Turquie ne veut pas maintenant. Nous n'avons rien d'autre à faire que de persister à travers la légalité internationale, les résolutions de l'ONU, dans le cadre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, pour y parvenir.»
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com