CHAMBÉRY : En pleine invasion de l'Ukraine, Eric Zemmour a tenté de défendre ses positions controversées sur la Russie de Vladimir Poutine en meeting à Chambéry (Savoie) vendredi soir, après avoir esquivé le sujet toute la journée dans la campagne de Haute-Savoie.
Dans la ferveur du Phare, une salle de 3.500 places quasi pleine, après une entrée en scène sur une musique électro, le candidat d'extrême droite a rendu hommage aux "blessés" et aux "morts". "La Russie est venue porter la guerre en Europe", a-t-il souligné en préambule.
Puis il a repris sa critique sur "l'expansion ininterrompue de l'OTAN à l'Est", "un motif d'inquiétude pour les Russes" et plaidé pour un traité de paix afin "d'inscrire dans le marbre la fin de l'extension de l'OTAN à l'est de l'Europe" avec "comme corolaire immédiat, le cessez-le feu" et "le retrait des troupes russes".
Selon lui, face à la Russie "les sanctions (économiques) en elles-mêmes seront inefficaces" et "toucheront" les "intérêts" français. "Alors que nous sortons à peine de la crise sanitaire, le prix du gaz va exploser, le prix du baril d'essence va augmenter, le prix des céréales va s'envoler", a-t-il insisté.
"L'intérêt national, c'est de ne pas créer une deuxième guerre froide !", martèle l'ancien éditorialiste du Figaro et de CNews.
Quelque 300 manifestants antiracistes et "antifas" ont contesté sa venue non loin du meeting, selon la presse locale. Le maire et ancien ministre PS Thierry Repentin avait dit qu'Eric Zemmour n'était "pas le bienvenu" à Chambéry.
Esquive
Probablement embarrassé par ses déclarations passées, Eric Zemmour a esquivé les questions sur l'invasion russe tout au long de la journée, en sillonnant des vallées de carte postale de Haute-Savoie.
En décembre, le candidat d'extrême droite faisait "le pari" que la Russie n'envahirait pas l'Ukraine, après avoir salué le "patriotisme" de Vladimir Poutine. Et il n'a jamais cessé de mentionner les "revendications russes" face à "l'extension de l'OTAN".
"Vladimir Poutine, on n'en fait pas un modèle", répond l'eurodéputé et transfuge du RN Jérôme Rivière, tout en soulignant que la diplomatie "n'a pas à être moraliste"
Pas question de parler Russie vendredi matin à Saint-Jeoire, un ancien chef lieu de canton de 3.500 habitants où Eric Zemmour était venu récupérer un parrainage, "qui ne vaut pas soutien", affirmait le maire LR Antoine Valentin, avant d'introduire le meeting de Chambéry pour faire applaudir "la Reconquête!".
Le sésame accordé à Eric Zemmour a valu à l'édile trentenaire un conseil municipal particulièrement houleux la veille. Devant la mairie, une poignée d'opposants ont sifflé Eric Zemmour, "contraire à nos valeurs" juge l'élu d'opposition Stéphane Chambon, dans un département où on "vit bien avec les étrangers, notamment la communauté turque".
Mais la vingtaine de supporteurs applaudissaient plus fort, comme Véronique Vallon, 55 ans, qui aime la "sincérité" du candidat, même si elle n'est "pas d'accord" avec lui sur l'Ukraine, "c'est un pays très loin de nous", avec "un conflit, des soldats qui risquent de ne pas revenir".
Elle considère toutefois qu'il ne faut "pas accueillir les réfugiés" ukrainiens, "on n'a pas les moyens, on ne pourra pas s'occuper d'eux. Sinon, ça aurait été avec plaisir".
« La mondialisation heureuse »
Le candidat Reconquête! s'est ensuite rendu devant l'usine de colorants plastique Avient, promise à une délocalisation en Pologne par ses propriétaires américains, selon le maire, soit 40 emplois directs menacés de suppression. Eric Zemmour a pointé du doigt Emmanuel Macron et la "mondialisation heureuse d'Alain Minc et Jacques Attali".
L'équipe d'Eric Zemmour a renoncé au programme prévu samedi matin. Une déambulation était envisagée dans un marché, mais "il y a des moments adaptés à la légèreté et d'autres moins", compte tenu de la situation internationale, glisse l'eurodéputé Jérôme Rivière.
Mais la campagne continue. "Évidemment l'événement est grave. Il y a la guerre en Europe. Mais il n'y a pas la guerre en France" et "nous devons respecter les Français" et "la démocratie", a souligné Eric Zemmour, devant une ferme à Marcellaz, avec vue sur toute la vallée.