RIYAD: Selon un rapport publié par l’Agence d’information de l’énergie des États-Unis, les prix mondiaux du gaz devraient rester élevés en raison de la demande accrue, à la suite de la reprise postpandémique, de la faible capacité de stockage et des tensions en Ukraine.
Le prix du gaz naturel sur le marché de référence américain Henry Hub atteindra en moyenne 3,92 dollars (1 dollar = 0,88 euro) par million d’unités thermiques britanniques en 2022, un sommet en huit ans, déclare l’administration au début du mois.
C’est la conséquence de plusieurs hausses de prix qui ont quadruplé les prix mondiaux de gros du gaz au cours des douze derniers mois.
Aux États-Unis, le 18 février, les prix à terme du gaz naturel ont clôturé à 4,42 dollars américains, soit une hausse de 12 % par rapport aux 3,96 dollars affichés le 10 février, ce qui représente une hausse de 19 % depuis le début de l'année.
Les prix du gaz sont également influencés par la diminution des livraisons de transporteurs de gaz naturel liquéfié vers l’Europe en raison de l’augmentation de la demande en Asie.
«La crise énergétique de cet hiver en Europe et en Chine a fait grimper la demande de gaz – y compris celle du gaz naturel liquéfié – et cela se reflète dans les prix élevés», déclare Raad al-Kadiri, directeur général de l’énergie, du climat et des ressources au cabinet de conseil Eurasia Group, dans un entretien accordé à Arab News.
Il ajoute: «Cela découle, en partie, des transitions énergétiques, en particulier en Chine, où le pays a mis en place un programme d’envergure en matière de raccordement des logements au réseau de distribution du gaz, ce qui a augmenté la demande de gaz naturel liquéfié.»
En Europe, la combinaison d’un hiver froid et de pénuries d’approvisionnement en provenance de la Russie a fait grimper les prix. Ces pressions se sont accrues en raison des craintes concernant la crise en Ukraine entre la Russie et l’Occident. La menace de sanctions contre Moscou pourrait entraîner des réductions des exportations de gaz russe.
EN BREF
• Le prix du gaz naturel sur le marché de référence américain Henry Hub atteindra en moyenne 3,92 dollars par million d’unités thermiques britanniques en 2022.
• Les prix du gaz sont également influencés par la diminution des livraisons de transporteurs de gaz naturel liquéfié vers l’Europe en raison de l’augmentation de la demande en Asie.
Contrairement au pétrole, pour lequel les pays consommateurs détiennent des stocks stratégiques pour pallier le risque d’une baisse de la production, les réserves de gaz sont traditionnellement faibles.
«À court terme, cela oblige l’Europe à diversifier ses approvisionnements en gaz. Le gaz naturel liquéfié est en effet l’une des solutions de rechange recherchées», poursuit M. Al-Kadiri.
Les décideurs américains seraient en train de parcourir le monde à la recherche d’autres sources de gaz si un conflit entre l’Ukraine et la Russie interrompait l’approvisionnement en gaz de l’Europe.
Les hauts responsables américains se sont entretenus avec le Qatar, pays producteur, ainsi qu’avec des pays consommateurs d’Asie, dont la Chine, pour discuter de la réorientation des cargaisons de gaz naturel liquéfié vers l’Europe, selon un rapport publié par Reuters au début du mois.
Le Qatar est le plus grand détenteur mondial de réserves connues de gaz après la Russie et l’Iran grâce au gisement North Field, qui contient, à lui seul, près de 10 % des réserves mondiales connues.
«Des prix plus élevés seront bénéfiques pour les trésoreries des exportateurs de gaz comme le Qatar qui ont la capacité d’approvisionner ces marchés. Cette hausse des prix confère au Qatar une importance stratégique renouvelée, car il peut utiliser sa capacité d’approvisionnement en gaz pour renforcer son influence géopolitique en tant que fournisseur de dernier recours», note M. Al-Kadiri.
On assiste à une nouvelle demande mondiale de gaz au moment où les Émirats arabes unis (EAU) augmentent leur capacité de production de gaz naturel liquéfié.
«Cela signifie que le pays essaiera de verrouiller des prix plus élevés dans les nouveaux contrats, en plus de bénéficier de ventes au comptant», précise M. Al-Kadiri. Les ventes au comptant sont des transactions ponctuelles portant sur des volumes spécifiques de gaz à livrer à une date, un lieu et un prix convenus.
Ces crises soulignent le rôle important que joue le gaz en tant que carburant de transition à mesure que les économies mondiales se tournent vers l'énergie verte.
«En Chine, la gazéification est la première étape pour s’éloigner de la dépendance au charbon. En Europe, le débat est de savoir si le gaz doit être classé comme vert, mais la dernière crise est susceptible de convaincre les décideurs politiques de la nécessité de ce combustible», renchérit M. Al-Kadiri.
Malgré la crise du gaz, les investissements dans les énergies renouvelables se poursuivront à travers le monde. «La Chine et l’Union européenne (UE) sont déterminées à mettre en place des transitions énergétiques. Ces dernières crises semblent avoir stimulé une plus grande détermination à modifier leurs sources d’énergie plutôt que de saper leurs efforts politiques», ajoute-t-il.
Reste à savoir si la crise énergétique poussera les pays du Golfe et de la région Mena (Moyen-Orient et Afrique du Nord) à tirer parti des réserves de gaz inexploitées.
«La question est de déterminer combien de temps la demande de gaz se maintiendra sur le long terme. Les pays du Golfe ont toujours porté leur attention sur le gaz. Mais ils investissent également beaucoup d’argent dans les énergies renouvelables pour la production d’électricité à usage domestique», conclut M. Al-Kadiri.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com