YANQING: Étincelant puis rongé par le doute, Clément Noël est passé par tous les états cet hiver avant de décrocher l'or du slalom des JO de Pékin, mercredi, devant l'Autrichien Johannes Strolz et le Norvégien Sebastian Foss-Solevaag.
Cri rageur et poing serré, ce "bouillonnant qui cache son jeu", selon l'un de ses entraîneurs, a explosé de soulagement dès l'arrivée de sa seconde manche, alors qu'il restait encore cinq adversaires à passer.
Le Vosgien avait beau n'être "pas complètement sûr que c'était très bien", l'air avait déjà changé en bas de "l'Ice River", la piste de Yanqing baignée de soleil: on égale rarement un Noël dans une telle forme.
Un à un, ses rivaux s'y sont cassés les dents, mais il a fallu attendre la marque rouge devant le nom de Johannes Strolz, leader de la première manche, pour que la certitude d'un podium se change en or, la première médaille internationale du Français de 24 ans.
"Je ne me suis jamais projeté avec une médaille olympique, ou à gagner des Coupes du monde, ou quoi que ce soit", a raconté ce surdoué, qui porte depuis des années les espoirs du slalom tricolore.
« Se vider la tête »
"C'est incroyable, c'est une course parfaite aujourd'hui, peut-être la plus importante de toute ma carrière. C'est très rare qu'on puisse jouer une médaille olympique, c'est un 'one shot' une fois tous les quatre ans", a-t-il confié, remisant son flegme habituel pour une émotion palpable.
Quand il a débarqué discrètement en milieu de semaine dernière au Village olympique, seul dans un car, le N°2 mondial du slalom des trois dernières années pouvait nourrir des doutes: allait-il retrouver le ski impérial du début de saison, qui avait assommé l'étape de Val d'Isère, ou renouer avec les frustrations de janvier ?
"Je savais que j'étais en forme. Mes courses en janvier n'ont pas été bonnes, mais j'étais très rapide ici à l'entraînement", a-t-il expliqué, racontant avoir "coupé" une semaine avant de partir en Chine.
"Je pense qu'avant les Jeux il faut se vider la tête. Quand je suis remonté sur les skis, j'ai essayé d'être calme, relâché, de trouver des solutions", a-t-il expliqué.
Dans une discipline à la densité folle, où une vingtaine de skieurs prétendent au podium, le Vosgien a su sortir ce qu'il avait de meilleur pour suivre le destin qu'il s'était tracé en quittant les reliefs doux de son massif natal pour s'exiler à Val d'Isère.
Seize ans après Dénériaz
Déjà victorieux neuf fois en Coupe du monde, Noël a gravé son nom synonyme de fête à jamais dans l'histoire du sport français, alors que le dernier titre tricolore en ski alpin, la descente d'Antoine Dénériaz en 2006, commençait à prendre la poussière.
Dans la tradition du slalom bleu-blanc-rouge, il rejoint les champions olympiques Jean-Pierre Vidal (sacré en 2002), Jean-Claude Killy (1968), Christine (1964) et Marielle Goitschel (1968).
Noël continue son histoire d'amour avec le rendez-vous olympique. Il s'était révélé au très haut niveau avec une quatrième place surprise à Pyeongchang en 2018. Depuis, il a été numéro deux mondial de la spécialité à trois reprises (de 2019 à 2021).
Loin de son allégresse, son coéquipier Alexis Pinturault, diminué à une épaule, a terminé mercredi à la 16e place, et repartira des Jeux sans médaille individuelle pour la première fois de sa carrière. Il reste l'épreuve par équipes mixte samedi au N.1 mondial de l'hiver dernier pour finir les JO sur un sourire.
Derrière Noël, l'Autrichien de moins en moins surprenant Johannes Strolz a pris l'argent à 61/100, six jours après son titre sur le combiné.
Le champion du monde norvégien Sebastian Foss-Solevaag a su revenir très vite d'une récente blessure à un pouce pour s'emparer du bronze à 70/100, neuf centièmes devant son compatriote Henrik Kristoffersen.