LONDRES: A chaque jour son lot de nouveaux soucis: malgré ses excuses et ses promesses, le Premier ministre conservateur britannique Boris Johnson peine à reprendre la main dans le scandale des fêtes durant le confinement qui menace sa survie politique.
"Que le dernier éteigne la lumière". La Une féroce du tabloïd de droite Daily Mail vendredi illustre l'impression de naufrage à Downing Street, qui a perdu en 24 heures cinq conseillers importants.
Etrillé par le pré-rapport de la haute fonctionnaire Sue Gray, qui a souligné des "erreurs de leadership et de jugement" dans le scandale des fêtes à répétition durant le confinement, Boris Johnson avait promis des changements à Downing Street après s'être excusé devant le Parlement en début de semaine.
Mais ceux-ci ne sont peut-être pas survenus comme il l'entendait. Boris Johnson a vu partir jeudi son influente conseillère politique Munira Mirza, qui travaillait pour lui depuis 14 ans.
Une lourde perte pour le dirigeant de 57 ans, qui l'avait citée parmi les cinq femmes qui l'ont le plus influencé ou inspiré.
Munira Mirza lui reproche d'avoir lancé une accusation "trompeuse" contre le chef de l'opposition travailliste lundi au Parlement.
Boris Johnson avait accusé le chef du Labour Keir Starmer d'avoir permis au pédophile Jimmy Savile, ex-star défunte de la BBC, d'échapper à la justice quand il dirigeait le parquet britannique.
Cette accusation, répandue dans les milieux complotistes et d'extrême droite, a provoqué un tollé, jusque dans son propre camp.
Son ministre des Finances Rishi Sunak, cité comme possible successeur, a souligné que lui-même n'aurait pas tenu de tels propos.
«Chaos» à Downing Street
L'annonce du départ de Munira Mirza a été suivie par celle du chef de la communication Jack Doyle, qui aurait participé à une des fêtes incriminées.
Puis dans la soirée, Downing Street a annoncé les démissions de Martin Reynolds, le secrétaire en chef de Boris Johnson qui avait envoyé un mail à une centaine de personnes pour les inviter à un pot en mai 2020, ainsi que celle de son chef de cabinet Dan Rosenfield. Une cinquième démission a suivi vendredi matin.
"Downing Street est en plein chaos", estime le politologue Jon Tonge, de l'université de Liverpool. "Chaque fois" que Boris Johnson "essaie de restaurer l'ordre, de nouveaux problèmes surviennent".
Pour motiver ses troupes, Johnson s'est fendu d'un "le changement est bon" tiré du film d'animation le Roi Lion, lors d'une réunion avec son équipe vendredi. Son porte-parole déclaré qu'il y avait souligné le "besoin de changement et reconnu qu'il y a eu des erreurs de jugement".
Ces cinq départs concluent une semaine difficile pour Boris Johnson, en dépit d'un flot d'annonces.
Deux ans après la réalisation du Brexit qui avait été la clé de son triomphe électoral en décembre 2019, il a promis d'aller plus vite dans la concrétisation des "libertés" permises selon lui par la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne.
Le dirigeant britannique a vanté le rôle moteur de Londres dans l'union des Occidentaux contre la Russie. Il s'est rendu en Ukraine rencontrer le président ukrainien Volodymyr Zelensky, s'est entretenu par téléphone avec le président russe Vladimir Poutine.
Mais lors de son déplacement à Kiev, Boris Johnson a été rattrapé par des questions de la presse sur le "partygate".
Et avant son échange avec le président russe, l'ambassadeur adjoint russe aux Nations unies a jugé la diplomatie britannique "bonne à rien".
Le sort du dirigeant britannique est suspendu aux conclusions de l'enquête de police sur les fêtes en question en 2020 et 2021, juge le politologue Jon Tonge.
Si celle-ci l'exonère, il "pourrait survivre". Dans le cas inverse, il ne fait guère de doute selon lui que le seuil de 54 députés conservateurs requis pour déclencher un vote de défiance serait atteint. Ils sont pour l'heure une douzaine à l'avoir fait publiquement.
M. Tonge souligne que Boris Johnson a été choisi par les conservateurs pour sa capacité à accomplir le Brexit et gagner des élections.
Maintenant qu'il a réalisé les deux et que bien peu le voient encore comme une machine à gagner les élections, souligne-t-il, "ses meilleurs jours sont derrière lui".