Au procès Charlie, l'embarras de Farid Benyettou, ex-mentor des Kouachi

 Farid Benyettou, 32 ans, l'ancien «émir» de la cellule des Buttes Chaumont et l'homme qui aurait radicalisé les frères Kouachi impliqués dans les attentats terroristes de Paris, arrive au palais de justice de Paris, le 3 octobre 2020, pour son audience dans le cadre de le procès de 14 personnes soupçonnées d'être complices des meurtres djihadistes de Charlie Hebdo. (AFP)
Farid Benyettou, 32 ans, l'ancien «émir» de la cellule des Buttes Chaumont et l'homme qui aurait radicalisé les frères Kouachi impliqués dans les attentats terroristes de Paris, arrive au palais de justice de Paris, le 3 octobre 2020, pour son audience dans le cadre de le procès de 14 personnes soupçonnées d'être complices des meurtres djihadistes de Charlie Hebdo. (AFP)
Short Url
Publié le Samedi 03 octobre 2020

Au procès Charlie, l'embarras de Farid Benyettou, ex-mentor des Kouachi

  • « Mes premiers mots, je voudrais qu'ils soient pour les victimes et pour leurs proches: j'ai une part de responsabilité dans le parcours des frères Kouachi », a assuré Farid Benyettou, 39 ans, devant la cour d'assises spéciale de Paris
  • « Emir » autoproclamé de ce groupe de jeunes radicalisés, il a eu comme adeptes les frères Kouachi et Peter Cherif, présenté comme un possible commanditaire de la tuerie de Charlie Hebdo

PARIS : Repenti sincère ou bien de circonstance? Entendu samedi comme témoin au procès Charlie Hebdo, l'ex-mentor des frères Kouachi Farid Benyettou a demandé « pardon » aux familles des victimes et reconnu une "responsabilité morale", sans toutefois convaincre les parties civiles.

« Mes premiers mots, je voudrais qu'ils soient pour les victimes et pour leurs proches: j'ai une part de responsabilité dans le parcours des frères Kouachi », a assuré Farid Benyettou, 39 ans, devant la cour d'assises spéciale de Paris. 

« J'aimerais revenir en arrière, réparer les choses, mais ce n'est pas possible... Sachez que je suis vraiment désolé », a poursuivi l'ancien prédicateur, silhouette fine, lunettes et cheveux clairsemés.

Figure de l'islam radical au début des années 2000, Farid Benyettou a joué un rôle-clé dans la filière dite "des Buttes-Chaumont", démantelée en 2005, qui visait à envoyer des jihadistes dans les rangs d'Al-Qaïda en Irak.

« Emir » autoproclamé de ce groupe de jeunes radicalisés, il a eu comme adeptes les frères Kouachi et Peter Cherif, présenté comme un possible commanditaire de la tuerie de Charlie Hebdo.

Un passé que Benyettou, qui se présente comme « repenti », dit assumer. A l'époque, « je faisais office d'idéologue », explique le trentenaire, les mains jointes sur le pupitre.

« J'ai encouragé Chérif Kouachi dans son parcours de jihadiste, j'ai cautionné son départ pour l'Irak en 2004... Je suis forcément lié à son parcours, même si je n'ai pas participé à ce qu'il a fait par la suite », ajoute-t-il.

« Colérique »

Pour ce rôle, Farid Benyettou a été condamné en 2008 à six ans de prison. Chérif Kouachi, arrêté juste avant son départ pour l'Irak, a écopé lui de trois ans. Les deux hommes ont continué de se voir jusqu'en 2014.

A partir de 2010, « il y a quelque chose qui a commencé à changer dans le groupe », relate le jeune homme, qui dit avoir pris ses distances à cette époque avec l'islam radical et ses anciens adeptes - qu'il tentait d'éviter. 

Mais Chérif Kouachi "venait frapper à ma porte, et je n'ai jamais eu le courage de couper complètement", précise l'ex-prédicateur, qui justifie ainsi le lien maintenu avec le futur tueur de Charlie.

A l'époque, « Chérif était devenu beaucoup plus dur sur ses positions », explique M. Benyettou, qui le décrit comme « colérique ». « Pour lui, la seule manière de résoudre quelque chose, c'était par la violence ».

Dans la salle, où ont pris place plusieurs survivants de Charlie Hebdo, les parties civiles laissent poindre leur agacement : n'aurait-il pas pu agir? User de son influence pour le détourner de ces idées radicales ? « Je n'ai pas cessé d'avoir des discussions avec lui. J'ai même eu le courage de lui dire que j'étais contre ce que Mohamed Merah avait fait », se défend maladroitement Benyettou, qui décrit un Chérif Kouachi fermé à la discussion.

« Il écoutait ceux qui disaient ce qu'il voulait entendre. Le jour où j'ai tenu un discours contraire » à ses attentes, « il n'a plus voulu m'écouter », poursuit le trentenaire.

« Taqiya »

Au lendemain de l'attentat contre Charlie Hebdo, Benyettou s'était présenté de lui-même aux services de renseignement, se disant prêt à aider l'enquête. A l'issue de son audition, il avait été remis en liberté. 

Depuis 2015, il a travaillé avec l'anthropologue Dounia Bouzar pour la prévention de la radicalisation et publié en janvier 2017 un livre sur son parcours, « Mon djihad: itinéraire d'un repenti ».

Sur les bancs des avocats, certains expriment toutefois des doutes sur sa sincérité. « Vous pourriez être un faux repenti qui utilise la taqiya » (dissimulation), pointe Me Catherine Szwarc.

Pendant la promotion de son livre, Farid Benyettou - qui travaille aujourd'hui comme chauffeur poids lourd - avait choqué les proches de victimes des attentats, en arborant un badge: « Je suis Charlie ».

Un épisode relevé à l'audience. « Quel était le sens de ce geste? Est-ce que vous considériez comme légitime de caricaturer le prophète? », l'interroge l'avocat de Charlie Hebdo, Richard Malka.

« Pour moi, c'est une forme d'expression », répond Benyettou, qui se veut sans équivoque sur ce point. « J'ai grandi avec les Guignols de l'info. La caricature est un droit, il faut le défendre ».

 


Un influenceur franco-iranien jugé en juillet pour apologie du terrorisme

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
Short Url
  • La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels
  • Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient

BOBIGNY: Un influenceur franco-iranien sera jugé début juillet devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour apologie du terrorisme, ont indiqué jeudi à l'AFP le parquet et ses avocats.

Shahin Hazamy, 29 ans, s'est vu "délivrer une convocation à une audience du 3 juillet pour apologie du terrorisme par un moyen de communication en ligne en public", a déclaré le parquet, confirmant son arrestation mardi révélée par le magazine Le Point.

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels.

Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient.

"En s'en prenant à un journaliste la justice envoie un très mauvais signal à la liberté de la presse. Notre client Shahin Hazamy a subi un traitement inadmissible, avec une perquisition devant ses enfants en bas âge alors que les faits reprochés ont bientôt deux ans", ont déclaré à l'AFP ses avocats Nabil Boudi et Antoine Pastor.

Ces poursuites font suite à l'arrestation fin février d'une autre Iranienne en France, Mahdieh Esfandiari, actuellement écrouée pour apologie du terrorisme dans le cadre d'une information judiciaire confiée au Pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH).

Annonçant cette nouvelle arrestation en France d'un de ses ressortissants, la télévision d'Etat iranienne a fustigé mercredi une "violation flagrante de la liberté d'expression dans un pays qui prétend être une démocratie".


Macron appelle à intégrer Mayotte dans la Commission de l'océan Indien

Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
Short Url
  • "Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo
  • Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale

ANTANANARIVO: Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores.

"Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo.

La COI réunit les États insulaires (Madagascar, Comores, Maurice, Seychelles et La Réunion pour la France) dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale.

"L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité, dans la pluralité de ses dimensions maritime, alimentaire et pour la santé sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région", a insisté M. Macron.

Il a suggéré toutefois d'"avancer de manière pragmatique vers cet objectif", sans réclamer l'intégration pleine et entière immédiate de l'archipel.

"La France est le premier bailleur de la COI", a-t-il aussi souligné, en précisant que l'Agence française du développement (AFD) gérait un "portefeuille de 125 millions d'euros de projets" de l'organisation.

"La COI est un modèle de coopération (...) Aucune de nos îles ne peut relever seule le défi", a-t-il ajouté, évoquant un "océan Indien profondément bousculé" par les défis planétaires actuels.

"Ensemble, en conjuguant nos atouts (..) nous pouvons tracer une voie nouvelle singulière", a-t-il assuré.

L'Union des Comores s'oppose à l'intégration de Mayotte dans la COI car elle conteste la souveraineté de la France sur Mayotte, restée française lorsque l'archipel des Comores est devenu indépendant en 1975.

Mayotte, tout comme les îles Éparses, autre territoire français hérité de la colonisation et revendiqué par Madagascar, sont au cœur du canal du Mozambique, voie majeure de transport maritime qui renferme d'importantes réserves en hydrocarbures.


Narcobanditisme à Marseille: le ministre de l'Intérieur annonce 21 arrestations dans «le haut du spectre»

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
Short Url
  • Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme"
  • Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail

MARSEILLE: Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a annoncé jeudi un coup de filet avec 21 interpellations de trafiquants appartenant au "haut du spectre" du narcobanditisme marseillais, lors d'un déplacement à Marseille.

Une opération "a eu lieu très tôt ce matin avec 21 interpellations liées au narcobanditisme, dans le haut de spectre, qui doit nous permettre de démanteler un réseau important sur Marseille", qui tenait la cité de la Castellane, dans les quartiers populaires du nord de la ville, a déclaré Bruno Retailleau lors d'une conférence de presse.

Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme", a insisté M. Retailleau.

Selon une source policière, cette enquête portait notamment sur du blanchiment.

Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail.

Au total, 170 enquêteurs ont été mobilisés pour ce coup de filet qui est, selon le ministre, "un coup dur", "sinon mortel", porté à ce réseau.

La cité de la Castellane, vaste ensemble d'immeubles blancs en bordure d'autoroute, est connue pour être un haut lieu marseillais de ces trafics de stupéfiants qui empoisonnent le quotidien des habitants. En mars 2024, Emmanuel Macron s'y était rendu pour lancer des opérations "place nette XXL" contre les trafiquants et depuis la présence policière y était quasi constante, mais si le trafic était moins visible il se poursuivait notamment via les livraisons.

Ce coup de filet n'a a priori "pas de lien" avec les récents faits visant des prisons en France, a également précisé le ministre.

Le ministre était à Marseille pour dresser un premier bilan des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, lancés en février, avec par exemple mercredi 1.000 fonctionnaires mobilisés dans les Bouches-du-Rhône qui ont procédé à 10.000 contrôles d'identité.

Au total, 106 personnes ont été interpellées, dont une trentaine d'étrangers en situation irrégulière, dans le cadre d'une opération "massive" et "visible".