BREST/ NATIONS UNIES: L'Union européenne souhaite poursuivre ses missions militaires de formation au Mali mais « pas à n'importe quel prix », a averti jeudi le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, alors que la junte malienne refuse d'organiser rapidement des élections pour rendre le pouvoir aux civils.
« Nous voulons rester engagés au Mali, nous voulons rester engagés au Sahel, mais ça ne doit pas se faire à quel n'importe quel prix », a-t-il prévenu lors d'une conférence de presse en marge d'une réunion informelle des ministres de la Défense de l'UE à Brest (ouest de la France), la France assurant la présidence semestrielle tournante de l'Union européenne.
« Pour l'instant nos missions de formation et de conseil aux forces armées et de sécurité intérieures maliennes vont continuer » par le biais de l'EUTM, « mais on a déjà suspendu l'aide budgétaire aux autorités maliennes à partir du moment où on a su que les élections n'allaient pas avoir lieu », a-t-il rappelé.
« Malgré tous les avertissements aux autorités maliennes, nous ne voyons aucun signe de progrès », a-t-il déploré.
« Nous allons suivre de près la situation et prendre des mesures (...) dans la même ligne » que les lourdes sanctions par les dirigeants ouest-africains réunis au sein de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), a-t-il commenté, confirmant la préparation de sanctions européennes contre la junte malienne annoncée mercredi par le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian.
Le chef de l'ONU demande au gouvernement malien un «calendrier électoral acceptable»
Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a réclamé jeudi au gouvernement malien « un calendrier électoral acceptable », à la veille de manifestations dans le pays, à l'appel de la junte au pouvoir, pour dénoncer les sanctions récentes prises par la Cédéao.
« Il est absolument essentiel que le gouvernement malien présente un calendrier acceptable du point de vue des élections », a déclaré le chef de l'ONU lors d'une rencontre avec des journalistes. Il a précisé espérer « entrer en contact rapidement avec le gouvernement malien ».
Si « un calendrier acceptable est présenté et si le gouvernement prend des mesures dans cette direction, il y aura une levée progressive des sanctions » -- fermeture des frontières, mesures économiques et financières -- par la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), a rappelé Antonio Guterres.
« Je travaille avec la Cédéao et l'Union africaine pour créer les conditions qui puissent permettre au gouvernement du Mali d'adopter une position raisonnable et acceptable pour accélérer une transition qui dure déjà depuis longtemps », a-t-il aussi dit. Cela pourrait « permettre un rétablissement de la normalité dans les relations entre cet Etat et la communauté internationale, la Cédéao en particulier », a-t-il estimé.
Mi-décembre, l'Union européenne a suspendu temporairement sa mission de formation des forces armées centrafricaines, en raison du « contrôle exercé par les mercenaires de la société Wagner », que les Européens accusent désormais de s'implanter au Mali pour soutenir la junte.
« Nous discutons (...) dans quelles conditions cette lutte contre le terrorisme pour laquelle nous sommes mobilisés peut se poursuivre », a renchéri la ministre française des Armées, Florence Parly, présente aux côtés de M. Borrell, en estimant « urgent que la transition politique soit menée à son terme ».
La France, militairement présente au Mali depuis neuf ans pour lutter contre les djihadistes, est en train d'y réduire ses effectifs tout en maintenant des troupes dans le nord du Mali à Gao, Ménaka et Gossi.
Toutefois, « cette coopération n'a de sens que si elle s'intègre dans un cadre plus global (...) avec des réformes de fond notamment sur la gouvernance. Ce travail-là n'est possible qu'avec des autorités légitimes », a ajouté Mme Parly en évitant de se prononcer sur le maintien ou non des forces françaises.
Interrogée sur le fait que Bamako avait dénoncé la veille une « violation de l'espace aérien du Mali » par un avion militaire français, Mme Parly a affirmé que la fermeture de l'espace aérien décidée par la Cédéao « ne concern(ait) pas les vols militaires » aux yeux de la France.